- France
- Disparition de Louis Nicollin
Loulou, oui, c’est lui
Il était succulent, grossier, unique, authentique, caustique, inoubliable, collectionneur, punchlineur, épicurien. Louis Nicollin, dit Loulou, s’est éteint le jour de son anniversaire lors d’un repas. Une mort à son image. Celle d’un président hors norme, amoureux de football et de son club, Montpellier, qu’il aura construit et amené au sommet du football français.
Cette photo restera celle qui le caractérise le plus. Cette gouaille, ce nez, ce regard, cette crête, cette casquette à l’envers et cette teinture aux couleurs du club. 2012, Montpellier vient de devenir champion de France devant le PSG de QSI. Loulou Nicollin se lâche. Il est au sommet et se montre comme il est, en môme. Avec lui, pas de filtre, pas de tabou. Il est grossier, drôle, impertinent, parfois à la limite quand il traite Benoît Pedretti de petite tarlouze ou quand il embrasse Michel Mezy, son compagnon de toujours, dans une étreinte folle un soir de victoire.
Nicollin a pris la présidence de Montpellier en 1974. Le MHSC était en DH. Autrement dit, personne. Il aura ramené sa Paillade en Europe, de quoi se « poignarder le cul » comme il aimait le dire. Sous sa direction, le club du 34 aura vu jouer des bonhommes, mais aussi des artistes : Cantona, Paille, Valderrama, Milla, Di Nallo, Júlio César, Blanc, Rust, Giroud, Belhanda, Ziober. Le MHSC, c’était lui. Un club sorti de nulle part qui se permet le luxe de défier Manchester United en C2 quand les autres clubs français peinent à briller sur la scène européenne. Alors oui, dans un monde où plus personne ne dit rien par peur de choquer, Nicollin ne se gênait pas, il balançait. Parfois pour piquer au vif, parfois pour faire la une, mais souvent par amour de son club. Car c’était son club, son argent, son amour.
Verbe haut et voix rauque
Collectionneur de maillots hors pair, il avait toujours été proche des puissants. Parce que Loulou connaissait le football. Aimait le football. Vivait le football. Il aurait pu mourir sur la pelouse, c’est vrai, mais il a préféré partir autour d’une bonne assiette. Ça lui ressemblait. Il avait le verbe haut, la voix rauque, la gueule abîmée, mais il ne laissait personne indifférent. C’était un président atypique. Loin des standards d’élégance ou de bonne tenue. Sans doute un peu dépassé sur la fin, qui ne le serait pas à 74 ans après plus de 40 ans de service ? Mais jusqu’au bout, il aura maintenu son club à flot, rendu fier son centre de formation – une vraie réussite – et permis au football féminin de prendre son envol aussi.
Parce que Nicollin, derrière sa gueule cassée et son sens de la formule à la Audiard, était un visionnaire. Un précurseur. La Ligue 1 perd un grand monsieur. Elle perd des phrases drôles, un peu de folie, mais surtout beaucoup d’humanité. Car le football populaire, c’était lui. Lui, c’était Loulou. Adieu Loulou, tes saillies verbales vont nous manquer. Parce que Loulou, c’était ça : « Mes joueurs, je les paie plus cher que mes maîtresses. Et mes maîtresses au moins, elles me régalent la chique. » Loulou, tu nous as régalés. Sache-le.
Par Mathieu Faure