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Mais qui es-tu, Gregory van der Wiel ?

Par Chérif Ghemmour
Mais qui es-tu, Gregory van der Wiel ?

Renouveau, renaissance, regain… On a tout dit du retour en grâce du Néerlandais, livreur de pizzas au caviar de Zlatan. Alors ? Métamorphose définitive d'un vrai gagneur qui se révèle enfin à 25 ans ou bien retour de flamme passager d'un gars très doué mais aux réelles motivations toujours un peu floues ?

À l’automne 2012, quelques semaines après son arrivée à Paris (pour 6 millions, bonus compris), des confrères journalistes m’avaient sollicité : « … Et Van der Wiel, ça va donner quoi au PSG ? » Ma réponse était invariable : « Jallet peut dormir tranquille pour une bonne partie de la saison. Van der Wiel ne sera pas à la hauteur. Et pour la saison prochaine, tout dépendra de lui, de ses motivations, de ce qu’il veut devenir » … « Mais c’est quand même le latéral droit des Oranje ! Il avait joué la finale de la Coupe du monde 2010, après un joli parcours de titulaire. Deux fois champion des Pays-Bas avec l’Ajax, en 2011 et 2012 ! » , me répliquait-on. Oui, mais… Plusieurs nuages gris escortaient la venue de Grégoire de la Roue (traduction littérale en néerlandais de son patronyme) dans le club du Moulin Rouge et du Sacré-Cœur. L’Euro 2010 ? Certes, il n’avait pas été bon. Le souvenir du Portugal-Pays-Bas (2-1) hantait encore Jean-Michel Larqué au soir du transfert de Greg à Paris. Il avait fulminé sur RMC : « De quoi ? Ils ont pris ce Van der Wiel ?… Et en plus ils ont payé ? Mais, enfin, je l’ai vu à l’Euro et il s’est fait tourner et retourner par les Portugais ! Mais c’est n’importe quoi ! » Pas faux, Jean-Mimi. Mais à l’Euro, tous les Oranje avaient été nullissimes, sauf Stekelenburg. Du coup, pas la peine d’enfoncer Grégoire, pas plus coupable que les autres. Reste que… Le fiasco hollandais avait aussi offert une évaluation plus juste du vrai niveau de Van der Wiel, à mon sens paradoxalement surcoté au Mondial 2010. On reviendra là-dessus. Mais d’autres considérations obscurcissaient à court terme l’avenir parisien du joueur…

Le choc de la L1

D’abord Gregory van der Wiel arrivait d’Eredivisie, un championnat gentillet, sans vice et sans méchanceté. Rien à voir avec la Ligue 1, peut-être le championnat le plus rugueux d’Europe… Surtout, Greg arrivait de l’Ajax. Un style magnifique mais qui prône l’évitement plutôt que les contacts et le combat. Et puis Van der Wiel jouait dans une équipe championne des Pays-Bas, drivée par Frank de Boer et assez largement au-dessus des autres. Un bloc placé haut, qui fait le jeu dans le camp adverse, qui sait faire tourner longuement et surtout qui menait vite au score, s’évitant par sa possession de trop courir et de craindre les contres. Du gâteau, quoi ! Car si l’Ajax imprimait des temps forts, elle ne connaissait pas, comme pour les autres grandes équipes d’Eredivisie, une intensité dingue et très physique pendant 90 minutes : tout le contraire de la Ligue 1, très moche mais très costaud (demandez à Pastore ou Falcao, découvrant chacun leur tour la rudesse de notre championnat…). Gregory jouait donc dans un système de jeu sécurisant où il passait plus de temps à monter devant, dans son couloir, qu’à défendre réellement.

