- Mondial 2018
- Qualifs
- France-Biélorussie (2-1)
Mais lâchez-vous, faites-vous plaisir !
La France ira à la Coupe du monde 2018. Mais s'il faut se réjouir de la qualification, le parcours laborieux des Bleus peut susciter quelques inquiétudes. Car cette génération exceptionnelle joue pour le moment avec le frein à main, et il serait de bon ton que cela cesse d'ici juin prochain.
Benzema blacklisté, Fekir à la maison, Dembélé blessé, Mbappé pas totalement rodé ou encore Martial qui se retape tranquillement à Manchester… Quand on regarde la liste des absents au coup d’envoi ce mardi soir au Stade de France, on a de quoi se dire que le potentiel offensif des Bleus, c’est une dissuasion nucléaire adaptée au football. Entre Griezmann qui fait partie du top mondial, Giroud dont la foi le fera prochainement dépasser Fontaine et Papin au classement des buteurs en Bleu, ou encore Thomas Lemar qui pue le football, l’équipe de France dispose de tout l’arsenal nécessaire pour dynamiter n’importe quelle défense. Les Pays-Bas l’ont senti passer en septembre et, logiquement, beaucoup d’autres nations pourraient l’expérimenter d’ici fin juin 2018. Quoique, malgré toutes ses armes, sa profusion de talents offensifs et ses joueurs stars à quasiment tous les postes, le groupe de Didier Deschamps a su se casser les dents contre la Biélorussie – en début de campagne – ou le Luxembourg, il y a quelques semaines. Respectivement, les 77e et 101e sélections au classement FIFA. Sans oublier ces deux derniers matchs indignes de leur talent.
Oublier le Deschamps joueur ?
Ce mardi soir au Stade de France, dans un contexte favorable, les hommes de Didier Deschamps ont d’ailleurs failli se faire de nouveau piéger contre les Biélorusses alors qu’ils menaient tranquillement 2-0 et que le public en confiance lançait une ola… La réaction des Bleus ? Assurer le coup, jouer crispé, et sécuriser le 2-1 et la qualification. Quand le rapport de force intrinsèque aurait justifié une réaction d’orgueil pour une victoire quatre ou cinq buts à un. Easy. Trop en demander aux joueurs français ? Dans sa culture très personnelle de la gagne, Didier Deschamps a toujours privilégié le résultat à la manière. Avec une réussite insolente comme joueur, son talent personnel justifiant moins son immense palmarès qu’un mental en acier trempé et une humilité qui le poussait à travailler pour le bien de son équipe, c’est-à-dire mettre dans les conditions idoines les joueurs plus talentueux. Sauf que désormais, DD est sélectionneur et dispose de quelques-uns des joueurs les plus talentueux de leur génération, la plupart à des postes offensifs. Lui, le technicien pragmatique et rigoureux, a le matos pour mettre en place une artillerie référence dans le jeu offensif. Qu’en feraient Jürgen Klopp, Joächim Löw ou Pep Guardiola ? Probablement des machines à détruire l’adversaire, à attaquer sans relâche, quitte à consentir des déséquilibres évidents comme l’Allemagne de Löw à l’Euro 2016. Après une campagne d’éliminatoires qui se termine bien à défaut d’avoir été brillante, on peut se dire que la Dèche a encore une fois eu raison, car seul le résultat compte, dit-on.
Espagne, Allemagne, les meilleurs attaquent
Mais à y regarder de plus près, avec un peu plus d’ambition dans le jeu, de prises de risques dans le choix des hommes, le sélectionneur aurait sûrement obtenu le Graal plus tôt, avec un peu plus de sérénité comme l’ont fait les plus offensives Mannschaft et Roja. Car que ce soit en Suède – avec Sissoko plutôt que Dembélé – ou contre le Luxembourg – avec Mbappé en milieu droit –, l’équipe de France s’est mise en danger toute seule quand elle décidait de jouer petit bras, soit avec un élément censé assurer l’équilibre, soit avec une rotation d’effectif restreinte pour assurer la continuité. Cette équipe de France peut gagner la Coupe du monde. C’est tout naturel de le penser, encore plus de l’espérer malgré la présence de plusieurs sélections probablement plus en mesure d’aller au bout. Les Bleus doivent-ils forcément être pragmatiques ou sur la défensive pour arriver à leurs fins ? Il serait temps de comprendre que France 2018 n’a rien à voir avec France 1998 : pas les mêmes joueurs, pas la même histoire, pas la même époque, pas le même football. La génération d’aujourd’hui est jeune, avec un talent excessivement présent devant, beaucoup moins derrière. Aller au Mondial en voulant être solide ne vaudra sûrement pas autant qu’y aller en ayant l’envie de bouger tout le monde, de jouer sur nos qualités, prendre du plaisir et n’avoir aucun regret. Ensuite seulement, nous pourrons faire la fête en écoutant de la mauvaise musique russe.
Par Nicolas Jucha