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Mason Greenwood, par la petite porte
Manchester United a blanchi Mason Greenwood au terme de six mois d'enquête interne. Le club voulait le réintégrer dans l'effectif, avant de finalement renoncer face à l'ampleur du tollé. Une tentative de ménager la chèvre et le chou pas vraiment réussie.
Suspendu par son club depuis le 30 janvier 2022, Mason Greenwood est enfin fixé sur son sort. En février, la police a dû abandonner les charges en raison de « nouveaux éléments » et du « retrait de témoins clés ». Dès lors, Manchester United a démarré une enquête interne, qui a conclu que le joueur « n’avait pas commis les infractions pour lesquelles il avait été inculpé à l’origine » – tentative de viol et d’agression. L’international anglais, toujours sous contrat jusqu’en juin 2025, peut donc désormais reprendre le fil de sa carrière. Il ne portera cependant plus le maillot des Red Devils, « d’un commun accord », puisque « toutes les personnes impliquées, y compris Mason, reconnaissent qu’il est difficile pour lui de reprendre sa carrière à Manchester United », dixit le communiqué mancunien. Si l’on se fie aux rumeurs circulant outre-Manche, l’attaquant de 21 ans pourrait rallier l’Italie, la Turquie ou Al-Ettifaq. Très loin de Manchester, où l’on espère vite tourner la page.
Feu rouge
Le club s’est retrouvé à gérer une situation compliquée, d’autant que la jeune femme accusant initialement Greenwood avait publié des photos et des vidéos sur les réseaux sociaux où elle apparaissait le visage en sang et le corps couvert de contusions. La manière de procéder a d’ailleurs prêté à discussion, déjà sur la forme. « C’était clair dès le premier jour qu’il ne jouerait plus jamais pour Manchester United. Le processus pour en arriver là a été assez horrible, déplorait Gary Neville sur Sky Sports. Une telle situation demande une grande autorité, qui vient du plus haut niveau. Manchester United ne l’a pas. Sur une question comme les violences domestiques, il faut de l’indépendance. Manchester United ne devrait pas être juge et partie. Je pense que des questions de cette importance et de cette gravité devraient être traitées de manière indépendante par un groupe d’experts. Il est clair que le club n’a pas eu les compétences et la capacité de gérer cette situation correctement. »
Tonight. 6.30pm. Old Trafford forecourt. Join us. A place for us to come together, meet, build and strategise. Remember – Greenwood is a symptom, the Glazers and their rampant pursuit of profit above values and morals is the cause. The enemy has many faces. pic.twitter.com/3uPDxjiLmr
— Female Fans Against Greenwood's Return (@FFAGR2023) August 14, 2023
Sur le fond, ensuite. The Athletic a révélé qu’il y a encore quelques jours, la direction souhaitait réintégrer le joueur. Erik ten Hag y était favorable, et le club avait même préparé le terrain en identifiant des journalistes, des consultants et des politiques selon leur soutien ou leur hostilité potentielle. « Mercredi dernier, le plan de United était de ramener Greenwood. Jeudi et vendredi matin, les dirigeants du club ont passé du temps à justifier leur choix auprès des employés mécontents de la direction prise, certains envisageant même de démissionner ou de se mettre en grève », écrit The Athletic, toujours bien informé. « La réintégration était l’un des résultats que nous avions envisagés et planifiés », a confirmé le directeur exécutif Richard Arnold dans une lettre adressée aux supporters. La levée de boucliers a largement dépassé le cadre du football, et a finalement eu raison du plan des dirigeants mancuniens. « Le club devrait s’efforcer de prendre la bonne décision, de soutenir les victimes d’abus domestiques et d’agressions sexuelles, d’agir avec intégrité. Le club doit comprendre qu’il ne s’agit pas d’une crise de relations publiques, mais de faire ce qui est juste », balance alors le député travailliste Andrew Western. L’influent groupe de supporters qu’est le Manchester United Supporters Trust a salué la décision finale, en regrettant « l’absence totale de consultation des supporters », qui « a jeté de l’huile sur le feu », ainsi que les longues semaines de spéculation, qui ont donné « une très mauvaise image du club ». On retiendra finalement que Manchester United avait choisi de réintégrer Greenwood et que la direction, comme dans le projet de Superligue, serait restée sur sa position sans la pression populaire. Le club se sort de cette sombre affaire, enfin. Mais par la petite porte.
Par Quentin Ballue