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L’OM peut-il être champion ?

Chérif Ghemmour
7 minutes
L’OM peut-il être champion ?

Évidemment. Pas du tout. Ben, oui. Certainement pas. Possible dès cette année. Peut-être. Pas cette année. Ça dépend. Yes, indeed. Niet. Bien sûr. T'as fumé ?

Avant d’explorer l’hypothèse la plus courue, à savoir un duel OM-PSG, considérons que si Paris se ratait cette saison, alors d’autres challengers en plus de Marseille pourraient eux aussi viser le titre : Lyon, Sainté ou Monaco. L’OL est bel et bien dans la course (2e à deux points du leader marseillais, 41) : les Gones marquent beaucoup (meilleure attaque avec 40 pions), ne jouent ni l’Europe ni la Coupe de la Ligue, et ils récupéreront Grenier, Fofana et Yoann « J’ai mal » Gourcuff. Donc, Lyon peut aussi le faire. Mais aujourd’hui, on insistera sur l’affrontement entre Lutèce et Phocée, l’Antico plutôt que le Classico… Maintenant, plantons le décor : Bielsa y croit, Blanc doute. Car puisque tout est d’abord question de leaders, on voit bien que même si Marcelo ne parle jamais de titre, il vit chaque match avec intensité comme une étape qui le rapproche de la consécration. La dynamique marseillaise, c’est bien lui, et il trace la voie vers les sommets.

Mais le charisme de Bielsa s’arrête à un constat toujours d’actualité : sportivement, Paris est meilleur et reste favori. Après tout, même médiocre, le PSG n’est qu’à trois points du leader (38 contre 41). Du coup, il faudra que Paris s’écroule ou se manque par moments pour que l’OM soit sacré. Mais la vérité, c’est que le PSG s’est déjà écroulé… Paris n’avance plus, ne fait plus peur et il aura peu de temps lors du stage à Marrakech pour se refaire le physique qui lui manque tant. Outre la position fragilisée de Lolo Blanc et la défaillance des leaders (Cavani, Zlatan et les deux Thiago), le PSG risque d’exploser en cas d’élimination précoce en C1, en février-mars contre Chelsea. Ce Paris qui ne jure que par la Champions League peut sombrer dans la décompression en ne sachant plus se motiver à ne plus jouer « que » la Ligue 1. Et là, la voie serait libre pour ses challengers, l’OM le premier… Mais on n’en est pas là. Alors essayons de retenir d’autres critères qui accréditeraient la thèse de voir Marseille champion.

Occasions de buts à foison

L’OM ne joue pas l’Europe, ni la Coupe de la Ligue, et la CAN ne le privera que de Nkloulou et André Ayew. Deux joueurs importants, certes, mais qui peuvent être remplacés. Le cas Brice Dja Djédjé est encore en suspens. Voilà pour un programme plus allégé que ceux du PSG ou de l’AS Monaco en deuxième partie de saison, avec seulement la Coupe de France en plus du championnat. Les stats parlent aussi en faveur des Provençaux : ces dix dernières saisons, le champion d’automne a fini champion sept fois sur dix. L’OM a certes perdu contre trois gros (PSG, OL et ASM), mais il les accueillera dans un Vélodrome qui bat tous ses records d’affluence (62 408 contre Lille, 2-1). Très important le public, selon Anigo dans L’Équipe du 19 décembre : « Je crois au titre. Je sais que si l’OM est toujours bien placé en mars, il y a cette capacité à Marseille pour lancer le sprint, grâce à l’ambiance autour du club. Ça peut porter l’équipe jusqu’au bout. »

Mais c’est surtout le jeu pratiqué qui est le meilleur garant d’un véritable succès final. Plus que les buts marqués (2e attaque avec 38 buts), ce sont les occasions de buts à foison qui impressionnent. Cette certitude que Marseille peut marquer à tout moment et qui agit d’abord sur le mental des adversaires comme une arme psychologique. L’OM est bien doté aux extrémités avec Gignac devant et surtout avec un Mandanda revenu à son meilleur niveau (pas de titre sans un très bon gardien). Malgré des signes évidents de fatigue et de matchs récemment moins maîtrisés, l’OM parvient à toujours maintenir la pression sur l’adversaire. Enfin le groupe « vit bien » et l’équipe de France et l’Euro 2016 boostent Gignac et Payet qui jouent tout simplement leur vie en bleu cette année : les places seront chères, alors autant tout donner dès la reprise, et ce, jusqu’au 23 mai…

L’OM rame derrière…

Quels sont les handicaps ou faiblesses qui peuvent empêcher la consécration phocéenne ? Marcelo Bielsa. Le type est génial et charismatique, ça on le sait. Mais on sait aussi que son caractère intransigeant doublé d’une exigence telle au boulot peuvent finir par lasser, par user le groupe. Les durs entraînements faits d’exercices très répétitifs ainsi que les longues séances vidéo finiront par peser. D’autant plus que les joueurs sont soumis à ce régime depuis le 20 juin dernier, ce jour où ils furent les premiers de L1 à reprendre le collier. Le mini clash Bielsa-Payet n’avait donc rien d’anecdotique et il a rappelé qu’à Bilbao, le message et les méthodes d’El Loco avaient fini par ne plus trop passer. Les Olympiens doivent bien comprendre que Bielsa ne desserrera jamais l’étreinte et qu’ils vont en baver jusqu’à la dernière journée. Tant que les victoires suivront, tout ira bien, voire très bien.

