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Luis Enrique est-il un fiasco ?
Battu 4-2 par Lecce ce week-end, Luis Enrique ne sait plus vraiment sur quel pied danser. Son équipe n’arrive pas à assurer une continuité, et le coach, s’il n’est pas remis en question par ses dirigeants, se pose tout de même des questions.
C’est l’une des images du week-end en Italie. Samedi, la Roma joue à Lecce. Après la belle victoire contre Novara (5-2), le coach espère que son équipe va enchaîner pour continuer à rêver de la troisième place. 22ème minute, sa défense fait n’importe quoi, Muriel s’en va dribbler Stekelenburg et scorer dans le but vide. Le stade Via del Mare explose. Luis Enrique, lui, reste debout pendant quelques secondes, impassible. Puis il se retourne, s’en va asseoir sur son banc de touche. Et n’en bougera plus. Pendant tout le match, il va rester là, presque silencieux, à regarder son équipe encaisser un deuxième, un troisième puis un quatrième but. Les deux buts de Bojan et Lamela en toute fin de rencontre n’y changent rien. La Roma s’incline lourdement, et ce n’est pas la première fois. Elle avait déjà été corrigée par l’Atalanta (4-1), Cagliari (4-2) et la Fiorentina (3-0). Depuis le début de l’année 2012, les statistiques de la Roma loin du stadio Olimpico sont affolantes : quatre points ramenés des sept derniers déplacements. Des chiffres qui contrastent avec les quatre victoires lors des cinq dernières rencontres disputées à la maison (une seule défaite, lors du derby). Alors oui, il y a de quoi se taper la tête contre les murs. Et Luis Enrique, lui-même, n’y comprend pas grand chose. Mais une chose est sûre : tout cela l’agace, l’énerve, l’exaspère. Presque autant que les tifosi.
Peu de victoires sans Totti
Encore une fois, les chiffres sont criants. La saison 2010-11 de la Roma, terminée à la sixième position, avait été considérée comme un échec. Montella avait succédé à Ranieri en cours de saison, et les dirigeants avaient gentiment expliqué qu’il s’agissait là d’une saison de transition avant l’arrivée des Américains et que l’année qui allait suivre serait une année de succès. Oui, sauf que les résultats ne disent pas vraiment la même chose. La Roma compte trois points de moins que l’an dernier à la même époque, avec pourtant un mercato estival où elle aura déboursé quelques 65 millions d’euros. Or, Luis Enrique a beau pointé du doigt le manque d’implication de ses nouvelles recrues, il a forcément sa part de torts dans cet échec. « Je ne comprends pas les raisons de ces baisses de niveau et de fait, je ne sais pas comment intervenir » a-t-il dit à ses joueurs, lors de la reprise des entraînements après la défaite de Lecce.
Un coach perdu, un homme un peu seul, qui a toutefois constaté avec désarroi que samedi, lors du revers au Via del mare, neuf des onze joueurs alignés étaient des nouvelles recrues. Les deux « anciens » étant De Rossi et Rosi, incapables, néanmoins, de transmettre à leurs coéquipiers cette grinta et ce courage qui avaient caractérisé la Roma lors des ères Spalletti et Ranieri. Un courage qu’incarne à lui-seul Francesco Totti. Le capitaine de la Louve se fait vieux, ne peut plus jouer tous les matches, mais sa présence sur la pelouse change indéniablement tout. Il Capitano a disputé 21 matches de championnat, au cours desquels la Roma s’est inclinée seulement cinq fois (23%). En revanche, sans lui, c’est une autre affaire. Sur les dix matches qu’il a manqués, les giallorossi en ont perdu sept (70%). Preuve que Totti demeure indispensable à cette Roma, n’en déplaise à Luis Enrique, qui n’a jamais caché son envie de mettre en avant la nouvelle génération et les nouvelles recrues. Problème : la plupart de ces recrues sont critiquées (à raison) et seuls quelques joueurs (Lamela, Pjanic et Osvaldo) ont été à la hauteur des investissements faits. Déjà une révolution en vue cet été ?
Attendre le projet
Oui, la Roma va changer. Car la façon dont elle a fonctionné cette saison ne convient déjà plus. Après chaque revers, Luis Enrique fait son autocritique mais continue de mettre en avant son « projet » . Un refrain qui lui a déjà attiré la sympathie des supporters de la Lazio. L’ancien coach du Barça B a en effet perdu les deux derbys cette saison, et les tifosi laziali, pour chambrer, n’ont pas hésité à entonner le chant « Luis Enrique l’un des nôtres » . Et même chez ses propres ouailles, le discours de Luis Enrique commence à perdre de sa valeur. « Le projet ? Oui, c’est bien. Mais maintenant, il faut des résultats. Sans résultat, on ne va nulle part » affirmait la semaine dernière Fernando Gago. Le résultat n’est pas arrivé à Lecce, la Roma a peut-être perdu ses derniers espoirs de qualification en Ligue des Champions, et les dirigeants se projettent donc déjà sur la saison prochaine. Certains vont partir (Heinze est courtisé par River Plate, Juan devrait rentrer à Flamengo…) et d’autres vont arriver. Le directeur général de la Louve, Franco Baldini, a promis « trois ou quatre grands joueurs pour la saison prochaine » . Peu de noms ont filtré, hormis ceux de Dirk Kuyt et Giuseppe Rossi. Ce qui est déjà pas mal.
Luis Enrique, quant à lui, ne se démonte pas. S’il n’a pas une énorme cote auprès des supporters, les dirigeants lui maintiennent leur confiance. Une confiance dont l’ami Louis ne doute pas une seconde. « Vous devrez encore me supporter pendant trois ou quatre ans » avait-il déclaré à la presse il y a quelques jours, lorsqu’on lui avait demandé s’il avait pensé à démissionner. Quoiqu’il en soit, le technicien espagnol a encore sept matches à disposition pour décrocher une qualification européenne. Demain soir, contre l’Udinese, la Roma dispute d’ailleurs un match importantissime en vue de cette course à l’Europe. Avec une victoire, elle pourrait encore rêver de la troisième place, même si la Lazio est actuellement à sept points. En revanche, en cas de revers comme au match aller (2-0), les giallorossi devraient commencer à regarder derrière eux, puisque l’Inter, septième, ne compte que deux points de retard. Or, arriver septième signifierait ne pas se qualifier pour l’Europa League. Et Luis Enrique aura beau être confiant, pas sûr que les tifosi et les dirigeants lui pardonnent une deuxième saison consécutive sans Europe. La loi des résultats, au détriment du projet.
Eric Maggiori