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Mais qu’est-ce que c’est au juste, le futnet ?
Imaginez un sport qui ressemble à la fois au football et au volley-ball et qui peut se jouer sur un terrain de tennis. Cette discipline existe et elle s’appelle le futnet. Spectaculaire, technique, mais surtout ludique, ce tennis-ballon amélioré commence à faire son trou en France. Avant le coup d’envoi du Mondial à Budapest ce jeudi, on est allé voir à quoi ça ressemble.
Après la fin d’un entraînement de basket, il n’y a pas une minute à perdre au gymnase municipal Jacques-Anquetil d’Émerainville. Plusieurs sportifs s’affairent à mettre en place des petits poteaux aux quatre coins du parquet et à installer de longs filets, semblables à ceux utilisés pour le volley-ball. Mais ce soir, c’est futnet ! Pas de panique, si vous ne voyez pas ce que c’est, on va tout vous expliquer.
Les règles sont plutôt simples : deux équipes d’une à trois personnes s’affrontent en un set gagnant, la première équipe à 15 points remporte le match. Le tout se joue sur un terrain de 9 mètres de large sur 12,80 mètres de long séparé d’un filet pour le simple et 18 mètres de long pour le double et le triple. Les participants peuvent toucher le ballon avec toutes les parties du corps, à l’exception des bras et des mains, ont trois touches par équipe (deux en simple) avant de le renvoyer en face et, pour gagner un point, il faut que la balle ne puisse être rejouée par l’adversaire ou qu’il y ait plus de deux rebonds consécutifs chez l’adversaire. Mélange entre le football et le volley-ball, ce sport, plus communément appelé le tennis-ballon, est apparu en Tchéquie avant la Seconde Guerre mondiale. Importée en France par l’entraîneur Albert Batteux, tombé sous le charme lors d’un voyage à Prague dans les années 1990, cette discipline est rapidement adoptée par les footeux aux entraînements. Exercice technique idéal pour le décrassage du lundi, le futnet, le vrai (le codifié), ne se joue dans l’Hexagone qu’à partir de 1997, mais ce n’est qu’en 2022 que ce sport intègre la FFF et commence réellement à prendre de l’ampleur.
Spectaculaire, ludique, mixte : que demande le peuple ?
Champion du monde de double en titre et capitaine de l’équipe de France, Vincent Voisinot a l’habitude que l’on fronce les sourcils quand il parle de sa pratique : « Souvent, on me dit que c’est bizarre, ce sport. Puis, quand les gens le voient en vrai, ils trouvent ça spectaculaire. Et au moment d’essayer, c’est : “Ah mais c’est difficile.” » Attention, le joueur d’Émerainville Futnet Club tient tout de suite à rassurer : « C’est une pratique qui peut plaire à beaucoup de monde parce qu’elle est ludique. Il n’y a pas de contact, ce qui permet d’attirer autant les garçons que les filles, et surtout, ça ouvre la possibilité d’avoir plusieurs générations qui jouent ensemble. Par exemple, ici on a des ados qui évoluent avec des cinquantenaires, c’est génial ! » Kahina Nesraki, inscrite seulement depuis septembre, s’est vite prise au jeu : « À la base, je faisais du Teqball. On avait été invité à faire une représentation pour les Jeux olympiques 2024, et en même temps, il y avait du futnet. J’ai tenté et j’ai tout de suite été comblée. Il y a un espace plus grand, et vu que j’ai des capacités techniques et physiques, je me suis dit que ça pouvait coller. Puis la mixité et le fait que ce soit un sport intergénérationnel, ça motive. »
Thomas Gómez-Barranco, lui, a été motivé par un tout autre motif : « J’ai voulu m’éloigner du foot, notamment à cause de l’ambiance qu’il y a autour des terrains, que ce soit les parents, les joueurs… Je n’ai plus envie de me prendre la tête. Au futnet, j’ai retrouvé cet esprit familial, bon enfant que j’avais perdu au football. » Le cas de l’entraîneur régional de l’Émerainville Futnet Club n’est pas isolé. Chaque année, plusieurs milliers de licenciés arrêtent le football à 11. Si la passerelle avec le futnet n’est pas encore naturelle, la discipline peut être un bon moyen de continuer de faire du sport pour les footeux et footeuses qui raccrochent les crampons, sans avoir à se mettre comme tout le monde au padel. « Pour des gens qui viennent du football, qui savent faire un contrôle et une passe, on maîtrise assez facilement les bases, décrypte Thomas Gómez-Barranco. Après, quand on veut aller à un niveau plus élevé, il faut beaucoup plus de souplesse et de maîtrise technique. Ce sont des gestes particuliers avec le service, la réception, la passe et l’attaque. »
