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Looking for Momo

Par Valentin Lutz
7 minutes
Looking for Momo

Il s'appelle Momo, il joue attaquant de pointe, en Ardèche, dans l'équipe des vétérans du Foot Loisirs 1994. Jusque-là, rien de bien étonnant. Oui, mais voilà : Momo a 80 ans. Pas de quoi empêcher ce retraité encore bien fringuant de tâter le cuir, tous les jeudis, de marquer quelques buts et d'imiter le King Cantona lorsqu'il fait trembler les filets. Pas un hasard pour un homme qui, au fond, n'a jamais vécu bien loin des terrains.

« Lorsque je parle du club autour de moi, la première chose que j’évoque, c’est Momo. » Quand il évoque le Foot Loisirs 1994, l’association de foot dont il gère la communication en Ardèche, Arnaud Imberteche ne s’y trompe pas. Et pour cause, la star de son équipe, un attaquant de pointe qui plus est, a quelque chose en plus que les autres joueurs du coin : 80 années au compteur. Car oui, à huit décennies passées, Momo Tenafer continue à jouer au foot, et ce, avec des coéquipiers qui ont la moitié de son âge. « Je suis quand même un peu fier de jouer encore contre les jeunes, lâche le principal intéressé. Bon, si je fais un crochet, ils ne me taclent pas et si je passe, ils me suivent, mais sans plus. » Rien de bien étonnant pour ce retraité, encore capable de courir cinq ou dix kilomètres en une sortie, qui n’a jamais traîné trop loin des terrains de la région. Certes, mais quand même : comment expliquer une telle longévité, bon sang ?

Chaban-Delmas, Traction avant et verre de gnôle

À l’origine, le foot n’a pas toujours été au cœur des priorités de la mascotte du Foot Loisirs 1994. Né en Algérie en 1940, Momo passe sa jeunesse loin des terrains. « Quand j’avais seize ou dix-sept ans, on était un peu pauvres, donc on n’avait pas toujours l’occasion de jouer. Et en plus, je travaillais, je ne pouvais être au four et au moulin.(Rires.) » La situation ne change pas vraiment lorsque Momo débarque en France, en Ardèche, il y a 57 ans, le 27 avril 1964 précisément. « Il est arrivé avec toute l’immigration des années 1960, replace son fils, Eric, lui aussi joueur au Foot Loisirs 1994. Avec une promesse d’embauche, un contrat de travail, sans même parler la langue, mais il s’est intégré très vite. » Dès lors, c’est une vie de travail qui s’ouvre. « J’ai fait manœuvre six mois, et ensuite, je suis devenu chauffeur d’un camion de goudronnage jusqu’en 2007. Soixante-six ans de travail. » Quant au ballon rond, il n’arrive à Momo que rarement, au gré des occasions, parfois un peu dingues. « Le premier vrai match que j’ai joué, j’avais 24 ou 25 ans, et c’était au stade Chaban-Delmas, se rappelle-t-il. J’étais à l’armée et on est tombés contre les paras de la légion étrangère. (Rires.) On a fait deux matchs, on a tout perdu. À partir de ce moment-là, j’ai toujours joué n°7 ou n°11, parce j’étais rapide : à l’armée, on m’appelait « Traction avant ». Maintenant, c’est le contraire.(Rires.) »