Le choc « thermique » du championnat de France la saison passée où il avait été objectivement quelconque l’a donc refroidi, gelé, squeezé au point qu’Ancelotti l’avait souvent rangé au congélo (17 petites titularisations). Cela dit, Ancelotti n’était pas idiot. En le faisant signer à Paris, il spéculait sur les authentiques points forts du gars : une qualité de centre impeccable (bien dosés, précis, dans le bon tempo, là où il faut, comme il faut : demandez à Zlatan !), une belle pointe de vitesse, des prédispositions à savoir parfois éliminer par le dribble, grâce à sa ruse et une belle petite technique. Mais surtout, il avait un atout très rare, propre aux vrais grands latéraux : le timing parfait dans ses appels sur son côté, toujours disponible et en mouvement pour la réception du ballon « en bout de chaîne » . Un truc banal, en apparence, mais pas du tout : comme pour l’immense Willy Sagnol, savoir solliciter l’horizontalité/latéralité pour prendre ensuite la verticalité/profondeur dans son couloir dans le bon timing et sur le tempo du jeu qui se construit, c’est un truc inouï qu’on a ou qu’on n’a pas. Van der Wiel a ce truc. Enfin, toujours porté vers l’avant, il avait même développé un sens du but incroyable, lui qui avait même planté 6 buts en Eredivisie en 2009-2010.

Carlo signe un vrai doué, mais…

Tout pour l’attaque, donc ? Oui et non. Car si son repli défensif laissait à désirer et ses duels n’étaient pas toujours gagnés, il s’en sortait pas trop mal sur le strict point de vue défensif. Car Van der Wiel était et reste, pour l’instant, tributaire d’un système de jeu général où défendre est le boulot de tous et où la disposition collective de chacun lui permet de s’exprimer au mieux. Exemple avec l’équipe des Pays-Bas : merveilleuse de solidarité et d’abnégation, elle est parvenue en finale de Mondial 2010. Individualiste et paresseuse, elle a coulé à l’Euro 2012, où la ligne défensive a pris la vague sans protection, trahie d’abord par ses attaquants et « abandonnée » par un milieu dépassé. Idem avec le PSG à trous d’air, l’an passé : dégarni au milieu et pas stabilisé derrière, le secteur défensif a plombé un Van der Wiel souvent dépassé (tout comme Jallet). Tout le contraire de l’Ajax ou des Oranje bien organisés.

Car comme pour le Barça, c’est la possession de balle offensive, le pressing haut et les buts d’avance qui tiennent lieu de défense, épargnant aux défenseurs de trop subir les assauts adverses. Et c’est exactement dans ce schéma de jeu actuel du PSG que Van der Wiel s’épanouit aujourd’hui : l’équipe joue plus haut (et les attaquants défendent), elle assume une possession de balle optimum au milieu, marque vite et beaucoup. Dans ce collectif plus resserré, plus homogène et disposé en 4-3-3 (comme l’Ajax et le Barça, les modèles avoués de Lolo Blanc…), Van der Wiel est « protégé » par le bloc et il a en plus toute latitude pour attaquer, déborder, centrer. Qui plus est, on n’insiste pas assez sur une réussite tactique extra de Blanc, cette saison : l’apport considérable des latéraux. En Ligue des champions, la dimension parfois colossale de l’emprise parisienne sur le jeu tient beaucoup au boulot de Van der Wiel et Maxwell (du coup, lui aussi réhabilité ces temps-ci). Observez la ligne offensive du PSG : les deux latéraux sont toujours haut, quasiment à hauteur des attaquants, prêts à être sollicités alors que le porteur du ballon a déjà pas mal de solutions dans le cœur du jeu ou en profondeur ! Terrible…

Blanc et Cavani libèrent Gregory

Autre considération tactique favorable au Hollandais Volant et observable par tous, le 4-3-3 de Blanc, qui décale devant Cavani sur le côté droit. Du tout bon pour Wielly : « J’essaie toujours de trouver l’espace pour aller de l’avant, apporter mon soutien et Edinson est un joueur qui peut repiquer à l’intérieur et ainsi laisser des espaces pour moi » . L’an passé, Lavezzi, Lucas ou encore Ménez investissaient le couloir, ruinant en partie son apport offensif. Cette saison, par un coulissement au poil avec l’Uruguayen, Paris optimise le rayonnement à droite de deux joueurs clés du système Blanc. Van der Wiel joue carrément dans le même registre de « faux ailier » qu’un Alves au Barça, grande période Guardiola. Un Alves dont le nom a souvent été (et reste) évoqué au PSG… Citer Alves (ou un autre grand latéral droit pouvant débarquer au PSG) équivaut bien sûr à revenir sur la grosse déception suscitée par le semi-échec de Van der Wiel l’an passé et sur lequel il restait encore en début de saison actuelle (pas titulaire au Trophée des champions et lors des deux premiers matchs de championnat). Et c’est là que reviennent d’autres interrogations concernant la mentalité du gars…

