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Mais qui est donc ce diable de Dodi Lukebakio ?
Peut-on bouffer tout cru la défense du Bayern Munich en inscrivant un triplé face au Rekordmeister, tout en ayant été tricard à Toulouse et Watford ces derniers mois ? La réponse est oui, quand on s'appelle Dodi Lukebakio. Un type dont la Belgique attend que le talent arrête de faire des zigzags depuis des années et qui semble enfin filer droit en Allemagne.
En Belgique, voilà un bon bout de temps que le populo s’est familiarisé avec sa grande carcasse filiforme. Et un bon bout de temps, aussi, qu’on avait cessé de le voir comme un international A belge en puissance. Après des débuts en professionnel à seulement 18 ans à Anderlecht, la fusée Dodi Lukebakio avait effectué son retour sur terre : une sortie manquée du côté de Toulouse, une expérience mitigée au Sporting Charleroi et un nouvel échec à Watford. Avant de soudainement chatouiller la lune, samedi 24 novembre, face au Bayern Munich. Un club que Dodi a avalé tout cru, presque à lui seul, en plantant un triplé synonyme de match nul inespéré pour ses potes du Fortuna Düsseldorf.
[? RÉSUMÉ VIDÉO] ?? #Bundesliga ? Le Bayern Munich craque contre Düsseldorf !? Après avoir mené 2-1, les Bavarois concèdent le nul 3-3 !? Un triplé pour Lukebakio !https://t.co/0O6Eglz3DV
— beIN SPORTS (@beinsports_FR) 24 novembre 2018
Le gros bide toulousain
Car c’est dans les rangs de l’actuel avant-dernier de Bundesliga que Lukebakio est parti tenter de relancer sa carrière cet été, en prêt, alors que Watford, qui avait acheté cinq millions d’euros le joueur à Charleroi en janvier 2018, a jugé que le gamin devait encore se faire les crocs pour se frotter au plus haut niveau. Ce qui ressemble peu ou prou à l’histoire de la carrière de Dodi, dont la pointe de vitesse et les fulgurances n’ont pour l’instant jamais fait long feu face au manque de maturité d’un bonhomme pas toujours fiable. La France et plus particulièrement le TFC, où le joueur a été prêté par Anderlecht au début de l’exercice 2016-2017, ont pu en faire l’expérience. À cause d’une énorme bourde administrative, l’attaquant n’a pu disputer que cinq matchs de Ligue 1 pendant la saison. Nul n’a en effet cru bon de relever que le joueur, pourtant né en Belgique, mais ayant égaré son acte de naissance, ne possédait alors que la nationalité congolaise. Problème : « La charte du foot pro stipule qu’un extracommunautaire doit avoir au moins une sélection officielle avec son pays » , indique-t-on à la LFP, qui refuse d’homologuer son contrat.
L’affaire finira par se régler, mais il sera trop tard pour recoller les morceaux avec le TFC. Après ses débuts sur le pré en janvier 2017 face à Marseille, le minot se fait dézinguer par Pascal Dupraz, chauffé à blanc par le manque d’implication défensive du gamin : « Je n’ai pas du tout aimé… Il va vite, mais je ne l’ai vu qu’une fois. Je ne sais pas comment on peut aller vite dans un sens et moins dans l’autre. »
Un câlin et Dodi
Anderlecht rapatrie alors son espoir au pays, en le prêtant cette fois-ci à Charleroi. Une première éclaircie pour Dodi, qui disputera 19 matchs de Jupiler League en une demi-saison et marquera trois buts. Et en profite alors pour faire lucidement le point sur ses échecs passés : « Ça a été tellement vite pour moi, que je n’étais pas prêt pour tout ça… C’était trop pour moi, je me retrouvais dans les médias, je n’étais pas préparé… Maintenant, j’ai enfin réalisé que j’étais footballeur professionnel. Disons que j’avais besoin de personnes qui me disent les choses en face, qui me remettent dans le droit chemin. »
À l’heure du départ de Lukebakio pour Watford en janvier 2018, l’entraîneur de Charleroi, Felice Mazzù, était partagé quand il s’agissait de tirer le bilan du joueur avec les Carolos : « C’est un joueur prometteur, qui n’avait encore jamais connu l’enchaînement de matchs de haut niveau dans sa carrière il y a encore quelques mois, et qui a apporté ce qu’il devait… Après, pour moi, le départ de Dodi est un échec, car je n’ai pas réussi à en faire le joueur que je voulais, même s’il n’y a jamais rien eu de négatif entre lui et moi. D’ailleurs, quand il est venu vider son vestiaire, avant de partir, il est passé dans mon bureau et nous avons discuté cinq minutes. À la fin, quand il a quitté la pièce, il m’a demandé « coach, vous me faites un câlin ? » Cela veut tout dire. »
Dodi cool
Un ultime signe que la promesse prend peut-être enfin forme ? Les débuts de Dodi en Allemagne, où il tente d’aider le Fortuna, promu la saison dernière, à se maintenir en Buli. Rien d’impossible sur le papier, alors que le club rhénan pointe à seulement un point de Nuremberg, actuel 15e. Lukebakio, lui, vient d’enquiller déjà dix matchs dans l’élite allemande, alors que Friedhelm Funkel, le grand manitou de Düsseldorf, l’a aligné successivement sur un côté et en pointe, comme face au Bayern samedi dernier. Une rencontre où les démarrages de dragster du Belge ont mis au supplice l’axe central bavarois. « Il est tellement imprévisible grâce à sa vivacité et ses dribbles, savourait Funkel après la prestation de son poulain face au Bayern. C’est pourquoi nous lui laissons beaucoup de liberté devant… Dodi peut vraiment devenir un excellent joueur. » Ça tombe bien : à 21 ans, il n’est pas trop tard pour décider de grandir. Et peut-être encore croquer à l’avenir d’autres triplés, en Allemagne ou ailleurs.
Par Adrien Candau
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