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Magie Modou
On peut le considérer comme l’homme fort du CFR Cluj. Ou du moins, celui qui a grandement œuvré pour la qualification de son club à la phase de poules de Ligue des champions. Modou Sougou, buteur sénégalais du champion roumain, est la nouvelle curiosité continentale.
Lorsque le CFR Cluj se déplace sur le terrain du FC Bâle, pour le match aller des barrages de Ligue des champions, personne ne mise un kopeck sur une victoire roumaine. Il faut bien dire que malgré le départ de certains éléments (Shaqiri en tête), le champion suisse paraît mieux armé, et fort, qui plus est, d’une qualification précédente pour les huitièmes de finale de la plus grande compétition continentale. Bah oui, mais non : Cluj repart de Bâle avec une victoire dans la musette (1-2). Une première manche parfaitement négociée, et dont on peut accorder le crédit à un seul homme : Modou Sougou, auteur du doublé. Un attaquant sénégalais, transfuge de Liga Sagres, à la lente évolution, mais enfin révélé la saison dernière en Roumanie. Récemment, plusieurs clubs de Ligue 1 s’intéressaient même à son cas. Ils n’avaient pas tort, au final. Parce qu’il ne fait pas que scorer, et il ne le fait pas qu’en C1.
Le Usain Bolt de Cluj
Pourtant, Modou Sougou, 27 ans tassés, n’a pas passé sa carrière à faire trembler les filets. Loin de là. Premièrement, parce que celui qui vient de se révéler sur la scène européenne avec un premier coup d’éclat est davantage un ailier offensif qu’un buteur esseulé en pointe. Un coup d’œil sur ses stats suffit pour se faire une idée : en championnat portugais, où il a joué sept saisons (ses premières expériences européennes) et 152 rencontres, marquant 24 buts et distillant 22 passes décisives. D’autant que sur ses quatre premières saisons, entre l’Uniāo Leiria et Vitória Setúbal, il présente un bilan, pour ainsi dire, famélique. C’est en fait à l’Académica de Coimbra, où il pose ses valises pour trois ans, que le Sénégalais fait décoller sa carrière. Durant ses derniers mois au club, Sougou côtoie l’entraîneur Jorge Costa. Autrement dit, l’homme qui le fera venir avec lui à Cluj, au terme de la saison 2010/2011.
Depuis, même si le technicien portugais a été viré, les dirigeants du club roumain ne peuvent que le remercier pour son caprice : l’ailier sénégalais a été l’un des grands artisans du titre de champion la saison dernière, avec 10 buts et 15 assists en 33 matchs. Pour une première saison en Roumanie, costaud. D’autant que ses nouveaux supporters l’ont vite adopté. Dans les tribunes du Stade Constantin Radulescu, nombreux sont ceux qui le comparent à Usain Bolt. Au Portugal d’ailleurs, on l’appelait par le non moins glorieux qualificatif « Le Vent » . Parce que s’il y a bien un élément qui caractérise le bonhomme sur un terrain, c’est sa vitesse de pointe. 10,4 secondes au 100 mètres sur gazon, le type. Il aurait presque pu aller aux JO représenter son pays dans la discipline (avec un temps pareil, il n’aurait pas été le plus ridicule, en plus). Et comme le bonhomme est assez doué techniquement, même si ce n’est pas son taf, il peut dépanner en pointe, manière de proposer des solutions avec ses appels. Niveau finition, ce n’est pas comme s’il était mauvais non plus. On le sait, désormais.
Alors, la Ligue 1 ?
Le truc, c’est qu’avec sa belle saison en Roumanie, Sougou a enfin attiré le regard de club de championnats plus huppés. Comme Bolton en Angleterre. Ou… Bastia et Troyes, en France. Les deux promus ont en effet tenté une approche, mais la clause libératoire de l’attaquant, fixée à trois millions d’euros, aurait freiné les ardeurs. C’est dommage, parce qu’à l’ouverture du mercato, Sougou, lui, était plutôt tenté par l’expérience : « Comme tous les footballeurs sénégalais, j’ai toujours aimé le championnat français et je sais que ces deux clubs m’ont supervisé à plusieurs reprises. » Pas de quoi insister non plus. Parce qu’après tout, l’ailier est venu en Roumanie pour « gagner des titres » et, à ce niveau, il a été servi. Sans compter sur le fait qu’il « adore la ville et l’ambiance du vestiaire » , et que son nouveau statut de star joue dans son épanouissement.
En tout cas, cette somme de trois millions d’euros peut paraître dérisoire à l’heure actuelle, qui plus est si l’on tient compte de ses récentes performances. Cette clause, on la voit mal, aujourd’hui, constituer un obstacle pour qui veut bien recruter le joueur. Parce que bon, au fond, Modou Sougou est plutôt un investissement rentable. Ce n’est pas son club du CFR Cluj qui dira le contraire : les dirigeants roumains ont acheté le joueur pour un peu plus de 300 000 euros l’été dernier. Sougou perçoit 180 000 euros par an, le tout sur trois saisons. Et aujourd’hui, ce bonhomme qui n’a coûté (et ne coûte) qu’une bouchée de pain à son club, est en passe de lui faire réaliser une belle plus-value. Alors si ça, ce n’est pas un joli retour sur investissement, on ne s’y connaît pas…
Alexandre Pauwels