Momo se met vraiment au foot en 1965, à Privas. Puis ses fils Jean-Luc et Eric se mettent eux aussi à tâter le cuir. « Le samedi, il nous amenait au foot, et le dimanche, on allait le voir jouer, se souvient Éric. À la mi-temps, en hiver, ils prenaient tous un verre de gnôle. C’est simple : pendant 35 ans, on a fait nos repas de famille en fonction du foot. » Lorsqu’Éric devient arbitre et que Jean-Luc dit stop, Momo arrête sa carrière. Le vrai déclic intervient à la quarantaine, lorsqu’un jour, Momo se met à saigner de la bouche. « Il ne faisait pas beaucoup de sport et il fumait, donc il a pris peur : c’était juste un problème de gencives, mais il a arrêté de fumer et il s’est vraiment mis au foot. » Ici et là, pendant quelques années, et enfin, au Foot Loisirs 1994, où il évolue depuis une vingtaine d’années. Sur le terrain, aujourd’hui, Momo n’a plus forcément les cannes : pour s’adapter, il s’est donc replacé… en pointe. Arnaud justifie : « On lui dit d’aller dans son carré devant le but et quand il en a l’occasion, il essaye de marquer : soit il la dévie à peine, soit il fait une talonnade, qui est tout sauf une talonnade.(Rires.) » Et quand il fait trembler les filets, la fierté de Momo se réveille. « Il prend un peu l’air de Cantona, il fait le King, continue Arnaud. Il se met à marcher le menton haut et s’il avait un col, il le relèverait. » C’est aussi que Momo veut toujours gagner. « C’est un gros problème, rigole son fils Éric. Même au tiercé, je le vois quand il y a des courses en direct : « Oh putain, oh putain, il fait quoi celui-là ? »  » Une obsession du succès obsédante, qui touche même sa petite-fille. Elle a repris le flambeau et joue au foot en district : « Je vais la voir parfois, mais sa mère n’aime pas que j’y aille… Elle me dit que je gueule trop.(Rires.) »

Survêt’ et baskets, dieu vivant et célébrité locale

Alors, comment expliquer cette improbable longévité ? Impossible pour son fils Éric. « Vu son hygiène de vie, je ne comprends pas du tout. Quand il y a un apéritif, c’est pas le dernier. Il mange sucré, salé, et il n’a pas un pète de gras. » Autre explication : Momo s’entretient. « L’été, il fait son footing au bord de la route. Comme les pros, il a son programme d’entraînement. » Cela dit, aujourd’hui, Momo ne court plus autant. « Ça fait un an que je me suis arrêté de faire des footings : quand je cours, cinq ou dix kilomètres, il y a des montées et ça me bloque le dos. » Alors, les jambes le démangent. « Quand on fait des matchs, je veux rester, je veux courir. Mais Arnaud me dit qu’il ne veut pas me ramasser à la cuillère. » Le bourreau s’explique : « Il faut prendre des précautions, parce qu’on a tous entre 35 et 45 ans. Et donc des fois, tu t’emballes un petit peu et il ne faudrait pas qu’il soit dans ton dos sans que tu l’aies vu. » Pour écluser son excitation, Momo s’occupe toujours. Pas du genre à rester chez lui devant Questions pour un champion, il alterne bricolage, coup de tondeuse et virées à droite à gauche au volant de sa 205. À tel point que son fils ne lui connaît qu’un seul style vestimentaire : « Il est toujours en survêtement et en baskets. À Noël, on sait quoi lui acheter : la dernière paire de chaussures de foot. Mais une paire pour synthétique, il faut pas se planter ! (Rires.) »

Du haut de ses 80 balais, Momo est naturellement devenu la mascotte du Foot Loisirs 94. « C’est leur dieu ! s’anime son fils. Quand il n’est pas là, tout le monde vient me demander ce qu’il se passe. Malgré son caractère, tout le monde l’adore. C’est le football comme on aime : il n’y a plus d’histoire d’âge, on rigole juste. » Arnaud poursuit : « C’est pour tout cela qu’on a tourné le personnage en dérision et qu’on en a fait notre mascotte. Ça le fait rire, mais je ne pense pas qu’il se rende compte de la portée, ne serait-ce qu’à l’échelle locale. » Car oui, dans le coin aussi, Momo est bien connu. Et pas que pour le foot. Car à l’époque où il travaillait dans le goudron, Momo avait le « camion le plus propre de la région », à en croire son fils Eric. Surtout, « tout le monde l’a déjà vu au bord d’un terrain de foot du district, remet Arnaud. Même si tu ne lui as jamais parlé, tu sais qui est Momo. » Et ce n’est pas demain la veille que Momo quittera le pré du Foot Loisirs 94. « J’ai peur du jour où on lui dira d’arrêter, lance Éric. Mais s’il arrête de jouer un jour, je suis sûr qu’il viendra nous voir le jeudi soir… Et pourtant, c’est pas beau ce qu’on fait… »

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Par Valentin Lutz

Tous propos recueillis par VLU.

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