- France – Ligue 1 – 7e journée – Guingamp/Metz
Malouda, la cote d’amour
Florent Malouda revient ce soir dans son jardin du stade de Roudourou, mais dans le camp des visiteurs. Même s'il est désormais grenat et qu'il n'a plus porté le maillot rouge et noir du club costarmoricain depuis plus d'une décennie, il devrait être chaleureusement accueilli par le public de l'EAG à son entrée sur la pelouse. Pourquoi ? Souvenirs en cinq actes.
Couvé par Guy Lacombe
Arrivé en métropole à 16 ans en 1996 en provenance de sa Guyane natale, il effectue ses débuts pros du côté de Châteauroux un an plus tard, sous les ordres de Victor Zvunka, celui-là même qui l’avait repéré (et qui apportera à l’EAG sa première Coupe de France en 2009). En 2000, le jeune Malouda est déjà convoité par une palanquée de grosses écuries, mais c’est Guingamp qui rafle la mise contre 1,52 million d’euros, une somme record à l’époque pour le club breton. Ses débuts avec le maillot rouge et noir sont pourtant délicats : sous les ordres de Guy Lacombe, il doit d’abord se contenter d’un temps de jeu assez limité au sein d’une équipe promue qui tourne plutôt bien sans lui. Sa seconde saison dans les Côtes-d’Armor est nettement plus convaincante : utile, il apprend vite le métier et dépanne même à l’occasion au poste de latéral gauche, à côté de Guyot, Kouassi, Bourdeau and co (souvenirs !). Offensivement, le bon gars Flo fait aussi de gros progrès, notamment au contact de Stéphane Guivarch. L’épisode Guy Lacombe à l’EAG s’achève par un maintien acquis à l’arrache lors de la dernière journée, grâce à une dernière victoire face à Troyes. Malouda est désormais prêt pour le grand décollage de sa carrière.
Drogba, le partenaire d’une carrière
Et ce grand décollage intervient lors de la saison 2002-2003, la troisième et dernière passée en Bretagne. L’exercice est marqué par son entente avec un certain Didier Drogba, arrivé à l’hiver 2002 à Guingamp en provenance du Mans. Là aussi, la trouvaille est signée Guy Lacombe. Mais les débuts du Franco-Ivoirien au Roudourou sont encore plus compliqués : il se montre assez maladroit, ne marque pas et est pris en grippe par une partie du public. Sa transformation durant l’intersaison est spectaculaire et le duo constitué de Drogba et de Malouda fait des merveilles. À eux deux, ils vont totaliser 27 buts sur l’ensemble de la saison de L1, 17 pour Drogba, 10 pour Malouda, confirmé au poste d’ailier gauche. L’entente parfaite entre les deux joueurs atteindra son paroxysme lors des cinq saisons qu’ils passeront ensemble du côté de Chelsea entre 2007 et 2012, avec la saison 2009-2010 en point d’orgue (29 buts en Premier League pour Drogba, 12 pour Malouda). Beaucoup de Costarmoricains se sont découverts supporters des Blues durant cette époque…
Une dernière saison complètement folle en Bretagne
Si Malouda est resté extrêmement populaire à Guingamp, c’est surtout en raison de ses performances lors de cette fameuse saison 2002-2003, la meilleure de l’histoire du club. Guy Lacombe avait alors laissé sa place sur le banc à Bertrand Marchand, et l’équipe forgée les années précédentes atteignait alors sa pleine maturité : Michel, Carnot, Kouassi, Bardon, Ferrier… Ils avaient galéré comme jamais pour se maintenir l’année précédente, ils allaient désormais lâcher les chevaux et enchaîner les victoires avec la manière, bien aidés par l’émergence de quelques jeunes (Yahia, Guillaume, Sikimić, Danic…), le renfort de quelques éléments d’expérience (Fabbri, Le Roux, Montero…) et bien sûr le duo constitué de Drogba et Malouda, souvent irrésistible. Le talent de Flo Malouda éclate au grand jour : il joue libéré et épanoui, heureux de pouvoir rivaliser avec les cadors après deux saisons en bas de tableau. Cette saison-là, l’EA Guingamp termine 7e de L1, à 3 points seulement du podium et d’une qualification pour la Ligue des champions.
Un match à Gerland pour convaincre l’OL
Cette saison 2002-2003 a révélé un Malouda ambitieux, qui se sait désormais capable d’enchaîner les gros matchs face aux meilleures équipes. Très convoité, il profite d’un dernier match disputé à Gerland sous les couleurs guingampaises pour convaincre les dirigeants lyonnais de l’engager. Ce soir-là, l’EAG gâche la fête des champions de France en s’imposant 4-1 à l’issue d’une énorme performance, la dernière de l’ère Drogba/Malouda/Fabbri. Pas de quoi fâcher l’OL pour autant : quatre jours avant à Roudourou, cette même équipe de Guingamp avait offert le titre à Lyon en dominant 3-1 son adversaire pour le titre, l’AS Monaco.
Des liens intacts avec l’EAG
Plus de dix années ont passé depuis cette période, mais Malouda reste encore très populaire à Guingamp. Des rumeurs l’ont renvoyé vers le club qui l’a révélé lors des deux précédents étés, mais c’est finalement le FC Metz qui vient de récupérer le Guyanais, désormais âgé de 34 ans. Entre son départ du club en 2003 et ce soir, il a foulé par deux fois la pelouse de Roudourou : en 2009 lors du match de qualification entre la France et les îles Féroé, puis en mai 2012, en tant qu’invité de prestige pour les festivités des 100 ans du club. Accompagné de Drogba, évidemment, il avait alors déclaré : « Quel que soit l’endroit où nous irons, on gardera tous les deux ce côté breton. On se sent lié à la Bretagne et à Guingamp profondément. Cette période guingampaise aura été à la fondation de notre carrière. Ici, on a appris les bases, la façon de s’entraîner, l’exigence et le fait de ne jamais renoncer. J’ai toujours en tête notre sauvetage face à Troyes lors de la dernière journée de 2002. C’est une expérience qui a compté. Sans cette période guingampaise, on n’en serait sans doute pas là. » À voir si Malouda aura droit ce soir à un petit « Hou Ha Malouda ! » scandé par le Kop Rouge, comme à la belle époque.
Par Régis Delanoë