Mais à quoi sers-tu, le Conseil de l’Ethique ?

Éthique : « Réflexion sur les comportements à adopter pour rendre le monde humainement habitable » . Si Loulou nous dirait qu’il vaut mieux avoir le Petit Larousse dans la tête que le Gros Robert dans le cul, on constate que le chantier du CNE est immensément vaste. Trop même. Derrière ce terme philosophique se cache un peu tout et n’importe quoi. Ce Conseil s’est déjà tiré une balle dans le pied à sa naissance en n’affichant pas clairement ses objectifs.

En quête de légitimité

En 2002, la Fédération Française de Football prend la décision de créer un Conseil National de l’Éthique, à titre purement consultatif, dans le but de participer à l’élaboration de la Charte d’Éthique du Football. Une instance fantôme qui sera tout de même médiatisée avec l’arrivée de Dominique Rocheteau à sa tête. L’Ange Vert comprend rapidement le merdier dans lequel il s’est fourré et exige que son Conseil puisse réellement obtenir un pouvoir autre que symbolique. Requête entendue par le sonotone de Jean-Pierre Escalettes qui octroie un pouvoir disciplinaire au CNE en 2005 pour juger les cas de « manquements à l’éthique commis par des licenciés à l’occasion de déclarations, attitudes ou comportements publics de nature à nuire à l’image du football » . Petite révolution puisque le Conseil peut s’auto-saisir dès qu’il l’estime nécessaire.

Première ineptie : la composition de ce cortège de vieux sages. Sans revenir sur son charismatique président, ses onze autres membres viennent des différentes instances du foot français, du monde pro et amateur. Le CNE est pourtant doté d’une capacité de sanction mais aucun juriste n’est présent ! Pas facile, donc, de veiller au respect des règlements et de se faire accepter par le milieu comme légitime.

Gourcuff contre Pivot

Et ce manque de crédibilité a réservé quelques jolies déconvenues au CNE. La plus célèbre reste la gestion de l’affaire PSG-OM de mars 2006 avec l’envoi de la classe biberon marseillaise pour disputer le « clasico » de L1. Le CNE décide de se faire un bon coup de pub’ et annonce triomphalement le retrait d’un point au classement pour les deux équipes. Mais l’instance va se faire piteusement désavouer par la Commission Supérieure d’Appel de la FFF qui annule la décision. Comment le CNE pourrait-il donner de la voix sur la scène publique alors que plusieurs organes (le Comité Olympique Français par exemple) peuvent contester ses verdicts ?! Le CNE est alors perçu comme un donneur de leçons incompétent qui a le don d’énerver les sportifs et les dirigeants. Dernier exemple en date : Christian Gourcuff qui préfère purger une suspension plutôt que de se plier à une « action pédagogique » , comme conseillée par le CNE, après ses échanges de mots doux avec Antoine Kombouaré sur le cas Makélélé. Ou la preuve vivante qu’un entraîneur réputé ne daigne même pas accepter une alternative proposée par le Conseil d’Éthique.

D’ailleurs, cette affaire Lorient-PSG est assez révélatrice de la tournure que semble adopter le CNE. Son champ d’action est mal délimité ? Pas de souci, l’organe décide d’endosser le costume du Bernard Pivot du foot français. A savoir traquer le moindre écart de langage, décortiquer les discours d’après-match et les déclarations des joueurs. Il est évident qu’il y va de son devoir de sanctionner les « petite tarlouze » de Nicollin et autres « raclure de bidet » du président valenciennois Decourrière. Mais le CNE ne doit pas oublier de regarder de près les comportements déviants, les violences sur les terrains, les haines dans les tribunes… La liste des tacles au respect est longue et ne se limite pas au jeu des petites phrases, par ailleurs souvent intentionnel.

Le CNE doit vite se positionner sur des enjeux beaucoup plus importants pour la survie du foot français sous peine de signer sa propre mort. En même temps, ça permettrait peut-être à Rocheteau d’aller refaire bouillir le Chaudron pour sauver les Verts de la relégation…