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- J11
- Luton-Liverpool (1-1)
Luis Díaz, le sauvetage et l’attente
De retour dans le groupe de Liverpool, Luis Díaz a évité la défaite aux Reds en égalisant sur la pelouse du promu Luton Town (1-1). Un but évidemment dédié à son père, enlevé il y a plus d'une semaine en Colombie et dont la libération se fait toujours attendre.
Luis Díaz n’avait plus marqué depuis le 21 septembre, contre Linz en Ligue Europa. Il restait même sur plus de huit heures de jeu sans le moindre but ou la moindre passe décisive, en Premier League. Jusqu’à la cinquième minute du temps additionnel, ce dimanche à Kenilworth Road : alors que Liverpool était mené par Luton Town et se dirigeait vers une défaite inattendue, le Colombien a surgi dans le dos de la défense pour reprendre le centre distillé par Harvey Elliott en lobant un Thomas Kaminski jusqu’ici infranchissable.
Luis Diaz égalise dans les arrêts de jeu pour Liverpool et célèbre avec un message pour son père, kidnappé par un groupe armé Colombien
"Liberté pour papa" 🙏#LUTLIV | #PremierLeague pic.twitter.com/FBskEYsXRj
— CANAL+ Foot (@CanalplusFoot) November 5, 2023
Pas d’effusion de joie pour autant du côté du buteur, qui s’est contenté de checker ses coéquipiers et de soulever son maillot pour laisser apparaître le message « Liberté pour papa ». S’il a retrouvé le chemin des terrains, l’ailier a en effet toujours la tête de l’autre côté de l’Atlantique dans l’attente de nouvelles de son père.
Sur pause
Pour lui, le football passe au second plan depuis le 28 octobre. Ce jour-là, Luis Manuel Díaz et Cilenis Marulanda ont été kidnappés dans une station-service de Barrancas au nord de la Colombie (non loin de la frontière vénézuélienne). La mère de la star locale a rapidement été relâchée, mais son père est toujours aux mains de la guérilla de l’Armée de libération nationale (ELN). Le fait divers est devenu une affaire nationale, le président Gustavo Petro prenant lui-même la parole pour rappeler les ravisseurs à leur responsabilité au milieu des négociations de paix destinées à apporter davantage de sécurité au pays après plusieurs décennies rythmées par la menace des groupes paramilitaires.
L’ancien feu follet de Porto n’était évidemment pas sur la feuille de match contre Nottingham Forest au lendemain des faits, ni à Bournemouth mercredi dernier. Le joueur a finalement repris l’entraînement en milieu de semaine, et vendredi, Jürgen Klopp rappelait en conférence de presse qu’il lui laisserait tout le temps nécessaire : « On peut voir que lorsqu’il est avec les garçons, tout va bien, mais on remarque aussi qu’il n’a pas beaucoup dormi. Tout dépend de lui, s’il se rend disponible ou non. Je ne forcerai rien. » À l’occasion de la onzième journée du championnat anglais, le Colombien est donc sorti du banc à la 83e minute en lieu et place de Ryan Gravenberch. Les Reds l’en remercient, puisqu’il leur a permis d’éviter un revers sacrément embarrassant et de passer devant Arsenal au classement.
« Notre angoisse croît à chaque seconde »
Un scénario « émouvant », selon les mots de Klopp : « Nous voulions lui donner la possibilité de se distraire un peu, il ne peut rien faire et il patiente. » Et Alisson d’enchaîner, au micro de Sky Sports : « Cela dit beaucoup de sa force intérieure, peu de gens peuvent imaginer ce qu’il vit en ce moment. Parfois, dans les instants sombres, le football peut apporter de la joie aux gens, et je pense que ça lui en apporte un peu en ce moment. » Si le chef de l’ELN a reconnu que l’enlèvement de Luis Manuel Díaz était une erreur, le paternel n’a toujours pas été relâché à l’heure d’écrire ces lignes. Son fils est sorti du silence par le biais d’un communiqué publié sur ses réseaux sociaux, afin de réclamer la libération de son père et de toutes les personnes retenues par les groupes armés en Colombie.
Este gol es por la libertad de mi padre y de todos los secuestrados de mi país.
Gracias a todos por su apoyo.🙌🏻@europapress @bbcmundo @el_pais @AFP @cruzrojacol @ONU_derechos @ONUcolombia @RevistaSemana @nytimes @Reuters @CNNEE @ElTIEMPO @elheraldoco pic.twitter.com/KuRqYkTPhv
— Luis Fernando Díaz (@LuisFDiaz19) November 5, 2023
« Notre angoisse croît à chaque seconde, chaque minute. Ma mère, mes frères et moi sommes désespérés, angoissés et sans mot pour décrire ce que nous ressentons. Cette souffrance ne prendra fin que quand nous l’aurons à nouveau à la maison », écrit le joueur, en invoquant « l’amour et la compassion ». Des valeurs que ses coéquipiers et le staff de Liverpool n’ont cessé de lui témoigner. Klopp a d’ailleurs rappelé que son but était « super important », mais que l’essentiel était ailleurs. La courte parenthèse du match refermée, Luis Díaz a retrouvé l’infortunée compagne qui le suit partout depuis le 28 octobre : l’attente. En espérant, comme le disent les paroles de You’ll Never Walk Alone, que le ciel soit doré à la fin de la tempête.
Par Quentin Ballue