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Lyon-Beşiktaş : salades, stigmates et sans gnons

Par François Goyet

Sept ans après les graves débordements en marge de leur affrontement en quarts de finale allers de Ligue Europa (13 avril 2017, score final 2-1), l’Olympique lyonnais retrouve le Beşiktaş ce jeudi (21h) dans un contexte particulier, entre baisse de compétitivité des deux clubs, interdiction de déplacement des supporters stambouliotes et surveillance accrue d’un Groupama Stadium à moitié vide. Dans une région Rhône-Alpes où la communauté turque est aussi nombreuse que passionnée, la fête attendue n’aura finalement pas lieu, entre incompréhension et regrets du passé.

Lyon-Beşiktaş : salades, stigmates et sans gnons

« C’est une catastrophe pour tous les Turcs de France. Sept ans plus tard, on subit encore les conneries de mecs qui ne nous représentent absolument pas ! » C’est peu dire qu’Ismaïl, Franco-Turc originaire de Bron et habitant de la région lyonnaise depuis toujours, a vécu comme un choc l’annonce des mesures drastiques destinées à garantir la sécurité autour de l’affiche Lyon-Beşiktaş, comptant pour la troisième journée de Ligue Europa. Déjà classée à haut risque par la Division nationale de lutte contre le hooliganisme (DNLH) et soumise à un encadrement spécifique, un arrêté préfectoral du 2 octobre dernier est venu tracer les contours de l’interdiction de déplacement des supporters du Beşiktaş dans le Rhône, suivi de près par un communiqué du club lyonnais désireux de réduire au maximum les risques de débordements : jauge de 30 000 places seulement dans le stade, billets nominatifs, impossibilité pour les non-abonnés du Groupama Stadium d’acheter des billets, et latitude offerte aux agents de sécurité de procéder à des « rapprochements d’identité » afin d’éviter tout risque de revente illégale de ticket.

Des mesures sécuritaires quasiment inédites pour une rencontre de phase de groupes européenne, qui ne sont toutefois pas le fruit du hasard : lors de la dernière rencontre entre l’OL et le BJK sur le sol français, de graves incidents entre supporters des deux camps avaient éclaté autour et dans le stade lyonnais, provoquant des scènes d’affrontement surréalistes, des dégâts matériels, de nombreux blessés dont des membres des forces de l’ordre et des stadiers, ainsi que le décalage du coup d’envoi de 45 minutes à la suite de l’envahissement du terrain par des supporters lyonnais désireux de se protéger de jets de projectiles et un Jean-Michel Aulas devant mouiller la chemise. Des scènes de chaos restées dans les mémoires, le fruit de la bêtise commune des « supporters » des deux camps finalement sanctionnés à hauteur égale par l’UEFA, une amende de 100 000 euros ainsi qu’une suspension de compétition européenne avec sursis infligée aux deux clubs.

Festivités avortées et têtes de Turc

Ces violences, Ismaïl n’y a pas assisté puisqu’il n’était pas au stade ce triste soir de 2017, faute de billet trouvé pour le match. Supporter de Galatasaray, il est le témoin que la venue d’un club turc en Europe, spécialement en France dans la région lyonnaise où la communauté turque est très implantée, est avant tout perçue comme une fête pour tout un peuple fan de football, quel que soit le club concerné. « Il n’est pas rare de voir des supporters de Galatasaray, Fenerbahçe ou du Beşiktaş se déplacer pour voir jouer l’une des deux autres équipes en Coupe d’Europe », assure-t-il, ajoutant que « c’est l’occasion pour toute une communauté de voir des équipes représenter le pays et partager des moments de fête du sport ensemble ».

En 2017, les débordements, c’était avant tout la faute d’un mouvement venu d’Allemagne uniquement pour se battre et casser.

Ismaïl

Ce constat, le président de l’association France-Turquie région Rhône-Alpes Lyon l’appuie volontiers : habitant de Saint-Priest, fan du Beşiktaş et soutien de tous les clubs turcs lorsqu’ils s’exportent près de chez lui, Zafer se réjouissait du retour des Aigles noirs à Lyon. Lui qui appelait à la sérénité et au calme autour de cette « fête du football », prévoyant même d’emmener ses deux filles au stade, ne peut aujourd’hui que constater les dégâts causés par un cadre aussi restrictif : « Le sport, et notamment le football, doit demeurer un espace de fraternité et de rapprochement des peuples ». Si ces rencontres doivent avant tout « favoriser l’amitié et non la division », Zafer a du mal à digérer ces interdictions, qu’il juge largement disproportionnées. « Tous les supporters du Beşiktaş sont mis dans le même panier » enchérit Ismaïl. En 2017, les débordements, c’était avant tout la faute d’un mouvement venu d’Allemagne uniquement pour se battre et casser ».

