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Mais bon sang, qu’est-ce qui cloche au PSG ?
Même sans Zlatan Ibrahimović, le PSG a, sur le papier, le plus bel effectif de France. Et donc le plus à même d’écraser la concurrence en Ligue 1. Pourtant, les quadruples champions en titre balbutient leur football et leurs certitudes sur la scène nationale. Pourquoi ?
Un mercato bancal
C’était le point sur lequel le PSG était le plus attendu. À partir du moment où, courant automne 2015, la direction parisienne avait pris la décision de ne pas prolonger Zlatan Ibrahimović, il restait quasiment dix mois aux décideurs franciliens pour lui trouver un remplaçant. Une star, en gros. Paris a tenté Neymar à fond, un peu Griezmann et Aubameyang, très peu Pogba, tourné autour de James Rodríguez et Anthony Martial pour, finalement, ne prendre personne. Conclusion, le PSG a recruté Hatem Ben Arfa libre, mis 30 plaques sur Krychowiak, 25 sur Jesé, moins de 8 sur Meunier et rapatrié Areola de prêt. Des cinq joueurs, un seul est titulaire : Alphonse Areola, le seul qui n’a pas coûté un rond. Ben Arfa est encore à la cave, Jesé a déjà perdu son appendicite, Meunier assure en zone mixte et Krychowiak cherche son football.
C’est peu pour un club qui ambitionne de briller en Ligue des champions. Surtout, c’est le mercato QSI le moins ambitieux et le seul sans tête de gondole sportive. Alors oui, certains avancent que la vraie recrue s’appelle Unai Emery. Ça se tient. Le Basque a gagné trois Coupes d’Europe en trois ans là où le football français n’en compte que deux en soixante-dix piges. Mais voilà, visiblement, la C3 n’est pas un titre qui inspire le respect dans l’Hexagone. Même l’arrivée de l’ancien de Séville à la place de Laurent Blanc est, parfois, perçue comme une moins-value. Par les mêmes qui voulaient décapiter Blanc après le 3-5-2 de City. Paris rêvait de Simeone, Guardiola ou Mourinho. Il a eu l’ancien coach d’Adil Rami à la place. Bizarrement, en remplaçant Van der Wiel et Stambouli sur le banc par Krychowiak, Meunier, Jesé ou Ben Arfa, le PSG s’est renforcé qualitativement sur les remplaçants. Mais aucune nouveauté dans le onze de départ. Sauf la perte d’un grand type qui facturait 50 buts l’an dernier. Des broutilles, quoi.
Un trône vacant
C’est simple, la seule présence d’Ibra faisait peur à n’importe quelle défense de Ligue 1. Aujourd’hui, c’est un fait, Paris ne fait plus peur. Tout le monde s’imagine taper facilement ce PSG-là. Le Suédois ne débloquait pas seulement les matchs en Ligue 1, il galvanisait ses troupes. Aujourd’hui, le trône du géant est libre… et personne ne semble en vouloir. L’an dernier, quand l’équipe toussait, on tapait sur Ibrahimović et c’était pratique. Il servait de parapluie. Mais voilà, le Z n’est plus là et il faut encaisser les coups. Dimanche, après le triste 0-0 contre l’OM, Di María et Verratti ont été bousculés par la presse. Ils n’étaient pas habitués à ce genre de tacles.
Parce que maintenant, il faut s’émanciper, prendre le relais du Suédois et assumer rôle, salaire et statut. Pour le moment, ils sont peu à prendre en main cette équipe. Pour ne pas dire personne. Qui est le taulier, d’ailleurs ? Thiago Silva ? Thiago Motta ? Javier Pastore ? Pour l’instant, dans les gros matchs, le PSG 2K17 a surtout manqué de caractère, et de révolte, à tel point que c’est souvent Adrien Rabiot, un produit local, qui semble être le taulier par défaut.
Un entourage trop bavard
C’est une composante du football moderne, il faut composer avec « l’entourage » des joueurs. Un entourage souvent trop bavard au PSG en ce moment… Thiago Silva s’en est d’ailleurs ému : « C’est important de parler, mais ce qu’on dit dans le vestiaire, doit rester dans le vestiaire. C’est incroyable que ça sorte dans la presse. Peut-être que c’est un joueur qui vous parle, peut-être une autre personne, mais ce n’est pas intelligent » , lâchait le capitaine mi-octobre à propos d’une réunion de discussion entre le groupe et Emery à propos du schéma tactique idoine. On se croirait revenu en 2004, quand Vahid Halilhodžić cherchait la taupe.