Si ce cousin du football peut paraître facile de prime abord, l’ancienne internationale française Julie Soyer, venue pour découvrir la discipline, ne s’attendait pas à ça : « Il y a des mouvements spécifiques qui sont différents des bases que l’on apprend au foot en matière de rebond et de déplacements. Au football, on a tendance à faire des petits tennis-ballons, mais là, c’est plus poussé. » Pour l’ancienne joueuse du Paris-FC, la proposition qu’offre le futnet est séduisante : « Les anciens pros ont tendance à aller plus vers d’autres sports comme le padel, le tennis, le golf ou encore le foot-golf. Ça fait une autre discipline tournée vers le foot, mais avec ses différences aussi, donc c’est cool. Après, il faut encore avoir des jambes, ça bouge pas mal. (Rires.) C’est des petites reprises d’appuis, des changements de direction, c’est ludique. On touche souvent la balle. »
Essor, ambitions et Coupe du monde
Mis sous perfusion par la FFF, le futnet balbutie encore en France. À ce jour, la pratique ne compte qu’une quarantaine de clubs pour moins de 1 000 adhérents. Grâce à la fédération, ce sport a gagné en légitimité, en structuration, et espère devenir plus populaire : « On n’est pas le premier développement de la FFF, devant nous, il y a le football féminin et le futsal, mais on suit les traces de ces exemples-là, et le but, c’est de s’accroître rapidement », pose Jean Deloffre, président de la Commission fédérale de futnet. « Le nombre de clubs, c’est le plus gros frein, pointe Vincent Voisinot, lors de sa pause fraîcheur entre deux matchs de double. Tout va s’accélérer lorsqu’il y aura un nombre de pratiquants suffisant pour créer une élite pérenne et qu’il y ait de la concurrence. Aujourd’hui, l’équipe de France est expérimentée, pour ne pas dire vieille, la moyenne d’âge est vers les 35 ans. C’est assez âgé, même si nous sommes spécifiques et que c’est un sport d’expérience. » L’objectif est que la pratique ne soit plus perçue comme un jeu, mais comme un sport à part entière.
Pour ça, la compétition de haut niveau est le nerf de la guerre. Aujourd’hui, 11 équipes issues de 6 ligues régionales font partie de la première division. Mais cette dernière ne compte que 10 journées de championnat aller-retour, soit une rencontre par mois. Pour autant, ce maigre calendrier ne rebute pas les pratiquants, qui viennent parfois avec un objectif bien précis en tête : « Avant, je faisais du foot et du futnet, que je prenais comme un sport de complément, mais j’ai vite vu que j’avais un potentiel, lâche Thomas Gomes-Francisco, après avoir claqué une belle reprise de volée pour marquer un point. Je savais que dans le foot, je n’allais pas percer, ça m’a aidé à faire mon choix. Aujourd’hui, je suis en équipe de France U21 et on vise les Mondiaux l’année prochaine. Puis, on est à l’intérieur, donc l’hiver, c’est plus sympa. (Rires.) » Et il n’est pas le seul : « Je pars dans l’optique de progresser, assure Kahina Nesraki. Je sais que c’est une discipline qui grandit de plus en plus, donc je saisis l’opportunité. Il n’y a pas trop de licenciés en féminine, donc il y a moyen de percer. »
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Les deux jeunes marchent dans les pas des deux champions du monde de double présents lors de la séance. Aux côtés de Vincent Voisinot, Jérémy Caramelle, élu meilleur joueur 2022 à la suite de leur sacre en double à Prague avec William Rambaud, effectue sa dernière séance avant de s’envoler pour les Mondiaux qui se dérouleront du 7 au 10 novembre à Budapest (Hongrie). Serein, le joueur d’Issy-les-Moulineaux sait qu’ils sont attendus : « Le fait qu’on soit rattaché à la FFF, on a des devoirs de résultats que l’on n’avait pas forcément avant. On sent qu’il y a une vraie aide, qu’il se passe quelque chose autour de notre discipline, donc c’est notre devoir d’être prêt le jour J. On a gagné le titre la dernière fois, on ne peut pas faire mieux, mais on a envie de le refaire. » Rien de tel qu’un nouveau sacre tricolore pour motiver les curieux à pousser la porte des gymnases.
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Photos : Bruno Anquetil / FFF