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Lucas, le dernier espoir

Par Mathieu Faure
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Lucas, le dernier espoir

Chaque saison, la même question : « Et si c’était l’année de Lucas ? » Acheté 42 millions en 2012, le Brésilien est dans la capitale depuis trois ans et demi avec toujours les mêmes interrogations sur son prix, son poste, son potentiel, son niveau, sa calvitie. Chaque année, on se remet à croire au numéro 7 parisien avec, dans un coin de notre tête, une lueur d’espoir. Et pourquoi pas ?

Les statistiques ne doivent pas servir de prisme unique pour juger l’apport réel d’un joueur. Prenons Lucas Moura, vingt-quatre ans, par exemple. Le Brésilien a disputé 178 matchs au PSG depuis son arrivée en janvier 2013. Pas tous comme titulaire, évidemment, mais avec, au final, une ligne de stats qui se respecte : 31 buts, 34 passes décisives. Soit 65 actions décisives, ce qui n’est pas rien pour un pestiféré. Car suivre un match sur les réseaux sociaux quand le Brésilien est sur le pré est la certitude de le voir se faire repeindre de haut en bas et de droite à gauche. Souvent avec les mêmes griefs : « LÈVE LA TÊTE » + « ACHÈTE-TOI UN CERVEAU » . En gros, Lucas Moura est un tout-droit qui ne va pas si vite que ça. Une sorte d’ailier qui passe son temps à rentrer à l’intérieur, qui ne sait ni déborder ni centrer. Une poule sans tête, en somme.

Pourtant, avec l’arrivée du bosseur Unai Emery, un bruissement a vu le jour : et si l’Espagnol arrivait enfin à driver le Brésilien. Et oui, pourquoi pas ? Pour l’instant, même s’il est passé au travers à Toulouse – comme beaucoup de ses coéquipiers –, le numéro 7 réalise un bon début de saison : 5 buts en 9 matchs, ce qui fait de lui la deuxième arme offensive derrière Cavani. Plus discipliné, plus en confiance, plus de temps de jeu, l’ancien joueur de São Paulo profite pleinement de l’arrivée du Basque sur le banc du PSG. Sous Laurent Blanc, le droitier avait perdu sa place au profit du trident Cavani-Di María-Ibrahimović l’an dernier quand Pastore, Lavezzi et un long séjour à l’infirmerie l’avaient privé d’une saison 2014-2015 de haut niveau. Au final, le garçon n’a pas encore livré une saison pleine et entière dans la capitale.

La concurrence ? Quelle concurrence ?

Sans régularité, difficile de prétendre à autre chose. Jusqu’à cette saison ? Avec le départ de Zlatan Ibrahimović et les arrivées de Ben Arfa et Jesé, Lucas s’est indirectement dégagé l’horizon. Pour l’instant, il est en avance sur le génial Français et le musical Espagnol. Plus régulier, moins blessé, plus à l’écoute, plus travailleur, il a tout pour plaire à Emery. D’ailleurs, en deux mois, on a la sensation que le joueur a – enfin – progressé tactiquement. Le jeu de possession prôné par Laurent Blanc ne correspondait pas vraiment à ses qualités premières (profondeur, vitesse, percussion). Au contraire, la touche Emery s’associe mieux à ses caractéristiques. Au revoir les longues sessions de redoublement de passes, voilà du pressing et des transitions nerveuses qui siéent sans doute mieux au joueur à condition qu’il bosse ce qui lui fait défaut depuis son arrivée dans la capitale : sa régularité. Passer d’un joueur capable de fulgurances à chaque mort d’évêque à une valeur sûre demande du temps et du travail. D’ailleurs, hasard ou pas, le joueur a raté deux matchs cette saison : Monaco et Toulouse. Deux défaites. À chaque fois, Emery l’a protégé, comme tout son groupe. Il y a peu, Laurent Blanc assaisonnait pourtant son joueur en conférence de presse pour son côté soliste : « Le foot se joue en équipe et Lucas doit le comprendre. Il doit aussi faire des progrès sur le plan tactique. »

Pelade et transition

Ce temps semble révolu quand on lit les déclarations de son coéquipier Thomas Meunier dans les colonnes de Goal.com : « Ce que j’aime, c’est son tempérament, le fait qu’il travaille pour l’équipe. Il défend beaucoup, il suit toujours son joueur et je ne dois jamais le replacer. C’est un très bon joueur, très complet. Techniquement, en un contre un, il est difficile à prendre et il va au duel malgré sa petite taille. » Bon soldat, en somme. Du genre à fermer sa gueule, même quand la sélection brésilienne le boude depuis bientôt deux ans, lui qui affiche 36 sélections ainsi que la même année de naissance que Neymar. Un mimétisme qui fait souvent dire aux suiveurs parisiens qu’ils ont acheté le mauvais Brésilien, mais aussi le mauvais Uruguayen. Et puis quand une calvitie se double d’une pelade à vingt-quatre ans (d’où son trou à l’arrière du crâne), cela n’aide pas au swag du garçon. Les « Champions, mon frère » ne peuvent pas servir de collier d’immunité éternellement, le terrain doit être le seul juge de paix.

Mais le cas Lucas est-il désespéré ? Sous Laurent Blanc, sans doute, oui. Avec Emery, pas nécessairement. L’homme a d’ailleurs repris l’entraînement avant les autres, cet été, pour se donner les moyens d’exister, conscient qu’il ne pouvait pas durer éternellement par intermittence. Récemment, toujours sur Goal.com, Lucas avait d’ailleurs montré un visage plus vindicatif. Comme si les critiques finissaient pas le piquer. « Beaucoup de personnes me critiquent parce que parfois je ne marque pas, mais pour moi le football s’analyse sur les 90 minutes. Sur le nombre de ballons que j’ai récupérés, combien d’actions où je suis impliqué se sont terminées par un but… pas seulement les passes décisives et les buts. » Mais c’est aussi un peu de sa faute. Pour l’une de ses premières sorties officielles avec le PSG, en février 2013, la nouvelle recrue de vingt ans avait littéralement fait exploser la défense de Valence au Mestalla pour son premier match de C1. C’était un 8e de finale aller, et Carlo Ancelotti n’avait pas hésité à lancer son ailier droit dans le grand bain. Un massacre pour les reins espagnols. Ce match a longtemps servi de jauge. Mauvaise idée, évidemment. C’est aussi pour cette raison que tout le monde est aussi exigeant envers le garçon : dans un bon soir, il peut faire des ravages balle au pied. Quand il sera aussi régulier sur le terrain qu’aimable en communication, il pourra sereinement retourner traîner sur les réseaux sociaux. Et le reste suivra. Comme Jacques Dutronc, les gens finissent toujours par retourner leur veste du bon côté.

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