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Mais comment fais-tu, Cadix ?
Promu cette saison, le FC Cadix est en train de déjouer les pronostics dans cette Liga 2020-2021 partie sur un rythme saccadé. Cinquièmes au classement, les Gaditanos surfent sur une vague positive et se déplacent sur la pelouse de l’Atlético de Madrid sans aucun complexe lié au voyage. Mais comment font-ils ?
C’est long, quatorze ans. Entre 2006 et 2020, le FC Cadix est passé par tous les étages comme peut le faire un ascenseur ou un FC Metz : une descente en deuxième division d’abord, puis une nouvelle descente en Segunda B en 2008 avant de remonter l’année suivante, puis replonger en 2010. En 2016, sous l’impulsion d’Álvaro Cervera, le club remonte en D2 dès la première année de l’actuel entraîneur aux commandes du bateau jaune et bleu. 2020, une année à oublier pour tout le monde ? Pas pour Cadix qui voit son équipe terminer au deuxième rang du championnat et accéder à la Liga. La période loin de l’élite fut longue pour le club, mais le passé récent semble désormais servir à l’équipe pour s’inviter dans le haut du tableau : avec quatre victoires, deux nuls et deux défaites en huit journées, Cadix squatte la cinquième place du classement. Comment cela est-il devenu possible ?
Pragmatisme et carton plein à l’extérieur
Déjà, une première indication est visible au moment de se pencher sur les différentes rencontres du promu. Sur ses quatre déplacements, Cadix s’est imposé quatre fois. Mieux encore, puisque les Andalous n’ont pas concédé un seul but à l’extérieur : 2-0 à Huesca, 1-0 à Bilbao, 1-0 face au Real Madrid et 2-0 à Eibar. « Savoir pourquoi nous gagnons à l’extérieur, c’est difficile à analyser, témoigne Yann Bodiger, milieu de terrain en poste au FC Cadix depuis la saison dernière. En revanche, nous gagnons des matchs parce que nous avons une idée de jeu et une identité propre à notre groupe. De nombreux facteurs entrent en jeu, mais dans l’ensemble, cela nous sourit. À Eibar, on marque sur nos deux tirs cadrés du match (quatre en réalité, N.D.L.R). À ce niveau, la réussite tient à peu de choses. Mais si nous perdons notre prochain match, nous ne changerons pas pour autant notre manière de faire. »
Le prochain match justement, ce sera face au Wanda Metropolitano contre l’Atlético de Madrid. Et à entendre Bodiger, il apparaît clair que malgré la supposée supériorité des Colchoneros, les deux équipes possèdent une vision commune : « Quand je suis arrivé l’an passé, Cadix avait déjà des ambitions importantes en D2, souligne l’ancien Toulousain. Notre plaisir était dans la victoire grâce à notre faculté de combat et de solidité collective, que ce soit l’an passé ou maintenant. La seule chose qui change, c’est le prestige de nos adversaires comme lors de notre victoire face au Real. Dans ce match-là, notre possession de balle est de 27%… Grâce à ce bloc bien compact, on parvient à prendre des points et cela nous donne confiance. Maintenant, le coach nous a déjà prévenus : si à un moment nous traversons une phase où nous ne gagnons plus, cela va devenir plus difficile de garder cette mentalité. À ce moment-là, notre plaisir du sacrifice et d’être ensemble doit prendre le dessus. »
L’hommage à Cifuentes
À Madrid, Cadix a déjà pris trois précieux points pour la suite de la saison. Toutefois, ce succès sur la pelouse du champion d’Espagne en titre comporte aussi un inconvénient : le promu ne peut plus vivre dans l’ombre. « Nous allons là-bas pour défendre nos couleurs comme d’habitude, mais nous sommes aussi conscients que plus le temps va passer, plus nos adversaires vont nous connaître de mieux en mieux et nous prendre en considération, poursuit Bodiger. Après huit journées, tu peux arriver à cerner la manière dont nous pratiquons notre football. » Symbole de la réussite actuelle des Astilleros qui évoluent en 4-4-2 ou 4-4-1-1, l’avant-centre Álvaro Negredo prouve qu’il en garde encore sous la semelle malgré ses 35 ans. « Quand il a signé ici, on savait tous qui c’était, affirme Bodiger. Nous ne sommes pas une équipe qui se procure énormément d’occasion, il faut qu’on aille créer du danger et c’est difficile en Liga. Álvaro, c’est le joueur qui parvient à être efficace dans ce qu’il fait. Contre Eibar, il est décisif sur nos deux buts… Quand il se place sur le terrain, tu le vois prendre l’axe et servir de point de fixation quand l’équipe travaille bien défensivement. Tu sens vraiment qu’il est intelligent, chacun de ses déplacements est calculé pour aider l’équipe. »
Malgré ses difficultés à prendre des points à domicile (seulement deux sur douze possibles), Cadix ne souhaite pas se cacher derrière l’excuse de l’absence d’un public aimant, une « explication seulement partielle ». En revanche, une partie de cette réussite est certainement due au récent traitement du club reçu par Alberto Cifuentes, gardien de but de Cadix jusqu’au 6 octobre dernier. « Alberto, c’était un vrai capitaine, assure Bodiger. C’est un gars qui prend du temps pour écouter le vestiaire et servir d’intermédiaire avec le coach. Il est passé par la troisième division avec le club, et cette année il a fait le premier match de sa carrière en Liga contre Huesca. Après, il s’est mis d’accord avec les dirigeants pour laisser la place à son successeur (Jeremías Ledesma, N.D.L.R) et être placé dans l’organigramme du club pour servir de lien entre le vestiaire et l’extérieur. Aujourd’hui, il ne s’entraîne plus, sa carrière professionnelle est terminée. Mais le fait de l’avoir laissé jouer deux matchs de Liga pour les deux dernières rencontres de sa carrière, c’est significatif des valeurs qui circulent à Cadix : je vois un club animé par la passion, reconnaissant envers ses joueurs emblématiques. À titre personnel, j’ai trouvé cela beau et fort émotionnellement. » Ce n’est pas Cadix qui prend l’amer, c’est Cadix qui prend l’homme.
Découvrez le reportage sur Cadix dans le magazine numéro 181 de SO FOOT actuellement en kiosques.Par Antoine Donnarieix
Propos de YB recueillis par AD