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- Disparition de Louis Nicollin
Ludivine Diguelman : « Loulou disait souvent qu’on était ses filles, qu’on était intouchables »
Loulou Nicollin a été un précurseur du football féminin en France. Ludivine Diguelman, 12 ans et plus de 260 matchs avec le Montpellier Hérault entre 2001 et 2014, raconte son président. Sans gros mots.
Comment tout a commencé entre le football féminin et Louis Nicollin ?Il a été le premier président à investir dans une équipe féminine, en 2001. Moi, je suis arrivée en 1999 à Montpellier Le Crès et, deux ans plus tard, Nicollin a décidé de reprendre Le Crès pour fusionner avec Hérault. La première année, notamment, on le croisait régulièrement, car il faisait pas mal de réunions avec tout l’effectif pour expliquer les projets qu’il envisageait à long terme, tout ça. Il s’est avéré que ça a été une grosse réussite, et si aujourd’hui le foot féminin en est là, c’est en grande partie grâce à lui, c’est sûr. Il a été un précurseur.
Pourquoi s’était-il lancé dans l’aventure ?La Fédé avait imposé à tous les clubs pros de Ligue 1 d’avoir une équipe féminine. Lui a pris les choses à cœur et a décidé de monter le projet. C’était une obligation, mais elle n’était pas respectée. Pendant quelques années, on a été la seule équipe féminine représentative d’un club professionnel masculin, jusqu’à ce que d’autres clubs, comme Lyon, suivent. Il faisait toujours un peu le contraire de ce qu’on lui disait, mais sur ce coup-là, il a vu juste ! (Rires) On a eu la joie de lui apporter pas mal de titres, que ce soit en Coupe de France (trois titres, six finales perdues, ndlr) ou en championnat (deux sacres, trois positions de dauphines, ndlr). C’est une belle récompense pour lui.
Quelle importance attachait-il à son équipe féminine ?Pour lui, comme il disait souvent, on était ses filles, on était intouchables. Il criait bien haut et fort que c’était le premier président à avoir investi dans le football féminin. Chaque année, on avait la photo officielle au mas Saint-Gabriel, chez lui avec les pros. Pour Noël, il faisait venir le père Noël pour les petits et on était conviées. Chaque fois qu’il y avait des fêtes au mas, on était présentes alors que la CFA ou les équipes de jeunes, non. Et ça, je pense que ça montrait pas mal de choses sur la reconnaissance qu’il avait envers notre équipe.
Était-il aussi proche de ses joueuses que de ses joueurs ?Il était super avenant, il prenait les filles sur ses genoux pour faire des photos, c’était un peu un papa poule. Ce n’était pas du tout un président effacé. Il venait aux matchs importants, en Ligue des champions, en finale de coupe, ou alors il était représenté par son fils. À chaque fois qu’il y avait des grands événements, on pouvait compter sur lui, c’est sûr.
Avez-vous pu être choquée par ses déclarations ?Non, pas du tout. D’abord, il n’a jamais eu de propos déplacés envers nous. Ses propos chaotiques, c’était surtout des présidents, des entraîneurs ou des joueurs qui étaient visés. Mais que ce soit nous ou les filles d’autres équipes, on n’a jamais été vraiment concernées.
Et son vocabulaire ?On connaissait le personnage, on savait que c’était du Loulou, quoi ! Il ne fallait pas s’arrêter sur ça. De toute façon, il nous protégeait tellement qu’il ne se serait jamais permis d’avoir des propos ou des idées déplacés vis-à-vis de ses joueuses.
Quel souvenir en particulier garderez-vous avec lui ?Il y a en a plein. Je me souviens des quarante ans du club qu’on a fêtés chez lui, au mas Saint-Gabriel. Il avait organisé une fête géante avec tout le gratin, tous les anciens Pailladins. Et ça avait été une super soirée, une super journée. Ça, ça reste vraiment un grand souvenir. Après, forcément, je n’oublierai pas le titre de champion de France 2012 qu’on a pu fêter avec les joueurs, avec Loulou qui avait fait la Une des journaux avec sa crête aux couleurs de Montpellier. C’était lui !
Pour finir, un remerciement à lui adresser ?Je le remercie pour tout ce qu’il a fait pour le Montpellier Hérault, et pour l’équipe féminine en particulier. Sans lui, on n’en serait pas là, avec tous ces contrats fédéraux. Et puis le remercier pour toutes ces années que j’ai passées à ses côtés, je ne les oublierai pas…
Propos recueillis par Éric Carpentier