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Mais qui es-tu, le stage d’entraîneurs UEFA ?
Parce qu’entraîneur est un métier presque comme un autre, faire des stages, c’est possible. Et c’est à Nyon que ça se passe, au siège de l’UEFA, avec au programme des conférences et des exercices pratiques. Bref, quasiment tout pour devenir le nouveau Pep Guardiola. Ou pas…
Engagé dans votre sixième heure consécutive sur Football Manager aux manettes du LOSC, que vous venez de qualifier pour la finale de la Ligue des champions après seulement trois saisons, vous vous dites, entre deux gorgées de Red Bull censées vous tenir éveillé, qu’être entraîneur pro vous aurait quand même sacrément botté ! Problème, demain, vous embauchez à 8h pour un boulot qui ne vous offre aucun espoir de toucher un jour le même salaire que José Mourinho. Et surtout, même si vous avez fait de Lucas Digne le meilleur latéral gauche d’Europe sur votre Mac, vous ne connaissez rien au vrai métier de coach. Un métier où il ne suffit pas de poser des cônes la semaine et d’enfiler un costard le week-end pour diriger votre équipe. Pour découvrir une partie des ficelles de la profession, c’est à Nyon que ça se passe.
Située dans le canton de Vaud, la ville suisse accueille quatre fois par an des entraîneurs venus des quatre coins de l’Europe pour participer à un programme de l’UEFA visant à partager, affiner et harmoniser les connaissances des techniciens du Vieux Continent. En octobre dernier, quatre pays ont envoyé leurs représentants : la Lettonie, la Lituanie, la Slovaquie et la Turquie. « L’UEFA a voulu mettre en place une reconnaissance mutuelle des diplômes (décernés par les fédérations nationales, ndlr), explique Jacques Crevoisier, instructeur lors de ces stages. Même s’il peut y avoir de grandes différences entre un Lituanien et un Espagnol, on essaye que tout le monde reparte en étant satisfait de ce séjour intense. »
Soirées Ligue des champions et Marco Materazzi
Le programme de ces trois jours de stage est immuable. Des conférences, déjà, de la part des instructeurs. Jacques Crevoisier, ancien adjoint de Gérard Houllier à Liverpool, s’installe par exemple trois fois derrière le micro pour des explications sur l’évolution du profil d’entraîneur dans les plus grands clubs, les relations avec les médias (conférence de presse, réseaux sociaux…) et la gestion de crise. L’aspect pratique n’est pas négligé non plus. Présents à Nyon à chaque fois durant une semaine de Ligue des champions, les « stagiaires » scrutent avec attention les matchs de C1. Car après, c’est l’heure de l’interro. Et le sujet est à chaque fois le même : « C’était le match aller, vous êtes l’entraîneur du Bayern ou d’Arsenal, préparez une séance et la tactique pour le match retour, avec une présentation en salle et sur le terrain. »
Et visiblement, les réponses différent fréquemment selon les pays. « Il est intéressant de comparer les analyses en fonction des cultures des différents pays. C’est instructif, si tant est qu’ils veulent bien dévoiler leurs secrets. Ça favorise les échanges et tout le monde y trouve son compte » , indique Jacques Crevoisier. Lors de la prochaine session prévue en avril, ce sont les Espagnols, Français, Hongrois et Italiens qui s’y colleront. Et la délégation transalpine comptera dans ses rangs huit champions du monde 2006, parmi eux Fabio Cannavaro et Marco Materazzi.
Crevoisier : « Il n’y a pas de profil d’entraîneur-modèle »
Si les instructeurs UEFA, dont fait aussi partie Howard Wilkinson, ancien sélectionneur anglais (1999-2000) et entraîneur de Leeds (1988-1996), sont là pour prodiguer leurs conseils et aiguiller les entraîneurs en formation, leur rôle n’est pas de prêcher une parole universelle. Sur les lèvres de bon nombre d’analystes et de donneurs de leçons du ballon rond, le modèle espagnol est placé au même niveau que les autres. « Il y a plusieurs voies pour arriver au succès, la mission de l’UEFA n’est pas d’en privilégier une, souligne l’ancien membre de la DTN française. Les gens doivent trouver leur propre philosophie. L’UEFA essaye d’aider la communication entre les gens pour que les modèles soient plus performants. Rassurez-vous, la domination de l’Espagne ne durera pas 100 ans ! Ça n’a duré 100 ans pour personne. »
Reste la question que tous les participants à ces stages se posent : comment devient-on un grand entraîneur aujourd’hui ? En étant un génie sur le plan tactique ? En prônant une discipline de fer ou au contraire en considérant ses joueurs comme ses propres enfants ? La grande UEFA elle-même, si elle donne des pistes, ne le sait pas. « Les compétences sont d’ordre technique et de management. Ce n’est pas que savoir entraîner un groupe. On demande toujours à un entraîneur à peu près la même chose : gagner des matchs et bien jouer.(…)Mais il n’y a pas de profil d’entraîneur-modèle, lance Crevoisier. On peut réussir par différents moyens, notamment au niveau fondamental de la relation avec les joueurs. Il y a des entraîneurs qui ont un relationnel très fort avec leurs joueurs et d’autres qui n’en ont pas ou qui s’en foutent. Capello ou Van Gaal n’ont jamais entretenu de relations privilégiées avec leurs joueurs. Les gens peuvent se situer avec ces deux échelles extrêmes. » Ensuite, la dure réalité du monde du travail fera le reste.
Par Alexandre Alain