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Mais pourquoi diable Michel Seydoux veut vendre le LOSC ?
C’est un serpent de mer depuis fin 2012, depuis que Michel Seydoux a pour la première fois évoqué l’idée de passer la main à la tête du LOSC. Dernièrement, c’est la piste menant à un milliardaire chinois qui a été évoquée dans les médias. Président du club depuis 2002, actionnaire majoritaire depuis 2004, Seydoux a d’abord redonné des couleurs au club, avant de le faire triompher, avec en point d’orgue un doublé Coupe de France - Championnat en 2011. Alors que le club est redevenu une place forte du football français, une question se pose : pourquoi Seydoux cherche-t-il à tout prix à se désengager aujourd’hui ?
La valeur du club est au plus haut
Sportivement déjà, le club dépasse les attentes cette saison. Solidement installé à la troisième place du classement, qualificative pour la Ligue des champions, le LOSC compte six points d’avance sur son premier poursuivant, Saint-Étienne, et devance assez largement ses concurrents attitrés pour la course à la compétition reine, l’Olympique de Marseille et L’OL. Ensuite, l’une des grandes réussites de Seydoux a été de savoir conjuguer parfaitement politiques sportive et économique. Inauguré en septembre 2007, le domaine de Luchin en est l’illustration même. Propriété du club, ce centre d’entraînement aux installations ultramodernes, souvent décrit comme le meilleur de France, a permis au LOSC de se spécialiser dans la formation et la post-formation de jeunes espoirs, à fort potentiel de revente. Si l’exemple Eden Hazard est de loin le plus parlant, n’oublions pas les ventes de Rami, Cabaye, Debuchy ou dernièrement Digne, qui permettent aux Dogues de réaliser ainsi de larges bénéfices. Avec une équipe en forme, un club aux finances structurées et une direction réalisant ponctuellement de gros bénéfices sur des joueurs formés au club, le LOSC aujourd’hui a tout pour plaire à d’éventuels investisseurs étrangers.
Le Grand Stade est payé
Contrairement à l’Olympique lyonnais, qui vient d’engager les travaux de son Stade des Lumières, le LOSC, tout comme l’OGC Nice, a déjà opéré sa mue en inaugurant le Grand Stade, au début de la saison 2012-2013. Le club nordiste est donc passé d’une enceinte vétuste de 16.300 places à une enceinte ultramoderne de 50 000 places, lui permettant, selon les estimations de Marig Doucy, auteur du Grand Stade de Lille : L’Enquête, de multiplier ses recettes par quatre ou cinq. Surtout, le stade est issu d’un partenariat public-privé signé entre la communauté urbaine de Lille et le groupe de construction Eiffage. Le LOSC, toujours d’après Doucy, verse chaque année à Eiffage une redevance fixe d’un million d’euros et un pourcentage sur les recettes de billetterie de 20%, en contrepartie de la « pleine jouissance des lieux pendant les rencontres à domicile » , recettes publicitaires incluses. Une véritable aubaine pour le LOSC, et pour Seydoux, qui bénéficie là d’un argument de vente imparable.
La seule solution pour continuer à croître
Parti de rien, le club étant au plus mal lors de son arrivée au LOSC, Michel Seydoux a, selon ses propres mots dans L’Express, « réussi en dix ans ce que l’OL a fait en vingt ans » , à savoir moderniser le club à tous les étages et entrer de plain-pied dans le football moderne. Réussissant à faire passer le budget du club de 20 millions d’euros pour la saison 2002-2003 à 100 millions d’euros pour la saison 2012-2013, Seydoux a profondément bouleversé un club habitué à faire l’ascenseur entre la première et la deuxième divisions, en lui permettant de jouer la course à l’Europe chaque saison.
Seulement, depuis l’arrivée de QSI et de Dmitri Rybolovlev, le PSG et l’AS Monaco sont appelés à monopoliser les deux premières places du classement. L’arrivée de riches investisseurs étrangers dans le football français menace clairement les ambitions expansionnistes du club nordiste, puisque pour la première fois, la concurrence est réellement hors de portée aussi bien financièrement que sportivement. Pour continuer sa mue, et ne pas à avoir à s’engager dans un match à trois, avec l’OL et l’OM, pour la dernière place en Ligue des champions, Seydoux souhaite que le LOSC puisse s’aligner sur les finances mirobolantes de ses concurrents. Une seule solution, trouver un investisseur puissant, prêt à faire fructifier le travail déjà accompli dans la capitale des Flandres. Seydoux de résumer ainsi, dans un entretien donné dans le So Foot numéro 111, « on a envie de laisser une situation meilleure que le jour où on est arrivés. C’est comme quand on sort des toilettes : « Prière de laisser cet endroit plus propre que quand vous êtes entré. » »
Une Ligue 1 redevenue attirante
Si la taxe à 75% peut en refroidir certains, la Ligue 1 est devenue un terrain de chasse prisé des grandes fortunes cherchant à s’offrir un club. Forte d’une médiatisation accrue depuis la double prise de pouvoir de QSI et de Ryblovlev, la Ligue 1 présente, en effet un avantage non négligeable sur les autres championnats majeurs en Europe. Elle offre une passerelle rapidement accessible à la Ligue des champions, ultime vitrine publicitaire pour un club de football. En Angleterre ? La voie est bouchée par le Big Five, et la route vers la Champions nécessite de lourds investissements, sur plusieurs années, à l’instar de ce qu’a réalisé le Cheikh Mansour à Manchester City. La donne est la même en Allemagne, où le Bayern obstrue année après année le chemin vers le titre national. Plus au sud, le climat économique en Espagne et en Italie n’incite pas à la confiance des investisseurs. Dans ce contexte, investir en France semble le compromis parfait. La mise de base n’est pas, au regard des fortunes des potentiels candidats, énorme, et le bénéfice peut être immédiat, l’illustration parfaite étant l’AS Monaco, promu et déjà solidement ancré à la deuxième place du classement.
par Paul Piquard