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Manchester United, le point zéro

Par Maxime Brigand
5 minutes
Manchester United, le point zéro

Battu dimanche pour la sixième fois en huit matchs, Manchester United est aujourd’hui scotché à deux points du top four, mais se retrouve surtout plus que jamais à un virage, ce que ne cache plus Ole Gunnar Solskjær.

« Je ne sais pas. » La tornade a été déclenchée après six secondes de réflexion, un gros soupir et moins de quarante-huit heures après une première bourrasque. Ole Gunnar Solskjær a le regard dans le vide, les joues encore rougies par la baffe monumentale qu’il vient de recevoir sur le terrain d’Everton (4-0) et semble dans une impasse. Alors, il allume, encore et encore : « Est-ce que mes joueurs sont conscients de leurs responsabilités ? Je ne sais pas. Il faut leur demander. Je leur ai demandé, moi aussi. Quand vous jouez pour ce club, il faut montrer autre chose. Je veux que mon équipe soit la plus travailleuse de ce pays. C’est ce que l’on était avec Sir Alex, Giggs, Becks, Gary Neville, Denis (Irwin). Peu importe le talent, il faut courir plus que les autres. Et vous ne pouvez pas changer toute une équipe. Je vais réussir ici et je sais déjà que certains joueurs ne feront plus partie de cette équipe. » Dimanche, à Goodison Park, les hommes de Solskjær n’ont pas seulement moins couru (8,03 kilomètres de moins, quand même) que les Toffees de Marco Silva : ils se sont suicidés collectivement en place publique. Et en grand, enchaînant une sixième défaite sur les huit derniers matchs, cinq jours après une élimination logique à Barcelone (3-0) en C1. Logique sportivement, mais piteuse pour l’image renvoyée lors du retour, au Camp Nou, car ces mecs n’ont pas pris la porte, mais sont sortis d’eux-mêmes.

La réalité des choses

C’est ce détail qui est aujourd’hui le plus dérangeant et c’est lui qui avait déjà poussé Ole Gunnar Solskjær à sortir une conférence de presse tout en transparence vendredi dernier. Avant ce déplacement à Everton, le Norvégien avait alors renversé la table : « J’ai beaucoup appris sur les joueurs depuis que je suis arrivé. L’attitude de la plupart d’entre eux m’a surpris, et certains ont besoin de connaître la réalité des choses. Il ne faut pas oublier où on est, et ici, il n’y a aucun moyen de se cacher, tout le monde peut voir quel est votre niveau. Ce sont les performances sur le terrain qui construisent votre carrière. » Ce type sait de quoi Manchester United est fait et refuse qu’on joue avec, il sait aussi que l’histoire de ce club est avant tout le récit d’une longue suite d’échecs découpée par trois entraîneurs exceptionnels qu’étaient Ernest Mangnall, Matt Busby et Sir Alex Ferguson. Être de Manchester United, ce n’est pas proposer le football des autres, c’est construire son chemin : Solskjær en est là.

Après la défaite de la semaine, à Barcelone, le technicien norvégien n’a d’ailleurs pas caché avoir compris que cela devait se faire « étape par étape » et que cela prendrait du temps. Un an, peut-être deux ans, mais Manchester United doit accepter de passer aujourd’hui par un reboot presque total, et ce, à tous les étages. Dans ce cadre, Ole Gunnar Solskjær ne doit pas être regardé comme l’anti-Mourinho des premiers mois et commence enfin à dépasser le happiness manager vu jusqu’à la qualification accidentelle au Parc, en Ligue des champions. Non, Solskjær est le socle du chantier et il faut construire autour de lui, lui donner un directeur technique de la performance (ce qu’est Michael Edwards à Liverpool ou Txiki Begiristain à Manchester City), un cadre technique ultra pointu (Manchester United est largement en retard sur ses concurrents) et des joueurs à la United. Soit des types qui, comme le disait Tony Adams, doivent « jouer pour le nom placé sur le recto du maillot » avant de penser à leur contrat. Là-dessus, on le sait, la grande lessive est pour bientôt, alors que Manchester United n’avait pas encaissé autant de buts sur une saison (48) depuis quarante ans et qu’il n’a plus gagné à l’extérieur depuis fin février.

Opération désherbage

Après une première séquence à ne parler que du père Ferguson et à remettre le club dans la course à la qualification pour la prochaine C1, Ole Gunnar Solskjær est entré, depuis qu’il a signé son contrat, dans la phase de reconstruction. Une phase qui sera forcément conditionnée par la couleur du ticket européen décroché en fin de saison, mais qui va surtout débuter par de nombreux départs. Ainsi, Alexis Sánchez, dont la seule partition réussie à Manchester United restera celle jouée au piano sur son clip de présentation et dont le salaire est un boulet incroyable, va partir, tout comme probablement Ander Herrera, Juan Mata, Matteo Darmian, Marcos Rojo. David de Gea, Paul Pogba et Anthony Martial auront aussi des possibilités. Antonio Valencia, lui, a déjà officialisé son départ. Mais derrière, comment reconstruire ?

Si Solskjær a déjà annoncé vouloir bâtir sur un noyau de joueurs britanniques (McTominay, Lingard, Rashford), Manchester United va taper fort, chercher à attirer des jeunes promesses (Rice, Sancho, Wan-Bissaka) et tenter d’attraper un ou deux gros cadres confirmés. L’objectif est simple : remettre ce club sur les rails de son histoire à une heure où son entraîneur doit venir s’excuser publiquement des performances de ses joueurs. Interrogé sur le sujet dimanche sur Sky Sports, Gary Neville a aussi été dans ce sens : « Qu’Ole ait à s’excuser, c’est embarrassant. J’ai souvent dit que si les clubs avaient de la mauvaise herbe dans le jardin, il fallait s’en débarrasser. Ce club est pourri par les mauvaises herbes, des mauvaises herbes qui s’attaquent à ses fondations et qui doivent être traitées correctement. Aujourd’hui, cette performance était rance et je n’ai pas besoin de donner de noms. Vous les connaissez, ils sont dans les journaux tous les jours et sont sur les réseaux sociaux tous les jours. » Opération désherbage enclenchée après un dimanche où aucun joueur ne semblait vraiment triste d’avoir glissé.

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