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Mais qui es-tu Arek Milik ?
Ce week-end, l'Ajax a cartonné Willem II. Sur les cinq buts plantés par le club d'Amsterdam, deux sont à mettre sur le compte d'Arek Milik. Un (presque) inconnu qui affiche des statistiques folles pour le moment : 16 buts en 15 matchs. Pas mal pour un remplaçant arrivé en prêt.
15 mai 2014. Sur le site de l’Ajax, Marc Overmars fait part de son enthousiasme : « Nous voulions signer un pivot en attaque pour la saison prochaine. Je pense que Milik remplit ce rôle à merveille. C’est un joueur qui, lorsqu’il a la balle, sait la garder en raison de ses qualités physiques. Il a également une bonne frappe et sait être dangereux au point de penalty. » Arkadiusz Milik pour l’état civil, simplifié en « Arek » Milik. Un beau bébé (1,86m pour 80 kilos) de seulement 20 ans, mais qui a déjà à son actif quatre clubs en plus de l’Ajax. Formé au Rozwój Katowice, l’attaquant est cantonné à l’équipe réserve où il marque quatre buts en dix matchs. Mis à l’essai par des écuries anglaises (Reading, Tottenham, notamment) en 2011, c’est finalement le Górnik Zabrze qui signe le joueur.
À seulement 17 ans, Arkadiusz se retrouve à animer le front de l’attaque torcida. Si sa première saison dans l’élite polonaise n’est pas un franc succès, l’exercice suivant le verra planter sept buts en quatorze matchs. Assez pour attirer les scouts du Bayer Leverkusen qui lui proposent à l’hiver 2012-13 un contrat jusqu’en 2018. L’été suivant, avec seulement six matchs de Bundesliga dans les jambes, Milik part s’aguerrir au FC Augsburg qui s’est maintenu in extremis. Miné par les blessures et le manque de réussite, le Polonais ne figure que cinq fois dans le onze titulaire bavarois, joue dix-huit matchs en tout et pour tout, et marque deux buts. Pourtant, ses coéquipiers ne tarissent pas d’éloges sur lui et lui prédisent un avenir à la Lewandowski ou Berbatov. Et si Milik s’approche du destin de son compatriote en équipe nationale (six buts pour quatorze sélections pour le moment), le Bayer ne porte pas le même crédit à Arkadiusz qu’à son illustre prédécesseur bulgare. Dès son retour de prêt d’Augsburg, il est renvoyé directement dans un autre club. L’Ajax Amsterdam, donc.
Un attaquant hors-format pour l’Ajax de De Boer
À sa signature pour le club d’Amsterdam, plus qu’un prénom incroyable, c’est surtout la position et les qualités d’attaquant d’Arkadiusz Milik qui intriguent les fans ajacides. Certes, l’exercice 2013-2014 d’Eredivisie ne s’est pas terminé de la meilleure des façons pour les artificiers de l’Ajax : dix buts ex-aequo pour Sigþorsson, Schöne et Klassen (un attaquant pour deux milieux), pendant que Finnbogasson en mettait 29 avec les nénuphars de Heerenveen. Mais l’Ajax avait fini champion avec un goal average de +41, synthétisant parfaitement l’idée de collectif chère à Frank de Boer. Comment un mec comme Milik, individualiste et censé peser lourdement sur les défenses, peut-il s’insérer dans un 4-3-3 tout en possession de balle et en passes ?
Inévitablement, la confiance est faite à Kolbeinn Sigþorsson à la pointe de l’attaque ajacide. Parce qu’il connaît mieux le système puisqu’au club depuis 2011, mais aussi parce que son altruisme dans le jeu n’est plus à démontrer. Sur les quinze matchs d’Eredivisie, Milik n’a pour l’instant participé qu’à neuf d’entre eux, jouant en moyenne 66 minutes. Surtout, l’attaquant aura dû attendre le 13 septembre et un match contre Heracles pour planter ses deux premiers buts avec le maillot de l’Ajax. Le premier quelques secondes après le coup d’envoi, le second juste avant le retour aux vestiaires. Un timing parfait pour niquer la tête des adversaires. Deux buts de pur attaquant où Milik fait montre de toutes ses qualités… et de ses défauts, pour l’Ajax : une mine en force après un gros coup d’épaule sur le défenseur parce qu’il venait de se faire manger en vitesse pure, puis une frappe – sublime – à l’entrée de la surface alors qu’El Ghazi lui demandait la balle dans la profondeur.
Arek « Jimmy deux fois » Milik
Évidemment, Milik n’est pas pour autant mis au placard. Mais Sigþorsson garde la préférence de son coach, et, le 27 septembre, l’Islandais le récompense en claquant un triplé face à NAC Breda. Milik s’en fout, il prend son mal en patience et s’éclate en Coupe des Pays-Bas. Il en passe six lors du carton 9-0 face au JOS Watergraafsmeer, puis signe un doublé face à Urk au tour suivant. Toujours bon pour la confiance. En Eredivisie, la pointe polonaise devra néanmoins attendre le 25 octobre pour marquer à nouveau. Comme par trop de retenue, le grand timide qu’il est lâche la bride une bonne fois pour toutes : à l’exception de son match contre ADO La Haye, Milik marque à tous les matchs. Qu’il soit titulaire ou remplaçant, peu importe. Mieux, il enchaîne les doublés. Face à Cambuur, d’abord, Willem II ensuite. Il est vrai que la forme retrouvée depuis un mois et demi par l’Ajax constitue sans doute une des raisons de la réussite d’Arkadiusz.
Mais force est de constater que l’équipe amstellodamoise a trouvé ce qui lui manquait depuis un certain temps : un vrai buteur, racé, capable de tuer un match à lui seul lorsque la machine bien huilée finit par dérailler. S’il poursuit sur cette lancée, le Bayer Leverkusen, qui a assorti son prêt d’une option d’achat de 2,5 millions d’euros, pourrait s’en mordre les doigts. Reste à savoir si le jeu de Milik ne deviendra pas, à terme, le saboteur de la locomotive Ajax qui a pour habitude de finir ses saisons en mode TGV. Dans tous les cas, au sortir de son match contre Willem II, Milik a annoncé la couleur au quotidien Algemeen Dagelblad : « Il est important pour un buteur de marquer, même si je réalise qu’à l’Ajax, tout le monde peut marquer. Mon but n’est toujours pas atteint parce que je ne suis pas le choix numéro un. » La dernière fois qu’un joueur était parvenu à ménager ses ambitions de buteur et celles du club ajacide, c’était lors de la saison 2009-10. L’Ajax avait terminé second d’Eredivisie, mais avec un total de 106 buts marqués. Dont 35 pour un certain Luis Suárez.
Par Matthieu Rostac, à Amsterdam