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Lyon et ses jeunes joueurs modernes
Relancé dans la course à la 3ème place après trois victoires en L1, l’OL a eu le temps de digérer le désastre de Nicosie. Un retour en forme qu’il faudra confirmer ce soir à Rennes (21 heures). En s’appuyant une fois de plus sur le talent d’une jeunesse montée en grade depuis l’élimination en Ligue des Champions.
A force de les voir courir après leur passé, on a fini par se demander si les Lyonnais pouvaient encore avoir un avenir. La dernière fois, c’était après cette défaite de Nicosie qui a pu prendre des allures de fin de l’histoire, du moins celle écrite par l’OL en Ligue des Champions. Trois semaines plus tard, à défaut de tenir son avenir entre ses mains, le club du président Aulas a eu le temps de trouver deux bonnes raisons d’y croire. D’abord, en revenant à quatre points de la troisième place à la faveur de trois victoires consécutives en championnat. Ensuite, en se souvenant de cette règle qui veut que l’avenir appartient d’abord à ceux qui en ont un. A savoir les plus jeunes d’entre les joueurs qui se sont vus proposer dans cette séquence post-Nicosie une montée en grade dans la hiérarchie lyonnaise.
Pour bien comprendre de quoi il retourne, il faut revenir trois semaines en arrière, à ce moment précis où l’OL se retrouve dans le décor après son élimination de Ligue des Champions. Les coupables sont alors tout désignés : les joueurs. On pourra toujours interpréter cette façon de procéder comme une volonté manifeste de préserver Rémi Garde, jugé un brin trop tendre alors que son équipe se met à patiner – coaching timide, manque d’épaisseur tactique, protection à l’excès de ses joueurs… Avant que la suite ne vienne rappeler que c’est encore en remettant chacun à sa place que l’OL marche le mieux. Au coach la redistribution des rôles dans un 4-4-2 nouveau genre qui fait la part belle aux jeunes pousses maison, un par ligne : Umtiti en défense, Grenier au milieu et Lacazette devant. Au président la distribution des bons points qui sauront redonner un peu d’élan à l’affaire, sous forme de contrats revus à la hausse.
Umtiti, défense modèle
Pas difficile dans le cas d’Umtiti qui n’avait pas encore pris le temps de signer le moindre contrat pro. Si l’histoire du jeune défenseur de dix-huit ans s’est écrite en accéléré depuis sa première titularisation le 7 janvier dernier (en 32ème de finale face à La Duchère), elle s’est surtout inscrite dans ce chantier à ciel ouvert toujours à l’œuvre du côté de la défense lyonnaise. Un problème récurrent depuis que la carrière du Policier a pris des allures de trajectoire à la Bad Lieutenant, entre plongée en enfer (blessures, contre-performances) et tentatives de rédemption vite torpillées par une rechute de dernière minute. Dans ce contexte, Lovren aurait dû s’imposer comme le patron attendu de la défense lyonnaise. C’était sans compter sur les blessures à répétition et suspensions d’un jour qui viennent contrarier la montée en puissance du Croate. Difficile dans ces conditions d’installer sur la durée la paire avec Koné annoncée plus tôt dans la saison par Rémi Garde. D’autant qu’entre temps, le Général n’est pas parvenu à maintenir sur la durée les prestations qui en avaient une des sensations des premiers mois.
Quelle valeur alors donner à l’émergence de Samuel Umtiti dans le jeu des chaises musicales qui a pris place au milieu de la défense lyonnaise ? Pour certains, une façon de souligner un peu plus la faiblesse de ce secteur où le work in progress doit sans cesse être reconduit. Côté club, on préfère avancer d’autres raisons qui se dessinent en creux dans le petit jeu des comparaisons entamé au sujet du Gone de Ménival. « Un sens de l’anticipation qui me rappelle Patrick Müller » avance Rémi Garde. « Il peut jouer dans l’axe ou à gauche, et je lui prédis un avenir dans le registre d’un certain Eric Abidal » pour Bernard Lacombe (Le Progrès). Entre le Baresi lent et le latéral le plus rapide de l’histoire lyonnaise, on n’est pas loin du grand écart. Comme s’il fallait se convaincre qu’Umtiti correspond bien à ce modèle de défenseur qui manquait tant à l’OL ces dernières années, au point d’y voir des gars du milieu de la trempe d’un Toulalan ou d’un Bodmer tenter de s’y coller.
