- Les restes du monde
Mais qui es-tu la A-League australienne ?
Ce championnat du bout du monde qui a jadis accueilli Robbie Fowler, Mario Jardel, Dwight Yorke ou encore Romario démarre une nouvelle saison ce week-end, la 8e dans sa configuration actuelle. Avec cette fois en guest-stars Alessandro Del Piero et Emile Heskey. Les petits nouveaux vont pouvoir découvrir un football encore balbutiant, aux structures largement inspirées de la MLS nord-américaine. Découverte.
Sur Google, si vous tapez « football australien » , vous tomberez sur des articles, des images et des vidéos d’un sport bien bien chelou, bien bourrin aussi, également appelé « australian rules » et pas vraiment destiné à l’export. Rien à voir donc avec notre bon vieux football à nous, 11 contre 11, pas de mains sauf le gardien, tout ça, que les Australiens appellent le soccer. Comme en Amérique du Nord. Et comme en Amérique du Nord aussi, le soccer tient du sport mineur. Trois sports collectifs le dépassent en matière de popularité : le foot australien donc, dont le championnat professionnel réunit 36 000 spectateurs à chaque match en moyenne, le cricket (18 000 spectateurs), ainsi que le rugby, à XV comme à XIII.
La A-League de soccer peine, de son côté, à dépasser les 10 000 spectateurs de moyenne par rencontre. Créée en 2005, cette Ligue est née sur les cendres de la défunte National Soccer League (NSL), premier championnat local professionnel, créé en 1977. Elle fonctionne à la nord-américaine, avec un système de franchises, une saison régulière, des play-offs et pas de relégation. Une Ligue fermée donc, mais qui bouge quand même beaucoup du fait de la disparition et de la création de nouvelles franchises. En 2008, les New Zealand Knights, seul représentant en A-League du foot Néo-Z, se retirent faute de résultats sportifs et d’engouement populaire. Les Wellington Phoenix ont pris la suite. En 2011, c’était au tour des North Queensland Fury de jeter l’éponge, la faute à pas de thunes. Même sort cette année pour Gold Coast United, qui a subitement disparu corps et biens, remplacé numériquement par une toute nouvelle franchise, Western Sydney Wanderers.
Del Piero, Heskey, pas Ballack
Vous l’aurez compris, le soccer en Australie rame pour s’implanter, faute de racines solides. Des dix franchises engagées pour cette nouvelle saison 2012/2013 qui débute ce week-end, une seule a plus de vingt ans d’existence : Brisbane Roar. Et toutes doivent composer avec un cahier des charges particulièrement contraignant. Chaque franchise doit en effet avoir un effectif de 20 à 23 joueurs maximum, avec au moins trois jeunes nationaux de moins de 20 ans et pas plus de 5 joueurs étrangers. Les rémunérations sont également rigoureusement contrôlées, avec un système de « salary cap » . Chaque franchise a quand même droit exceptionnellement, si elle le souhaite et en a les moyens, de payer une star – un « marquee player » – en dehors de ce carcan. C’est ainsi que Dwight Yorke, Benito Carbone, Mario Jardel, Juninho Paulista, Romario ou Robbie Fowler ont disputé par le passé une saison ou seulement quelques matchs de A-League.
En cette nouvelle saison, deux recrues attirent la lumière : Alessandro Del Piero au Sydney FC et Emile Heskey aux Jets de Newcastle. Les Wanderers de Sydney ont bien tenté de faire signer Michael Ballack aussi, mais l’Allemand a préféré prendre sa retraite, et la nouvelle franchise a été contrainte de se rabattre sur un second choix : le Japonais Shinji Ono, ancien joueur de Feyenoord notamment. Mais disposer d’une star dans son effectif n’est pas forcément synonyme de réussite sportive. Pour Ange Postecoglou, l’entraîneur de Melbourne Victory et l’un des plus expérimentés de la Ligue, « aucune équipe ne semble en mesure de dominer le championnat, toutes peuvent prétendre à la victoire finale » . Cité par un journal local, il nomme tout de même un favori, et ce n’est ni la bande à Del Piero, ni celle à Heskey, mais Brisbane Roar, la solide franchise double-championne en titre.
Objectif conquérir… l’Asie
Alessandro Del Piero est loin d’avoir championnat gagné. À 37 ans, l’Italien doit relever plusieurs défis : montrer qu’il est physiquement toujours au niveau – techniquement ça ne devrait pas poser problème… –, réussir son intégration au sein d’un effectif où il pourrait faire des envieux – il émarge à 1,6 million d’euros par an, plus de la moitié du salary cap de toute la franchise – et séduire le public de Sydney, qui va donc avoir le choix cette saison, avec la participation des Sydney Wanderers en plus du Sydney FC. Ce dernier défi devrait être facilité par la présence sur place de nombreux Italiens d’origine.
Voici donc où en est la A-League australienne. Un championnat aux structures fragiles, mais qui ne demande qu’à grandir et qui essaie de le faire bien, dans les règles, sans brûler les étapes. Les jeunes espoirs locaux ont leur chance, les recrues venues d’Europe sont ajoutées avec parcimonie, les stades à disposition sont beaux et grands. Tout semble fait pour que le soccer à la mode australienne se développe. L’intégration récente de l’Australie à la zone Asie peut aussi lui permettre de sortir de son isolationnisme. Chaque saison, deux franchises australiennes peuvent ainsi participer à la Ligue des champions asiatique et se confronter aux meilleures équipes sud-coréennes, japonaises, chinoises et du Golfe. Dans le futur, l’objectif est donc de voir une équipe australienne devenir championne d’Asie. La mondialisation est en marche.
Par Régis Delanoë