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LOSC, l’heure de boire au culot
Opposé à Chelsea mercredi soir, le LOSC a l'occasion de lancer pour de bon sa saison européenne et de corriger ses erreurs d'Amsterdam. Pour ça, Galtier ne demande qu'une chose à ses hommes : une réponse par le jeu.
Un jour, Victor Osimhen, jeune porte-flingue de 20 piges qui avoue venir d’un « endroit qui ne vous offre pas de promesses » , est sorti d’un bar en furie à cause de John Terry. C’était en 2008, le 21 mai pour être précis, et la fuite de l’actuel attaquant du LOSC, six buts plantés en 700 minutes de Ligue 1, s’était bouclée par une porte dans la gueule. « Lorsque je vivais à Olusosun (un quartier très pauvre de Lagos, au Nigeria, qui abrite entre autres l’une des plus grandes décharges du monde, N.D.L.R.), je regardais la Ligue des champions, explique-t-il cette semaine à France Football. Je me souviens d’un Chelsea-Manchester United en finale. Je n’étais pas particulièrement pour l’un ou l’autre. Mais quand Terry a loupé son tir au but… J’étais tellement énervé que je suis sorti en courant du bar. Une femme a ouvert la porte en même temps. Bam ! Je me la suis prise en pleine tête. J’ai beaucoup saigné, ma paupière était ouverte… Pendant qu’on me faisait les points, je me suis dit : « Si je ne deviens pas professionnel avec la passion que j’ai pour ce sport, je ne me le pardonnerai jamais… » La route a été longue. »
Elle a mené le buteur lillois en Allemagne, en Belgique et en France, donc, où Osimhen n’aura eu besoin que de quelques semaines pour devenir indispensable à un secteur offensif lillois devenu quasi dépendant de son efficacité. Si dépendant que la chose a agacé Christophe Galtier samedi dernier, à Nice, où le LOSC a ramené un bon nul (1-1), mais a aussi pioché dans le dernier geste. Tellement qu’après la rencontre, Galtier a allumé : « J’ose espérer que mes joueurs ne se reposent pas uniquement sur Victor. On a joué pour jouer, on n’a pas joué pour gagner. Et ça m’agace. On n’arrive pas à être chirurgical, il faut qu’il y ait une prise de conscience. Mes joueurs doivent penser que l’action que l’on rate va se représenter. Mais au haut niveau, ce n’est pas forcément le cas. » Le haut niveau, voilà justement où Victor Osimhen nage aujourd’hui à l’heure où le LOSC s’apprête à bastonner avec Chelsea et où le fameux bar d’Olusosun se remplit désormais pour le voir s’agiter sur gazon géant.
Le culot du LOSC, l’empreinte de Lampard
Le haut niveau, voilà aussi ce que le LOSC version Galtier a pris en pleine poire le 17 septembre dernier, à Amsterdam. Avec violence : trois buts encaissés et aucun marqué malgré plus de tirs tentés (17 contre 15 pour l’Ajax). Avant la rencontre, le coach français rêvait pourtant à haute voix de voir la Ligue des champions « transformer » ses hommes. Résultat : il en était reparti avec une leçon d’efficacité dans les chaussettes. « Pendant les 20 premières minutes, on a été très timides, avait-il alors soufflé. On n’a pas joué dans les intervalles proposés, on a fait beaucoup d’erreurs techniques. On a donné à l’Ajax la possibilité de nous étouffer. On n’était pas venu pour apprendre, mais pour faire une performance avec du culot. Malheureusement, on n’y est pas arrivés. On va travailler sur ce qui n’a pas fonctionné. Défensivement, on a été très tendres. Là est la différence entre la Ligue 1 et la Ligue des champions. »
Face à l’Ajax, le LOSC avait notamment été pris à plusieurs reprises entre ses centraux et ses latéraux (Ziyech a trouvé à plusieurs reprises Dest entre Gabriel et Bradarić là où, de l’autre côté, Çelik a souvent été abandonné par Renato Sanches). Galtier l’a noté et en a reparlé mardi : « On a essayé de corriger ça via les matchs de championnat. On sait que Chelsea peut aussi nous faire mal dans ces intervalles, il faudra leur laisser le moins d’espaces possibles. » Cela passera par un pressing mieux coordonné qu’aux Pays-Bas et un bloc plus compact, d’autant que Chelsea excelle dans le cœur du jeu grâce à « un triangle qui se déforme souvent et de nombreux joueurs placés à l’intérieur, qui peuvent exploser rapidement » . Cela s’est encore vu samedi lors de la victoire des Blues contre Brighton (2-0), où Frank Lampard a vu sa troupe arracher son premier clean sheet de la saison – le premier de Chelsea depuis un Leicester-Chelsea (0-0) joué en mai dernier – et confirmer qu’elle se transforme vite et bien. Oui, Chelsea n’est peut-être que septième de Premier League pour le moment, mais Chelsea mûrit, et Lampard a déjà posé son empreinte : ses Blues sont plus imprévisibles que ceux de Sarri et Conte, plus agressifs, prennent plus de risques – ce qui explique aussi qu’ils prennent beaucoup de buts pour le moment (17 toutes compétitions confondues) – et ne proposent rien d’autre que du rythme, en permanence. Autre danger pour le LOSC : Lampard déboule à Lille avec l’obligation de s’imposer, comme Galtier, après la défaite de ses gars au Bridge face à Valence (0-1) lors de la première journée.
« En C1, il faut jouer, sinon… »
Christophe Galtier sait ainsi ce qui l’attend mercredi soir et ne demande qu’une chose à ses joueurs : « Jouer, jouer et jouer. En C1, il faut jouer, car si tu ne joues pas, tu n’as aucune chance. Si ton équipe passe son temps à subir, le talent fera la différence. Il n’y a rien de plus frustrant que de ne pas jouer. » On se dit, de toute manière, que ce LOSC-là ne sait rien faire d’autre, qu’avancer positivement est dans son ADN et que si les Nordistes écrasent leur appréhension, un gros coup est possible. Pour ça, il faudra contrôler le fameux « triangle » des Blues, au cœur duquel Jorginho revit depuis l’arrivée de Lampard, qui lui donne davantage de liberté. « Avant, tout était centré sur l’équilibre de notre jeu et, vu ma position, il était important que je le maintienne, glissait l’international italien il y a quelques semaines. Maintenant, je peux quitter mon poste plus souvent, me rapprocher du but adverse, exploiter ma créativité. »
Préservé ce week-end et blessé lors du match contre Valence, N’Golo Kanté devrait également revenir dans le onze et s’installer aux côtés de Kovačić, à moins que Lampard ne décide de laisser le brillant Mason Mount, comme face à Brighton, en position de relayeur. Comment gêner cette équipe qui vit, qui a déjà construit de nombreux circuits offensifs, qui se procure une multitude d’occasions et qui commence à se solidifier défensivement ? Galtier possède deux options tactiques dans sa poche : le 4-4-2 (avec une doublette Rémy-Osimhen), vu contre Strasbourg, mais mis en échec à Amsterdam, ou un 4-2-3-1 plus classique, où Araujo pourrait partir titulaire côté droit après sa nouvelle belle performance du week-end. Et une obligation : s’interdire les trous d’air aperçus en championnat contre Angers ou par séquences à Amsterdam. L’heure n’est plus à l’observation, place à la dégustation.
Par Maxime Brigand, à Lille