Grenier, l’intermittence du talent
Cette descente d’un cran au milieu, il en est justement question avec Clément Grenier. Formé à l’école du 4-3-3 maison pour y tenir le rôle de meneur, l’apprenti Kaka a été amené depuis trois matchs à évoluer dans un registre plus défensif, façon relayeur. Au vu de sa dernière apparition face à Sochaux, ponctuée par une sortie à la mi-temps sur décision de Rémi Garde, tout laisserait entendre que l’apprentissage ne se fait pas sans mal. Avant de se rappeler que c’est précisément à ce poste que Grenier est passé du rôle de remplaçant de luxe à celui de titulaire indiscutable pendant le Mondial U19 l’été dernier. On en revient alors à l’histoire d’un joueur qui a eu vite fait de prendre conscience de sa valeur lorsque les fins limiers d’Arsenal sont venus se rencarder à son sujet. Il n’en fallait pas plus pour que sa vision de jeu au-dessus de la moyenne et sa finesse technique le consacrent comme le nouvel enfant roi de la formation lyonnaise. D’autres avant lui sont passés par là. Il y a eu le haut (Benzema), les bas (Tafer, Belfodil) et l’intermittent (Ben Arfa).
Pour l’instant, Grenier navigue surtout dans cette dernière catégorie. Celle qui lui vaut de gagner ses galons de titulaire à mesure que se consomme la disparition en eaux troubles du cas Gourcuff et que se prépare le départ d’Ederson. Avant que le soupçon de la caboche trop consciente de son talent pour ne pas céder à la facilité ne se pointe et n’oblige tout son monde à pratiquer l’art de la mise au point, sévère quand les darons du vestiaire s’y mettent – tacle musclé de Cris à l’entraînement, bonne soufflante de Vercoutre à Nicosie –, en forme de rappel à l’ordre quand c’est à Rémi Garde d’intervenir : « Face à Sochaux, Clément a symbolisé les difficultés de l’équipe physiquement. Il y a eu du déchet dans son jeu , mais sa sortie n’a rien d’une condamnation. Elle n’enlève pas tout ce qu’il a bien fait ces derniers temps. »
Lacazette, contrat d’avenir
Pas la peine d’en passer par là pour Alexandre Lacazette. La raison est simple : le kid de Mermoz évolue dans le seul secteur où la concurrence continue de faire rage. Si le retour de flamme lyonnais a à voir avec une solidité défensive retrouvée, il s’explique également par la réussite de ses attaquants. Lacazette y tient sa part. Par son talent qui, en plus de le voir jouer les dynamiteurs de service à coups d’accélérations et de provocations au milieu des défenses adverses, est venu troubler l’ordre établi sur le front de l’attaque lyonnaise. Ce soir, Bafé Gomis n’aura pas à craindre d’abandonner de son précieux temps de jeu à son jeune coéquipier dans la course qui l’oppose à Giroud et à Hoarau en vue de l’Euro – Lacazette sera suspendu. En attendant, au même titre que Briand renvoyé sur le banc, la Panthère a eu le temps de sentir passer le vent du boulet, obligé de s’en remettre à une entrée tout en rage contenue lors du Derby pour disputer au dernier fleuron de la formation offensive à la lyonnaise la place de titulaire qui menaçait de lui échapper à la pointe du 4-4-2 nouveau. Une pression dont la vertu n’aura échappé à personne si l’on en croit la prolongation de contrat signée par Lacazette cette semaine (jusqu’en 2016). Preuve qu’en coulisses, l’OL est prêt à miser sur l’avenir. Reste à valider dès ce soir la donne sur le terrain. Pour ne plus avoir à regarder en direction du passé.
Par Serge Rezza