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L’Olympique lyonnais touché par de nombreuses blessures musculaires, Rudi Garcia en colère
Excédé par les nombreuses blessures musculaires aux ischio-jambiers qui touchent son effectif, Rudi Garcia a pointé du doigt Sylvinho et mis en cause les méthodes employées par son prédécesseur. Sauf que l'explication est un peu plus complexe, en réalité. Et que s'il est sans doute dans le vrai, l'entraîneur de l'Olympique lyonnais agit avant tout de la sorte pour se protéger. Car placer la faute sur l'autre afin de masquer de mauvais résultats ou cacher ses propres responsabilités constitue un grand classique.
25e minute, au Groupama Stadium. Alors que l’Olympique lyonnais accueille Lille pour le compte de la seizième journée de Ligue 1 ce mardi, Rudi Garcia bout intérieurement. Déjà privé de nombreux éléments, le Français doit faire sortir Youssouf Koné pour pépin physique. Certes, le Malien s’est tordu la cheville à la suite d’un duel avec Renato Sanches. Mais l’entraîneur s’en moque : pour lui, le responsable de l’infirmerie pleine s’appelle Sylvinho.
Youssouf Kone doit céder sa place à Kenny Tete. @orafa2 prend le couloir gauche. #OLLOSC pic.twitter.com/irCRGVce10
— Olympique lyonnais (@OL) December 3, 2019
« Cela fait au moins sept blessures aux ischio-jambiers depuis le début de saison, on s’est interrogé du pourquoi et on cherche… Le constat, c’est qu’on a un peu de mal à récupérer entre les matchs. Au niveau de la préparation, on a peut-être manqué un peu de travail foncier pour que les joueurs puissent durer et récupérer beaucoup mieux tous les trois jours, reprochait en effet le coach en conférence de presse, quelques jours auparavant. Ce n’est pas normal qu’on ait autant de blessés musculaires. » Anormal, c’est clair. Mais pour le reste, est-il dans le vrai ?
Des résultats pourris ? Une excuse, pour Rudi
En gros, Garcia considère que l’OL n’a pas assez transpiré sous les ordres de Sylvinho cet été. Chose que ne démentent absolument pas les joueurs, et qui s’avère possible pour les experts. « S’ils sont touchés aux ischios, c’est forcément musculaire. Et une petite dizaine de blessures musculaires au sein du même club, c’est beaucoup. Ça sous-entend que la cause est commune, commence Axel Mongodin, kinésithérapeute exerçant dans un cabinet de sport à Rennes et ancien du Stade lavallois. En général, la cause numéro un est le manque de préparation estivale. Car s’ils se pètent, c’est qu’ils ne sont pas prêts à ce niveau-là. Si tu ne les prépares pas, ça casse en octobre, novembre, décembre… »
Rudi Garcia parle d’un « manque de travail foncier » et a décidé de faire des séances « sur des plus grands espaces » pour s’habituer aux répétitions d’efforts et de grandes courses du week-end, alors que les Rhodaniens étaient « habitués à s’entraîner sur de tout petits espaces » sous le Brésilien. Pas bête, selon le kiné breton : « En bossant sur de plus grands espaces, on favorise les sprints qui sollicitent les ischios. Donc sur de petits espaces, c’est difficile de travailler ce muscle… Or, un muscle se prépare pour augmenter sa capacité de résistance. Sinon, ça craque. En début de saison, tu peux faire les efforts sans dommage. Mais dès qu’il faut les répéter et que tu ne peux plus récupérer, la charge d’exercice est trop importante et les pépins arrivent. Bref : si l’ancien staff n’a pas fait de prévention au niveau des ischios et des exos spécifiques, Garcia est sans doute dans le vrai. »
Préparer le présent en regardant le passé, pour l’avenir
Seulement, Garcia ne devrait pas en demander trop non plus à ses poulains. « C’est hyper facile de taper sur Sylvinho. Garcia n’a peut-être pas tort, mais il faudrait avoir les programmes d’avant. Ce qui est possible avec les capteurs GPS, prévient Axel Mongodin. Car s’il n’a pas pris en compte ce qui a été fait par le passé… » En d’autres termes, l’ancien de Marseille ou de la Roma a pu tirer sur la ficelle avec excès. Si le jeu qu’il met en place réclame davantage de sprints et que les ischios sont sur-utilisés, s’il a opté pour une charge d’entraînement surpuissante avec un renforcement agressif soudain plutôt que ciblé, alors la finalité est la même que lorsqu’on réalise une série de cent pompes d’un coup après avoir squatté le canapé non-stop pendant six mois : le risque de casse est probable.
« Il y a sans doute eu un manque de préparation, mais Garcia aurait pu éviter ces blessures en faisant autrement » , ajoute le spécialiste. Là réside le fond du problème : lorsqu’un nouvel entraîneur se pointe, il débarque bien souvent avec ses propres méthodes dans ses valises sans les remettre en question et sans prendre en compte la façon de travailler des joueurs déjà présents. Axel, encore : « On peut certes incriminer une personne, mais jamais avec certitude. On cherche toujours un coupable, alors que c’est toujours multifactoriel. »
Quel avocat pour les staffs médicaux ?
Trouver un coupable, oui. Dans le monde du football, la traque constitue même un réflexe. Le staff technique qui met la faute sur le staff médical, cracher sur quelqu’un pour se protéger de mauvais résultats ? Un scénario systématique qui se reproduit inlassablement, et depuis belle lurette. « C’est très « foot » de chercher un responsable, avance d’ailleurs Antoine Albert, ancien masseur-kinésithérapeute d’Angers. Ça aime bien chercher des raisons au pourquoi du comment, alors que c’est juste parfois la faute à pas de chance. Et s’il faut incriminer une personne en particulier, la majorité du milieu s’en fout de faire du mal à une tierce personne. »
Et de reprendre : « Au SCO, on ne se tirait pas dans les pattes en interne. On remettait souvent le joueur en cause, même. Dès qu’on avait un blessé, on essayait de savoir pourquoi et il y avait toujours un truc qu’on ressortait. Du genre il bouffe mal, ne fait pas assez de travail de récupération ou prévention, il est mal chaussé… Ou bien le mec était allé au cinéma la veille, il avait pris deux kilos… Ce n’était pas forcément vrai, mais au moins on se dédouanait. » Une des seules défenses possibles des accusés, pourtant sous l’autorité sportive des dirigeants et malheureusement parfois contraints d’oublier leurs connaissances pour éviter les menaces contractuelles. N’est-ce pas, procureur Garcia ?
Par Florian Manceau
Propos recueillis par FM, sauf ceux de RG