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LFP, la cage aux mous
La LFP n’arrive pas à s’en sortir avec la question de l’homophobie, ni à trouver les moyens de la combattre. Pire : la bande de Labrune semble résignée face aux difficultés que cela risque de lui poser, comme si elle ne disposait pas du bon logiciel pour s’y atteler.
L’homophobie dans le football ne concerne certes pas que les championnats français professionnels, loin de là. Personne n’a oublié, s’il s’agit de dézoomer à l’étranger, la triste capitulation de l’UEFA devant le diktat d’Orban lors de l’Euro 2021 ou le Mondial au Qatar l’année dernière. Toutefois dans la République française, où une législation existe à ce propos, nous étions en droit d’attendre un peu plus de la part du foot tricolore. La justice ne fait pas forcément mieux, ou ne montre pas l’exemple. Ainsi l’AFP informe que le signalement effectué au sujet des chants homophobes entonnés lors du PSG-OM en septembre dernier avait été classé sans suite, notamment parce qu’il s’avérait impossible d’identifier individuellement les auteurs du délit. De la même manière, l’autodissolution du collectif Rouge direct sous un flot des menaces en ligne en dit long sur le contexte. Et à chaque fois, le petit monde du football paraît toujours pour le moins frileux pour affronter cette problématique.
Dernier exemple en date : le passage des responsables de la LFP devant la commission parlementaire à propos des défaillances des fédérations sportives ce mercredi. Vincent Labrune, son président, reconnaît de la sorte que « quasiment à chaque match, il y a des chants homophobes », accorde qu’« interrompre la rencontre semble une bonne mesure pour marquer le coup », avant de freiner en expliquant que « si à chaque match, on arrête le match de façon définitive, on ne va plus jamais les jouer, les matchs ». Cette position a été largement éclairée ensuite par l’audition d’Arnaud Rouger. Le directeur général de la LFP a été interrogé évidemment sur la fin de l’opération du flocage arc-en-ciel, prochainement abandonné et dont on se souvient que certains joueurs avaient préféré ne pas le porter. Ce choix avait été parfois justifié par la volonté de ne pas cautionner l’homosexualité. Une démarche que finalement valide le dirigeant de la Ligue : « Aujourd’hui, le message que l’on porte – pour certains, pas pour tout le monde – manque de clarté, et la frontière entre lutter contre l’homophobie et faire la promotion de l’homosexualité est ténue. Aujourd’hui, il ne s’agit pas de faire la promotion de l’homosexualité, ce n’est pas notre boulot. En revanche, lutter l’homophobie, ça l’est. Donc on réfléchit à un dispositif qui pourrait être plus clair dans la communication. »
Confusion et exclusion
Un tel discours laisse pantois. L’homosexualité serait donc une tendance sur laquelle on surferait ou non, dont on assure ou non la promotion, voire la propagande ? Cette analyse rappelle tristement celle de Vladimir Poutine quand il partait en croisade contre l’Occident décadent « où l’on oblige les enfants à devenir gays ». La lutte contre l’homophobie a normalement pour objectif d’assurer l’inclusion égalitaire et de garantir les droits civiques des personnes LGBT, y compris dans le foot. Que M. Rouger se rassure, même le foot ne peut faire changer l’orientation sexuelle de qui que ce soit… Les réactions n’ont pas tardé. « Je condamne les propos homophobes tenus hier par le directeur général de la LFP lors de son audition », a taclé la rapporteuse de la commission et députée EELV Sabrina Sebaihi. Le FC Paris Arc-en-ciel, club de foot LGBT, s’est également indigné sur X. « Confusion entre “promotion de l’homosexualité” et “lutte contre l’homophobie” ? Au FC Paris Arc-en-ciel, nous militons depuis plus de 25 ans contre l’homophobie dans le foot. Nous dénonçons la posture inacceptable d’Arnaud Rouger, DG de la Ligue de football professionnel ».
🤯 Confusion entre "promotion de l'homosexualité" et lutte contre l'homophobie ? Au FC Paris arc-en-ciel, nous militons depuis plus de 25 ans contre l'homophobie dans le foot. Nous dénonçons la posture inacceptable d'Arnaud Rouger, DG de la Ligue de football professionnel @LFPfr. https://t.co/PYJRk70PUO
— FC Paris Arc En Ciel (@fcpaec) November 24, 2023
Certes, le concept gadget du maillot une fois l’an pour se donner bonne conscience ne convainquait guère, y compris parmi les associations de lutte contre l’homophobie. Les rencontres organisées dans les centres de formation avec certaines d’entre elles semblent des dispositifs largement plus adaptés et efficaces sur le long terme. Toutefois, une telle posture de la LFP inquiète. On comprend aisément la volonté derrière de ménager les clubs, en particulier dans la gestion de leur effectif. Pour se faire une idée, sur plus d’un millier de professionnels masculins, aucun coming out à ce jour, la loi du silence s’impose toujours, et avec ce type de propos, cela ne risque pas de changer. Mais le foot est dans la République, et n’en déplaise aux épigones français de la guerre contre le wokisme et le lobby gay, elle reconnaît à tous et à toutes les mêmes droits. Quoi qu’il en soit, nous ne sommes pas près de voir Vincent Labrune au mariage d’un joueur gay. Ou peut-être alors afin de faire la promotion de la Ligue…
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