Une fois de plus, il arrive de l’Ajax, un club qui cocoone beaucoup trop ses joueurs et dont le prestige international encore vivace leur laisse parfois croire qu’ils sont tous des demi-dieux admirés et craints par le reste du monde sitôt qu’ils enfilent la tunique mythique. Et si en plus, on est titulaire sans grande concurrence et qu’on gagne des titres sans trop forcer, on s’endort vite sur ses lauriers. Le départ à l’étranger sonne alors souvent comme un réveil brutal pour les petits princes d’Amsterdam. Et Van der Wiel n’a pas échappé à ce choc des mondes… Même s’il est « parti tard » en France (à 24 ans), le jeune homme a eu du mal à quitter Amsterdam, une ville qu’il adore et qui l’adore. Un caractère un peu fêtard, des soirées qu’il animait parfois en tant que D-jay, une marque de fringues perso qu’il avait lancée et un certaine nonchalance ont toujours contrebalancé son statut de jeune prodige du foot néerlandais. Un petit côté show-off qu’il trimballe aussi à Paris : l’an passé, remplaçant devenu invisible, il roulait quand même en Ford Camaro, un modèle de série limitée et ultra coûteux directement importé des USA… Au pays, le jeune abruti s’était fait piéger en balançant une photo de lui à un concert de Lil Wayne à Amsterdam… alors qu’il avait décliné la sélection au motif avancé à Bert Van Marwijck qu’il devait rester allongé pour soigner un mal de vertèbres ! À l’instar des supporters Oranje furax, le sélectionneur lui avait passé un savon mémorable…

Harry, l’ami qui vous veut du bien…

Comme beaucoup d’Ajacides partis à l’étranger, Van der Wiel marche donc à la confiance. Celle que lui a accordée grandement Lolo Blanc est une explication de son renouveau. Car à l’inverse d’Ancelotti, Blanc a établi une hiérarchie claire : Van der Wiel en 1 et Jallet en 2. Et il fallait ça… Car au cœur de l’hiver dernier, en février-mars, le moral était tombé bien bas. Il ne vivait plus à l’hôtel mais était largué côté langue (aux dernières nouvelles, il ne parle toujours pas français, communiquant en anglais avec son pote Ibra). Pour ceux qui connaissent un peu la télé hollandaise, la chaîne Veronica propose une émission foot hyper marrante, « Vivre comme un pro » , animée par le clown impayable Harry Vermeegen. Harry rend visite aux footeux hollandais au pays ou à l’étranger et au cours d’entretiens marrants ou de défis loufoques, il arrive à leur tirer les vers du nez. De passage à Paris en mars dernier, il avait trouvé un Gregory dans le doute, tout juste content de « découvrir Paris, belle et grande ville. De jouer avec Ibra, un mec sympa sur et hors du terrain et qui parle anglais… tout comme David Beckham qui venait d’arriver. » Fin psychologue, Harry avait demandé à la fin de l’entretien à un Greg touchant de timidité (il a toujours été peu expansif) : « Gregory, dis-moi : tu vas te faire une place de titulaire ici, à Paris ? » Et l’autre, dans un sourire timide, un peu gêné : « Oui, bien sûr… » Harry, à nouveau : « Gregory ! Je te regarde droit dans les yeux et je me dis : « Il est sincère ou pas ? » Tu vas te faire une place de titulaire ? » Et Greg, droit dans les yeux, beaucoup plus convaincu : « Si, Harry. Bien sûr que oui. Il faut que je m’entraîne bien et montrer à l’entraîneur qu’il doit me titulariser. » Bingo : « À la bonne heure ! Je te souhaite tout le succès ici ! Ici, tu vas réussir. »

