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- Lyon-Bayern (0-3)
Lyon a (encore) eu presque tout bon
Aux oubliettes, les mauvaises langues qui juraient que Lyon allait se faire rouler dessus par le Bayern en demi-finales de C1. Ce mercredi soir, les Gones n'ont pas fait que causer de sérieux maux de tête à l'escouade bavaroise. Ils auraient carrément dû ouvrir le score, n'ont jamais cessé d'attaquer malgré le retard au tableau de score et ont sérieusement fait déjouer un Bayern méconnaissable par séquences. Pas mal pour des Lyonnais accusés de se reposer sur une philosophie de jeu défensive minimaliste.
Ceux qui n’étaient pas devant leur télé ce mercredi soir se contenteront d’un laconique commentaire sur le score final : « 3-0 pour le Bayern, c’est tout ? » Promis à une branlée, l’Olympique lyonnais a effectivement bien résisté, et ce, jusqu’au bout : ce n’est qu’à la 88e minute que Robert Lewandowski a définitivement éteint les derniers espoirs rhodaniens. Un manque de réalisme de la part des Bavarois, qui n’ont pas su achever leur proie du soir ? Bien au contraire. Car si ce Bayern d’Hansi Flick a pour coutume d’ajouter un deuxième, un troisième voire un huitième pion après l’ouverture du score, jamais le Rekordmeister n’a eu cette fois la latitude pour accomplir ses desseins, tant Lyon y a mis du sien jusqu’au bout, croquant encore et encore dans toutes les jambes allemandes, cherchant encore et encore à aller de l’avant. Et c’est déjà une petite victoire en soi.
Des javelots très précis
Une fois le 2-0 enfourné par le Bayern, la tendance aurait pu être à la résignation du côté des Gones. À chercher à éviter une dérouillée comme celle vécue par le Barça. À finir tranquillement sur un score pas trop lourd, qui rendrait justice au balèze parcours européen des Lyonnais. Il n’en a rien été. Ces Gones n’en avaient rien à foutre de se faire humilier. Eux, ce qu’ils voulaient, ce à quoi ils croyaient dur comme fer, c’était de renverser ce Bayern qu’on disait irréductible. De Rudi Garcia à Karl Toko-Ekambi en passant par Houssem Aouar, tous n’ont jamais cessé de s’encourager, d’offrir des jeux en triangle, de proposer des appels, de rechercher des solutions vers l’avant. Et ils y ont cru tellement fort qu’ils ont bien failli y parvenir. Dommage que le dernier geste n’ait pas été au rendez-vous, à l’image de ce deux-contre-un mal négocié par Dubois (35e), ce manque de vivacité de Toko-Ekambi en excellente position (40e, 48e), cette tête cadrée de Marcelo (58e) ou ce face-à-face crucial de Toko-Ekambi – encore – devant Neuer (56e).
Et que dire de ce début de match, où les Lyonnais se sont encore jetés dans la bataille comme des chiens enragés ? Comme contre Manchester City, les hommes de Rudi Garcia étaient censés se faire prendre à la gorge par le pressing furibond de leurs adversaires, avant de rapidement se faire punir. Que nenni, encore une fois. Sous pression, il n’y a pas que les Golgoths Aouar et Caqueret qui ont toujours su dompter la gonfle. Les défenseurs centraux, à l’image d’un stupéfiant Marcelo avec le ballon, savaient toujours quoi en faire, quitte à balancer devant. Ce qui a régulièrement été le cas, surtout lors de l’énorme premier quart d’heure. Mais jamais ou presque les javelots balancés ne l’ont été aveuglément, au petit bonheur la chance. Il y avait toujours une intention, une zone ciblée, un partenaire (Karl Toko-Ekambi le plus souvent) recherché dans le dos de la fébrile défense Alaba-Boateng. Et si Depay n’avait pas vendangé son face-à-face après avoir dribblé Neuer (4e), si Cornet avait eu la lucidité de lever la tête pour ajuster son centre coupé in extremis par Boateng (13e), ou si Toko-Ekambi avait pu heurter les filets plutôt que le poteau à bout portant (17e), le plan de jeu de Rudi Garcia et la débordante générosité des Lyonnais auraient été récompensés à leur juste valeur.
Pas de folie des grandeurs à Lyon
Au fond, Lyon ne restera pas comme l’équipe frisson de cette C1. Elle n’est pas celle qui aura fait se lever les foules par un jeu ultra sexy. Elle n’est pas celle qui aura imposé une révolution tactique aux grosses écuries ronronnantes. L’immense mérite de Lyon aura été de s’adapter le mieux au format inédit de cette C1 remodelée. Ce format où, sur un match, un David peut terrasser un Goliath grâce à son envie et sa pugnacité. Son immense mérite aura été d’évoluer avec ses armes, sans surjouer, sans chercher à se prendre pour ce qu’il n’est pas. Là où tant d’équipes s’obstinent à la relance courte depuis l’arrière jusqu’à la caricature (coucou le Barça de Ter Stegen et le Leipzig de Gulácsi), aucune trace de ce genre de folie à Lyon quand cela n’était pas nécessaire. Là où tant d’équipes cherchent coûte que coûte à imposer leurs préceptes sur toute la durée d’un match, ces Gones se sont toujours escrimés à canaliser d’abord les points forts adverses, à briser les certitudes de leur opposant. Contre ce Bayern, la stratégie a encore fait mouche, tant l’influence de Müller, Lewandowski ou Thiago Alcántara a été limitée, tant le Rekordmeister a été contraint d’allonger le jeu à tire-larigot. « Qui connaît l’autre et se connaît lui-même, peut livrer cent batailles sans jamais être en péril. Qui ne connaît pas l’autre, mais se connaît lui-même, pour chaque victoire, connaîtra une défaite », affirmait Sun Tzu dans L’Art de la guerre. Cette fois-ci, Lyon a certes connu la défaite, mais de très nombreuses victoires dans la défaite.
Par Douglas de Graaf