Mais en cas de mauvaise passe, on demande à voir… Dans le jeu, il manque toujours à l’OM une dimension essentielle de la maîtrise collective : la possession-circulation lors des temps faibles. Celle qui fait la force des grandes équipes, tel le PSG de l’an dernier. À la vérité, Marseille a fait très récemment des progrès intéressants, mais pourtant passés inaperçus dans ce secteur de jeu crucial. C’était contre Monaco, en deuxième partie de première mi-temps : après son début de match canon habituel, l’OM a très bien géré un gros temps faible en faisant tourner au milieu, ce qu’il ne savait pas trop faire auparavant. Avant, Marseille ne faisait que défendre ou attaquer… Si l’OM continue de progresser dans la possession-circulation, dans la temporisation « avec le ballon » , alors tous les espoirs lui sont permis. Pour être bien concret sur le sujet, rappelez-vous l’OM de Deschamps contre MU en 8es de C1 2011 (0-0) : cet OM avait su neutraliser un adversaire qui lui était supérieur grâce à une possession intelligente. L’OM 2014-2015 ne possède pas encore cette faculté à garder le ballon au milieu afin, à la fois d’éviter de défendre trop bas, mais aussi afin de préparer les temps forts à venir.

Un chantier défensif

Autre point noir : Marseille défend mal. Ou du moins « ne défend pas très bien » (3e défense avec 17 buts « contre » , pas si mal). On objectera qu’inspiré de Johan Cruijff, l’essentiel est de marquer un but de plus que l’adversaire et que les buts encaissés « forcément sur contres » sont la conséquence logique de grosses prises de risque offensives. Pas faux… Mais il se trouve que l’OM a encaissé le même but contre Metz, Monaco (une attaque placée, pas un contre) et Lille : une action venue du côté gauche marseillais et qui a fini au fond d’une frappe dans l’axe. Si on ajoute quelques actions dangereuses subies à dom face à Lens, on constate que l’arrière-garde marseillaise, mal disposée et avec des rôles au marquage mal définis, se fait souvent perturber à 4 ou 6 défenseurs contre 2-3 attaquants adverses. Un grand Mandanda a sauvé Marseille plus souvent qu’on ne le pense… Les expériences de défense à trois, puis à quatre tentées par Bielsa ont retardé le chantier défensif. Or, sans une bonne défense, pas de titre de champion. Pour rappel, c’est Souleymane Diawara qui avait été l’homme du titre en 2010, plus que Niang ou Lucho. Bien secondé par Mandanda et Heinze, « Soulé » avait été le gardien de fer des lignes arrières.

En C1, cet OM 2013-2014 qui n’a pas la force défensive du back four monégasque exploserait en défense… Seule équipe à avoir fait la nique au PSG qatari, le Montpellier 2012 avait été champion grâce à sa très solide base défensive (meilleure défense, 34 buts encaissés). Un détail : Montpellier avait aussi été sacré en jouant plus le rôle du chasseur plutôt que du chassé (sauf les neuf dernières journées, en tant que leader). Or l’OM joue le chassé jusqu’à présent : ce sont Paris, Lyon, Sainté et Monaco qui guettent ses faux pas. Enfin, on insistera encore une fois sur la relation Imbula-Payet, pas encore assez consistante. Contre l’ASM (0-1), les deux meneurs phocéens (reculé pour Imbula, avancé pour Payet) n’ont pas assez réussi à faire la soudure entre les blocs défensifs et offensifs. L’OM était parfois comme coupé en deux avec un grand vide créatif au milieu du fait du positionnement trop haut de Payet (que Bielsa lui a vertement reproché) et du fait qu’Imbula limite maintenant son champ d’action au niveau du rond central, en se projetant moins dans les 30 mètres adverses (consigne plus sécurisante de Bielsa ?). Voilà… Alors, l’OM peut-il être champion ? Évidemment. Pas du tout. Ben, oui. Certainement pas. Possible dès cette année. Peut-être. Pas cette année. Ça dépend. Yes, indeed. Niet. Bien sûr. T’as fumé ?

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