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Luca 1er de Bavière
En trois saisons, Luca Toni a laissé une belle empreinte sur le Bayern, même s'il a dû repartir la queue entre les jambes. En dehors de sa flopée de buts, Toni le fou a surtout été le meilleur compagnon de jeu de Franck Ribéry et l'homme qui a réveillé le Rekordmeister. Parce qu'il voulait toujours être le premier.
« Avec Luca Toni, nous avons fait un transfert incroyable. » Alors que le Bayern vient pratiquement de s’offrir un doublé Pokal-Bundesliga, Uli Honeß ne manque pas de souligner son propre coup de génie. En quelques jours, avant l’été 2008, le buteur italien a inscrit trois doublés décisifs dans la course aux trophées des Munichois. Les onze millions investis pendant le mercato estival précédent sont largement rentabilisés. Le dernier de ces doublés est en finale de coupe, contre Dortmund. Ce jour-là, Toni inscrit deux buts de renard, à deux mètres du but. Ce sont les deux buts parfaits, les deux nécessaires : celui du 1-0 dans le temps réglementaire, puis du 2-1 dans la prolongation. Avec lui, ce Bayern retrouve ainsi sa culture de la gagne, celle qui ne lui fait connaître qu’une seule place sinon rien : la première.
Coup de foudre à Säbener Straße
En quête de renouveau offensif après une saison 2006/2007 manquée et pour compenser les départs de Claudio Pizarro – en fin de contrat – et Roy Makaay – de retour au pays –, le board du FCB se décide sur deux roublards : Miroslav Klose et Luca Toni. Les profils sont similaires, tous deux sont proches de la trentaine. Le duo est fait pour profiter des percées de Franck Ribéry, lui aussi nouveau venu sur les bords de l’Isar. Dès ses débuts, c’est de Luca Toni que l’Allianz Arena tombe amoureuse. Le grand Italien marque à chaque match. Le Hansa Rostock, le Werder, puis Hanovre encaissent. En tout, Luca Toni cumule 24 buts en 31 matchs de Buli, presque quarante sur l’ensemble des compétitions. Personne n’avait marqué autant pour une première saison en Buli. Mieux, il efface Gerd Müller en étant impliqué sur 26 ouvertures du score (16 buts et 10 passes dé). Les superlatifs d’Ottmar Hitzfeld sont forts, et évoquent Chapuisat et Riedle comme grands frères. « Avec sa taille et sa capacité de mouvement, c’est déjà phénoménal ce qu’il fait. » Plus que des propos, il suffit de se souvenir du match fou à Getafe pour comprendre comment Toni s’impose au Bayern. Lors de la prolongation, le FCB prend deux buts. Il reste cinq minutes à jouer. Il faut un miracle : Luca Toni sort de son trou et marque un but laid, mais précieux. À quelques secondes du coup de sifflet, Toni récidive et qualifie le Bayern. L’esprit de gagne qui l’anime vient de faire la différence, et il explique au Zeit en août 2008 son mode de fonctionnement : « Ce n’est pas beau de vouloir tromper l’ennemi. Mais c’est magnifique de tout faire pour que sa propre équipe gagne. » La Säbener Straße revit. Ses moments de folie et d’absurdité avec Ribéry, sur le terrain ou en dehors, font le reste pour sa popularité. Toni est tout simplement le numéro un à Munich, sans contestation.
Coup de froid
Cependant, dès l’été 2008, la lune de miel est terminée. En moins d’un an, le coup d’amour, le coup de je t’aime à l’allemande vire au mauvais roman. L’arrivée de Jürgen Klinsmann n’est pas une si mauvaise nouvelle pour l’Italien. Ce sont alors ses blessures récurrentes qui lui coûtent du temps de jeu, dont Miroslav Klose profite. Et même si Toni se place meilleur buteur du club en Buli – 14 buts en 25 matchs –, quelque chose ne va pas. Le Bayern ne gagne plus. Klinsmann est rapidement éjecté, Louis van Gaal doit prendre la suite… Et en quelques instants, les plans ont changé. Toni n’est plus indispensable. Pendant une nouvelle blessure de Luca Toni, le Néerlandais choisit un petit jeunot, Thomas Müller, fraîchement débarqué de la réserve. Interviewé sur la télé bavaroise, Toni ne réalise pas quand on lui demande si cela fait mal de voir un concurrent être aussi prolifique à sa place. Ce n’est que le mois de septembre, et le wagon bavarois vient déjà de tracer sa route sans l’Italien. Le champion du monde est relégué vers l’équipe B. Un statut qu’il n’assume que très temporairement seulement. Son salaire conséquent devient le sujet numero uno de la presse allemande. Peu importent les numéros de drague, le charme est rompu. Le Bayern veut se débarrasser de lui et l’envoie en prêt à l’AS Roma. L’espoir d’Uli Hoeneß est de trouver quelqu’un d’intéressé par le buteur en Serie A. « J’espère qu’il va marquer beaucoup de buts à Rome, et avoir une offre de contrat. » Six mois plus tard, il n’y a rien, mais le FCB ne tergiverse pas : le contrat est rompu – et le FCB lui paye ses vacances à Rome en attente d’un club, pendant six petits mois. Le tout ressemble à un divorce expédié après un mauvais mariage. Sûrement parce qu’avec les buteurs, en Bavière, l’amour ne dure que trois ans. Même pour le numero uno.
Par Côme Tessier