Mais il est vrai que ce fourre-tout que l’on appelle « entourage » est le meilleur Parisien de ce début de saison. Il a d’abord permis d’alimenter le feuilleton Emery-Ben Arfa avec le fameux « Tu n’es pas Messi » , mis Kevin Trapp sur le départ suite à son coup de blues, fait dire à Di María que les séances d’entraînement étaient trop longues. Et puis il y a ceux qui parlent ouvertement, comme l’agent de Thiago Silva qui évoque déjà un départ en cas d’échec dans les négociations visant à prolonger son contrat parisien, il y a aussi le conseiller de Marco Verratti qui demande du « respect » après PSG-OM. Bref, des non-événements qui, compte tenu du début de saison du PSG, prennent des allures de drames.
La méthode Emery en question
Ça a commencé par des doutes. Sans doute trop. Le Basque n’avait pas encore signé que d’aucuns se moquaient de son arrivée. Son premier mois, en revanche, a été un n’importe quoi médiatique. Tout était beau, parfait, clinquant. On en revenait à s’émerveiller du fait que le technicien espagnol saluait les employés de la cantine du Camp des Loges et débarrassait son assiette à la fin du repas. Puis les premiers matchs sont arrivés, et le PSG pressait haut et fort. Les transitions étaient rapides. En tournée US, Leicester, l’Inter et le Real Madrid prenaient des roustes. Trophée des champions, valise aussi dans le buffet de l’OL. Et puis la machine s’est enrayée. C’est devenu poussif, et le 4-2-3-1 a volé en éclats en même temps que la fragilité de Javier Pastore, censé être le garant technique de ce schéma.
Trois mois après son arrivée, Emery a remixé à sa sauce le 4-3-3 de Laurent Blanc, avec une dose de pressing et de jeu vers l’avant malgré une grosse tendance à la possession. Il y a des choses cohérentes… et d’autres moins. Comme le fait de ne proposer aucun appel contre des blocs fermés comme ce fut le cas face à l’OM. Dimanche, le PSG aurait pu jouer six mois sans jamais trouver la faille tant le jeu est stéréotypé. On a aussi, dans un excès de mauvaise foi, pointé le trop-plein d’énergie du technicien sur le banc de touche. Les mêmes qui se paluchent sur l’énergie de Simeone, Klopp ou Conte. Malgré tout, Unai Emery, qui paye pour lui de ne pas être français et de passer après le licenciement incompréhensible – en matière de finance – de Laurent Blanc, n’a pas conquis son monde. Le temps ? Personne ne lui en laissera…
Une direction invisible
Et si finalement, le principal problème du PSG venait d’en haut ? La révolution parisienne a débuté dans les colonnes du Parisien, en juin, quand le président Nasser Al-Khelaïfi a arrosé Laurent Blanc – sans le nommer – de plusieurs scuds verbaux. Prolongé alors qu’il était en fin de contrat trois mois plus tôt, Blanc prend la porte avec plus de 20 millions d’euros. Du bon management. Emery est intronisé, le choix est intéressant, mais le Basque vient seul. Pas de Monchi, le directeur sportif de Séville, alors que le PSG a un manque à ce niveau depuis le départ de Leonardo. Dans la foulée, Patrick Kluivert sort du chapeau. Personne ne l’a vu venir. Personne ne sait encore aujourd’hui expliquer le rôle précis du « directeur du football » . Derrière, Olivier Letang, que tout le monde annonçait sur le départ, quitte son poste de « directeur sportif adjoint » (de personne, il faut le rappeler), pour être promu « directeur sportif » .
Et puis voilà l’organigramme parisien redessiné sans aucun impact sur le mercato, à l’exception de l’arrivée de Jesé – 25 millions pour un remplaçant du Real – et le départ de David Luiz le 31 août. Un départ non remplacé, évidemment. En gros, il est demandé à Unai Emery de faire mieux que Blanc avec un effectif moins fort et amputé du meilleur joueur de son histoire. Surtout, le Basque est prié de se démerder tout seul, puisque la direction parisienne vaque souvent à d’autres occupations. À commencer par Nasser, aux casquettes multiples. Récemment, le président parisien a été nommé par le bureau exécutif de l’Association européenne des clubs (ECA) pour siéger au conseil stratégique du football professionnel de l’UEFA (PFSC). C’est bien connu, plus on fait de choses, plus on s’éparpille. Et cette saison, le PSG n’a pas le temps ni la latitude de s’éparpiller…
Par Mathieu Faure