On ne sait pas si le PSG et Van der Wiel doivent beaucoup à Harry Vermeegen mais son entrevue avait visé juste sur les motivations d’un joueur au tournant crucial de sa carrière. Car Greg était en nette perte de vitesse. En plus d’une saison fantomatique en France (la presse frenchy s’intéressant même plus à sa gonzesse, la délicieuse Maxine de Witt !), Louis van Gaal l’avait zappé dès sa prise de fonction avec la sélection, qu’il avait reprise après l’Euro catastrophique, au point que Wielly ait pu apparaître comme un bouc émissaire du fiasco, tricard à jamais chez les Oranje (malgré 35 sélections au compteur)… Comble de l’horreur, si Van Gaal avait fait le choix évident de l’excellent Janmaat à droite, l’autre arrière droit n’était autre que Ricardo van Rhijn, le nouveau jeune latéral droit de l’Ajax, au style de jeu semblable, autre métis, quasi jumeau de Gregory (père de Curaçao et mère hollandaise).

La bonne baffe d’Haarlem

Boudé par Carlo et oublié par Louis, cet été il y eut donc la tentation du départ et les approches de l’Inter que Greg n’a jamais niées : « L’intérêt de l’Inter était bien concret, mais j’ai finalement pris la décision de ne pas y aller. Si j’avais dû quitter le PSG après une saison, je l’aurais vécu comme un échec. J’ai voulu montrer que j’avais le niveau pour évoluer dans ce club, et je suis assez bon pour jouer au football ici. » Greg a enfin grandi dans sa tête. Pour de bon, à 25 ans ? Sans doute mais ça demande encore confirmation. Gregory doit passer d’autres caps pour devenir le très grand latéral droit international qu’on revoit en lui. Sa première saison difficile au PSG peut aider. Tout comme une autre expérience salutaire qu’il a connue, jeune gamin… En 2002, à 14 ans, il est viré du centre de formation de l’Ajax (où il est arrivé à l’âge de 8 ans) et cédé au HFC Haarlem à cause de « problèmes de mentalité » . Greg se prend dans la tronche le foot d’en bas, le vrai. C’est le choc : « Quand j’étais à l’Ajax, j’ai réalisé à quel point j’étais gâté. Là-bas, tout était toujours bien organisé. Nous avons reçu un nouveau kit à chaque saison et on était amenés au club avec des mini-vans. À Haarlem, je suis arrivé dans un monde totalement différent. L’hébergement était bien pire, nous avons joué dans des tenues qui dataient de cinq ans, et devions trouver notre propre chemin pour les formations. L’ambiance était mieux quand même, beaucoup plus détendue qu’à l’Ajax. La période à Haarlem était bonne pour mon développement social. C’était un électrochoc pour moi. »

C’est un Greg plus mûr qui retournera à l’Ajax Amsterdam en 2005. Après avoir passé deux ans dans les équipes de jeunes, il découvre le haut niveau le 11 mars 2007 lors d’une rencontre face au FC Twente en effectuant son premier match avec les pros. C’est Marco van Basten (qu’il loue toujours) qui le fixera en 2008-2009 au poste de latéral droit alors qu’il était parti pour jouer défenseur axial… Merci Marco ! Aujourd’hui, tout va bien pour Gregory mais il n’est pas arrivé, donc. Il faudra encore forcer sa nature ? Doit-il donc se faire violence ou bien suivre une pente naturelle de vrai compétiteur qu’il est réellement, en fait ? On verra bien… Tout (re)-commence. Titulaire à Paris, Van Gaal l’a donc rappelé en sélection. S’il n’a pu revenir chez les Oranje pour jouer la Hongrie et la Turquie le mois dernier, il devrait être bien là pour les matchs amicaux de novembre contre le Japon et la Colombie. Deux adversaires qui fleurent bon la Coupe du monde…

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