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Louhans Cuiseaux-Jura Sud, le match qui aura duré 52 secondes
52 secondes. C'est le temps qu'aura duré la rencontre entre Louhans-Cuiseaux et Jura Sud dimanche dernier en National 2. Un scénario digne d'un match de district, rendu possible par la Covid-19. Fortement touché, le club jurassien s'est vu contraint de faire le déplacement avec les huit seuls joueurs disponibles qu'il avait sous la main. Avant de tomber au combat, en 52 secondes, donc.
« À partir du moment où ils n’ont que huit joueurs et qu’ils ne s’échauffent presque pas, on comprend qu’il va se passer quelques chose. » Christian Ragaigne, président de Louhans-Cuiseaux, n’en revient toujours pas. Dimanche, c’est avec une équipe plus que diminuée par la Covid-19 et les blessures que son adversaire du jour se présente au parc des sports du Bram, pour disputer la quatrième journée du groupe C de National 2. Le match ne durera que 52 secondes, le temps pour Mamadou Danfa de se blesser du côté des visiteurs et pour M. Brotons, arbitre de ce triste spectacle, d’interrompre la rencontre par manque de main-d’œuvre.
52 secondes pour l’histoire
Cet imbroglio prend ses racines en tout début de saison. Touché par le coronavirus, le club de Jura Sud voit ses installations fermées pendant deux semaines par précaution, l’empêchant de s’entraîner. Une situation qui aboutit au report de ses trois premières rencontres par la FFF. Autorisés à reprendre l’entraînement vendredi 4 septembre, les Bourguignons estiment ne pas être en mesure de jouer dès les jours suivants, et demandent un nouveau report. Cette fois, la Fédération refuse.
« On nous a donné l’obligation de jouer deux jours avant. À partir du moment où on a fermé quinze jours, ce n’est pas possible de pouvoir s’entraîner collectivement. C’est vraiment tout le club qui a été concerné, y compris chez les jeunes », précise Edmond Perrier, le président jurassien. Résultat des courses, c’est avec seulement huit joueurs que l’équipe parcourt dimanche après-midi les 80 kilomètres qui séparent les deux villes, dans le but, surtout, de ne pas choper de points de pénalité après un forfait. « On y est allés avec les joueurs qu’on avait à peu près d’aplomb, se justifie encore le président. On ne pensait pas gagner ni même faire match nul, mais on ne pensait pas que le match allait durer aussi peu de temps. »
« Si le résultat de l’appel ne nous convient pas, on ira plus loin »
Edmond Perrier ne comprend pas comment on a pu en arriver là. « C’est difficile d’accepter d’avoir un match 24 ou 48h après la réouverture. On attendait encore les tests, on a eu cinq joueurs positifs samedi, donc on a demandé le report à la FFF, détaille-t-il. Ils ont décidé que non, ce n’était pas possible. Ils nous ont dit qu’il fallait quatre nouveaux cas. » Finalement, la Fédération laisse aux deux clubs la responsabilité de se mettre d’accord sur une date dans la semaine, mais reste ferme : le match doit avoir lieu. Ce sera finalement le dimanche à 18h.
Arrêtée puisqu’il n’est pas possible pour une équipe de jouer avec seulement sept joueurs sur le terrain, la rencontre a donc été déclarée perdue pour Jura Sud. Dans l’incompréhension face à la décision de la Fédé de lui imposer de jouer malgré cette situation, le club aux dix-huit saisons consécutives dans la division – un record – a décidé de faire appel. Et Edmond Perrier prévient : « Si le résultat de l’appel ne nous convient pas, on ira plus loin. L’équité sportive n’est pas respectée, on nous a obligés à fermer nos installations. Aujourd’hui, le PSG, ils ont des cas, et leurs installations ne sont pas fermées. »
Une action et puis s’en va
Le tout donnera finalement lieu à un après-midi rocambolesque dans la Saône-et-Loire. Côté Louhans-Cuiseaux, la surprise est totale avant le coup d’envoi. « On ne savait pas du tout avant. On a trouvé bizarre qu’ils n’arrivent qu’une heure et quart avant le match », rejoue Christian Ragaigne, qui réfute toutefois l’idée d’une adaptation de la part de son camp devant la situation. « Non, ça n’a pas changé du tout notre façon d’aborder le match. Nous, ce qu’on veut à ce moment-là, c’est gagner. Le coach n’a eu de cesse de remettre les joueurs dedans, il était trop tard pour faire quelque chose. » Comprenez : aucune modification tactique n’a été mise en place malgré une supériorité numérique de trois joueurs pour 90 minutes.
Dans un tel contexte, difficile d’imaginer un combat acharné entre les deux écuries pour le public venu garnir les gradins. « Il n’y a pas eu de match, simplement une petite action et un garçon qui s’écroule, peste-t-il encore. On a fait une action vers leur but, leur goal a récupéré le ballon, a fait la passe à un joueur, il y eu une autre passe, et le deuxième joueur s’écroule. » Rideau. Les hommes de Pascal Moulin reprennent la route, laissant derrière eux stupeur et incompréhension. « Comment voulez-vous, avec un entraînement le vendredi et un le samedi, que les joueurs soient aptes à jouer un match de championnat le dimanche ? interroge Edmond Perrier. Ce n’est pas terrible pour le spectacle, mais on n’y peut rien. » Le spectacle, justement, sera assuré par les joueurs de Louhans, qui offriront finalement à leurs supporters un match d’entraînement en guise d’exhibition.
Cité par la @FFLose , on peut mourir tranquille, enfin le plus tard possible https://t.co/Rl60R51rW0
— Jura Sud Foot (@JuraSudFoot) September 9, 2020
Se pose désormais la question de la suite de ce début de saison improbable pour Jura Sud, qui s’attend à jouer tous les trois jours pour rattraper ses matchs en retard. Prochaine étape dès samedi contre Aubagne. Edmond Perrier espère que les choses vont rentrer dans l’ordre : « Je ne vois pas pourquoi on ne pourrait pas jouer. Après, il va nous manquer encore des joueurs. » Mais ce à quoi il aspire par-dessus tout, c’est voir son équipe enfin lancer sa saison. « Qu’on nous laisse nous préparer et jouer nos matchs, espère-t-il. Aujourd’hui, avec cinq cas, on ne sait pas si l’Association régionale de santé (ARS) ne va pas venir et fermer nos installations. » La menace du retour à la case départ continue de planer.
Par Tom Binet