Des tribunes vides, mais pas pour les mêmes raisons qu’à Louis-II.
Des tribunes vides, mais pas pour les mêmes raisons qu’à Louis-II.

Il faut dire que le nombre de supporters des Aigles avait surpris par sa masse, près de 20 000 fans débarquant dans la ville des Lumières, pour beaucoup dépourvus de billets d’accès au stade, source de vives tensions. « La grande majorité des supporters turcs voit la venue du Beşiktaş ou d’un autre club comme une immense chance de voir une équipe du pays se confronter aux meilleurs clubs européens », assure Ismaïl. Zafer, lui, s’il souligne que les deux équipes ont perdu en prestige depuis cette double confrontation de 2017, qui mettait aux prises « un gros Beşiktaş face à un Olympique lyonnais hyper compétitif avec Tolisso, Fekir ou Lacazette au top de leur forme », maintient que la cuvée 2024 avait suffisamment d’atouts pour être une rencontre excitante, sur fond de célébrations d’une « amitié franco-turque solidement ancrée ».

Une communauté parfois stigmatisée

Cette déception, Tuncay ne la partage qu’à moitié. Présent au stade en 2017 mais suffisamment loin des échauffourées pour ne pas se souvenir en détail des violences, ce Franco-Turc de 42 ans et supporter du Beşiktas appréhende les nombreuses restrictions comme une fatalité. « Je préfère que cela soit fait ainsi », avoue-t-il, presque soulagé de savoir que cette fois, il n’y aura probablement pas d’incidents impliquant directement la communauté turque. « On a été pointés du doigt comme responsables de tout ce bordel », déplore-t-il, évoquant le regard parfois « craintif et défiant » de la société à l’égard du peuple turc à la suite des évènements de 2017.

Les photos dans les journaux ne montraient que les conneries des Turcs, alors que lorsque j’allais sur les sites d’information de mon pays d’origine, la Une c’était des familles qui se faisaient tabasser par les Lyonnais.

Tunçay

Tuncay se souvient de la manière dont les médias français avaient relayé ces violences dès le lendemain du match, rejetant explicitement la faute du côté des fans stambouliotes. « Les photos dans les journaux ne montraient que les conneries des Turcs, regrette-t-il, alors que lorsque j’allais sur les sites d’information de mon pays d’origine, la Une c’était des familles qui se faisaient tabasser par les Lyonnais. » Si les torts sont très certainement partagés, en témoignent les défaillances constatées et sanctionnées pour chacun des deux clubs, les interdictions autour de la rencontre de ce jeudi constituent « un mal pour un bien » selon ce responsable recherche et développement, las des violences à répétition : « Tant que l’on ne prendra pas des mesures claires pour éradiquer le hooliganisme, comme l’Angleterre l’a fait il y a quelques années, ce sera un éternel recommencement. »

À charge de revanche

Ce stade à moitié vide ne pourra pas le prouver : les relations franco-turques se portent pourtant à merveille si l’on en croit les paroles de Zafer. « Historiquement, la France et la Turquie ont toujours noué des liens d’amitié très forts, explique l’associatif. La France était par exemple la première à reconnaître la République d’Atatürk, qui parlait lui-même couramment le français, Renault est implanté en Turquie, la communauté turque de France est bien intégrée, notamment dans le milieu du bâtiment et de la restauration. » Selon lui, le récent rafraîchissement des relations diplomatiques entre Paris et Istanbul n’a aucun impact sur la vie quotidienne, et « encore moins sur le football, véritable religion chez nous. Les divergences entre Macron et Erdoğan n’engagent qu’eux. Le football n’est absolument pas affecté par le contexte géopolitique et doit rester un espace de communion des peuples autour du sport », ajoute Ismaïl, du même avis.

À défaut de pouvoir donner de la voix en tribunes, Ismaïl, Zafer et Tuncay seront devant leur télévision ce jeudi pour encourager les Noir et Blanc, défaits lors des deux premières journées et qui se présentent déjà au Groupama Stadium dans l’obligation de ramener des points, face à un Olympique lyonnais qui compte deux victoires en autant de rencontres. Et si la ferveur des supporters turcs ne pourra pas résonner aux abords du Parc OL, c’est dans le cœur chaud des véritables passionnés que la flamme de la fierté turque continuera de brûler. En attendant la promesse de jours meilleurs…

Par François Goyet

Tous propos recueillis par FG.

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