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Lopetegui, la révolution tranquille
Intronisé entraîneur de Porto en fin de saison dernière, Julen Lopetegui connaît sa première expérience dans une Première Division européenne. Pour ses débuts, l'ancien sélectionneur espagnol espoir a pour mission de mener à bien la révolution culturelle et footballistique du géant portugais.
« Nous allons vous raconter tous les secrets du Mondial 2006. Un Mondial durant lequel l’Espagne… » Les quatre fers en l’air, Julen Lopetegui ne peut terminer sa phrase. En direct sur le plateau de la Sexta, cet ancien portier devenu consultant tombe dans les vapes face caméra. Cette chute l’a même rendu célèbre en dehors des frontières espagnoles. Profitant de son évanouissement, l’agence de communication Shackleton le détourne pour en faire une campagne. Mieux, elle remporte le prix d’Agence de l’année remis lors du Festival international de publicité de Cannes. Enfin, Julen Lopetegui est en lumière, lui, le gardien passé par le Real Madrid et le FC Barcelone qui n’a jamais squatté les Unes des médias espagnols. Après des années passées dans les arcanes de la Fédération espagnole où il s’est occupé des sélections de jeunes, il a pris les commandes du bateau des Dragões l’été dernier. Une rupture aussi bien pour l’intéressé que pour le FC Porto, marqué par le sceau mourinhesque depuis plus d’une décennie. À l’heure d’affronter Bâle, retour sur la révolution tranquille et coordonnée d’un entraîneur et de son nouveau club.
Vazquez : « Un travail formidable à la Fédération »
L’histoire de Julen Lopetegui coach s’entame là où se termine celle du Lopetegui joueur : au Rayo Vallecano. Dans le quartier ouvrier de Madrid, il ne fait pas long feu et est débarqué quelques semaines après son intronisation. Après une courte expérience de consultant, il est nommé chef des scouts internationaux du Real Madrid. L’année suivante, en 2008, il prend du galon dans l’organigramme blanc et squatte la guérite du Castilla. Ce cheminement lui permet de connaître le système de formation et de recrutement des jeunes pousses. Grand pédagogue, il est alors recruté par la Fédération espagnole. Tour à tour, il suit la génération de Koke et Thiago Alcántara, des U19 au U21, avec laquelle il remporte de main de maître l’Euro 2013. Reconnu par tous dans le monde fédéral, il ne fait pourtant fantasmer aucune écurie de Liga. « Le marché des entraîneurs est complexe, surtout en Espagne où il y a une multitude de techniciens, confirme Martín Vázquez, son ancien coéquipier merengue. Tu peux être un très bon coach, reconnu par tes pairs, et ne voir aucune offre sur ton bureau. C’est le cas de Julen, qui a fait un travail remarquable avec les sélections de jeunes. »
Le FC Porto, ses 27 titres de champion et ses deux Ligues des champions pointent alors le bout de leur nez. Pinto da Costa, grand artisan de cet amas de trophées, souhaite plus que des changements : il met en place une révolution. Lorsque le natif d’Asteasu débarque en mai dernier sur la côte Atlantique portugaise, il découvre « un projet où le club veut créer une manière de comprendre le jeu » . Surtout, ce nouveau projet marque la fin de l’ère Mourinho. Troisième de la dernière Liga Sagres, synonyme d’échec, le club doit se réinventer pour continuer à jouer dans la cour des grands. Toujours dans les colonnes du Pais, Julen Lopetegui poursuit : « Pour cela, 16 nouveaux joueurs ont été recrutés. C’est l’équipe la plus jeune de l’histoire de Porto, avec une moyenne d’âge de 24 ans. Cela rend le projet très attractif, un très grand défi » . Ainsi, la direction du club répond à ses attentes et recrute du jeune Espagnol ou passé par la Liga. Oliver, Adrian, Tello, Brahimi, Casimero et José Campaña viennent garnir les rangs de Porto.
Changement culturel pour Porto
Avec un effectif en adéquation avec ses idées footballistiques, Julen Lopetegui réussit une superbe phase de poules en C1 et pointe actuellement à quatre unités du leader de Liga Sagres, l’éternel rival qu’est le Benfica Lisbonne. Surtout, il brise les préceptes tactiques en place depuis le passage de Mourinho de 2002 à 2004. « Je veux que mon équipe sache tout bien faire, entame-t-il. Cela te mène à attaquer et défendre mieux à chaque fois. Presque tout le temps, on donne pour acquis que les joueurs comprennent totalement le jeu, mais ce n’est pas comme ça. Je crois que quand tu joues, tu comprends peu de choses. Et je m’inclus là-dedans. Ce n’est pas facile de donner des solutions différentes à des difficultés différentes. La richesse de ton équipe dépend des solutions que savent donner tes joueurs. » Pour que « la possession ne devienne pas un défaut » , il a également ramené dans ses filets un staff 100 % espagnol qui a fait des séances vidéos son obsession. Ce changement culturel et footballistique n’est pas forcément gage de succès. D’autant plus que Julen Lopetegui a fait de la chute sa spécialité.
La fameuse chute de Lopetegui
Par Robin Delorme, à Madrid