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L’Olympique lyonnais à capo ouvert
La large défaite de l'Olympique lyonnais face au Paris Saint-Germain (1-4) a été rapidement reléguée au second plan par le discours lunaire du capo des Bad Gones adressé directement aux joueurs. Si les remontrances paraissent logiques après un début de saison catastrophique soldé par une dernière place en Ligue 1, une telle prise de parole n'arrange rien à la situation.
Après l’humiliation infligée par le Paris Saint-Germain dimanche soir (1-4), les Lyonnais ont été convoqués pour se faire réprimander. Par Laurent Blanc et John Textor ? Non, c’est le capo des Bad Gones qui a décidé de prendre la parole pour gronder « ses » joueurs. Sous les caméras et micros de Prime Video, la scène est surréaliste entre un virage nord passif-agressif et des joueurs médusés. Après avoir couru 90 minutes derrière le ballon, les coéquipiers de Corentin Tolisso ont dû faire face à leurs supporters et à la banderole : « S’il existe encore des leaders dans ce vestiaire, ils n’ont plus le droit de se taire. » Dernier de Ligue 1 après quatre journées, l’Olympique lyonnais est bien loin de son rang. Les abonnés du virage nord – et de l’ensemble du Groupama Stadium – ont évidemment de sacrées bonnes raisons d’en vouloir à l’effectif devant chaque prestation, mais doivent-ils pour autant s’autoproclamer gardiens du temple ?
Brassage d’air
Malgré les quatre buts encaissés en première période, les tribunes lyonnaises ont continué de donner de la voix jusqu’au coup de sifflet final. Histoire de montrer que les supporters, eux, ne lâcheront jamais rien. « Sans nous, le club n’est rien », peut-on souvent entendre aux abords des stades. Avec l’apathie ambiante dans les rangs de l’équipe de Laurent Blanc, la maxime ne semble pas erronée. En prenant la parole, lunettes vissées sur le crâne et vociférant dans le micro, le capo des Bad Gones avait la volonté de fédérer un groupe, mais le management par la peur ne fonctionne pas toujours. Surtout, l’objectif paraît difficile à atteindre quand le collectif paraît plus proche d’abdiquer que de se révolter au fil des semaines et que le président lui-même n’est pas présent au stade.
« On ne demande qu’une seule chose : être à vos côtés. Mais pour ça, il va falloir que vous le méritiez ! […] On attend de vous que vous vous arrachiez sur le terrain. Et que si on doit prendre des pilules, ce soit la tête haute », hurle le représentant du virage nord, sûr de lui et suivi par toute une tribune. Face à elle, les cancres à qui l’on fait la leçon ne bronchent pas. Un joueur coupable de parler « derrière ses doigts » est sommé de s’adresser directement au capo. Une fois le discours terminé, l’ensemble de l’effectif a applaudi, par automatisme, mais qui a vraiment compris l’injonction ? Si les moments d’échange entre membres du club et supporters sont capitaux, ils n’ont pas pour autant sauvé les Girondins de Bordeaux et l’AS Saint-Étienne et tournent finalement au brassage d’air.
Gusto, Lukeba, Barcola : vénérés puis insultés
Entre les différents ordres intimés aux joueurs dans le but de redonner les lettres de noblesse à l’OL, le capo des Bad Gones est revenu sur ceux qui ont quitté le navire. Malo Gusto (20 ans), parti à Chelsea, Castello Lukeba (20 ans), du côté de Leipzig, et Bradley Barcola (21 ans), s’en allant à Paris en fin de mercato, en ont pris pour leur grade durant la rencontre. Surtout le dernier cité, qui est entré à un quart d’heure du terme sous les sifflets et insultes. Le chef de meute est revenu sur leur sort dans son discours : « On veut chanter vos noms avec amour, pas comme ceux des trois petites salopes qui ont quitté le club sur les six derniers mois. »
La caméra suit alors le regard atterré de Rayan Cherki qui a joué, depuis gamin, avec Gusto, Lukeba et Barcola (ils sont tous les quatre issus des générations 2002 et 2003 de Tola Vologe). « Les trois mercenaires », surnom plus approprié que le terme employé par le capo, étaient vénérés par le public lyonnais, si fier de son identité et de ses jeunes du centre de formation, mais leur départ est plus dur à digérer. Ils sont peut-être hypocrites, mais partent tous dans des clubs où le futur prête plus à l’optimisme et sont encore moins responsables du déclassement de l’Olympique lyonnais depuis plusieurs années. Vu la situation de son club formateur, Cherki pourrait d’ailleurs regretter de ne pas les avoir suivis dès cet été, quitte à se faire copieusement insulter par ses anciens alliés. Jeffinho, lui, a eu la mémoire moins courte en tapant dans la main de Bradley Barcola avec un large sourire lors de son entrée. Symbole que les joueurs protégeront toujours leurs pairs et leurs intérêts plutôt que ceux de supporters à qui ils ne doivent finalement rien.
Par Enzo Leanni