- Ligue des Champions
- 8e
- APOEL/Lyon
L’OL, pour un dernier quart de célébrité
Après leur victoire à l’aller (1-0), les Lyonnais joueront à Nicosie pour gratter une place parmi les huit dernières équipes en lice pour la Ligue des Champions. Pour oublier un peu de la vie duraille en Ligue 1. Pour repousser aussi jusqu’en quarts l’idée d’une vie sans C1.
Dimanche matin, retour au pays des matins calmes, ceux de Tola Vologe. La veille, on a quitté les Lyonnais un rien perdus après leur dixième défaite de la saison du côté de Nancy (2-0). Rythme de relégable (5 points sur 24 possibles), nouvelles illusions perdues dans la course au podium et secteur offensif en rade (un tir cadré en 90 minutes) : ça commence à faire désordre. Mais ce matin, l’OL est une équipe qui travaille à sa qualification pour un quart de finale de Ligue des Champions, après sa victoire à l’aller face à l’APOEL Nicosie (1-0). Pas le moment de laisser prise à l’idée d’une sale période dans laquelle le camp lyonnais serait embarqué. Et pour les quelques âmes chancelantes qui voudraient en douter, Jean-Michel Aulas se charge en personne des sous-titres : « Je suis persuadé que nous pouvons terminer à la troisième place de Ligue 1, que nous pouvons remporter la Coupe de la Ligue, battre le PSG en Coupe de France, et nous qualifier pour les quarts de finale de Ligue des Champions. Si nous réussissons cela, la saison sera formidable. Il faut simplement que les joueurs en prennent conscience » .
Augures favorables
Pour cette fois, le président lyonnais n’a pas besoin de forcer son talent de bateleur en chef pour convaincre son monde. Car s’il y a bien une chose dont les joueurs ont encore conscience entre Saône et Rhône, c’est de l’importance de ces soirées de Ligue des Champions. Surtout quand l’adversaire désigné pour les huitièmes confirme l’impression d’augures favorables qui planeraient autour de la compétition depuis le miracle de Zagreb. Ils en ont fait la démonstration au match aller en respectant à la lettre le cahier des charges annoncé : remporter la première manche sans prendre de but. Pas la peine de se faire prier pour annoncer la couleur du retour, où il sera question de serrer les dents dans la tempête promise par les Chypriotes en attendant le contre. Ce qui n’est pas pour déplaire à Rémi Garde et ses hommes si l’on s’en tient aux dernières prestations en date. A la peine lorsque la possession de balle confine à la confiscation (près de 70 % face à Nancy), les Lyonnais ont quelques beaux restes à faire valoir lorsque Bastos, Lisandro et Gomis ont la possibilité de prendre à revers la défense adverse. C’est en partie à cette façon de procéder qu’ils doivent leur dernière partie de hourra football délivrée face au PSG il y a dix jours.
La limite du déclin
Sans afficher une confiance outrancière pas franchement raccord avec le genre de la maison, les joueurs lyonnais ont conscience du brin de talent à disposition pour passer du côté des quarts. Oui, mais pour le reste ? Malgré toute la force qu’a bien voulu y mettre le président Aulas pour valider l’idée d’une rupture, c’est bien l’histoire de ces trois dernières années à Lyon qui ressurgit l’air de rien. Plus précisément, celle d’une équipe qui parvient à se mobiliser dans les quelques parenthèses européennes qui lui restent, sans pour autant parvenir à évacuer l’idée d’un club à la limite du déclin. En début de saison, JMA avait dérogé à ses habitudes au moment de présenter son coach novice : pas plus d’objectifs que de plan de route pour Rémi Garde, à la façon de celui qu’il a fini par fixer dimanche dernier. Rien à part ces quelques déclarations de principe annonçant le retour au savoir-faire perdu, de la promotion de la formation jusqu’à l’identité de jeu à ranimer. Un discours qui n’avait d’autre ambition que de renvoyer au loin l’image qu’on avait fini par se faire de l’ère Puel, sorte d’âge sombre qui aurait vu l’OL diluer les valeurs à l’origine de son succès à coups de transferts aussi dispendieux que douteux, en plus de son 4-3-3 arabesque qui arrachait des râles de plaisir à tout Gerland.
Après l’Europe
Six mois plus tard, à voir Aulas ressortir son portrait de Claude Puel en grand fossoyeur des ambitions lyonnaises, on se dit que les choses n’ont finalement pas tant changé dans la Capitale des Gaules. Comme son prédécesseur, Rémi Garde semble lui aussi dépendre de ces quelques soirées européennes pour trouver quelque chose de l’implication collective, du sens du combat, des propositions de jeu qu’il espérait plus tôt dans la saison. Comme s’il fallait que l’obsession lyonnaise de Ligue des Champions finisse par avoir raison de tout le reste – des retours en championnat qui paraissent grisailles jusqu’aux intentions du moment. Lors de sa dernière saison, on a plusieurs fois entendu Claude Puel soulever cette difficulté à forger son groupe loin des lumières d’Europe. On jurerait avoir entendu pareille complainte dans l’une des rares confidences accordées par Rémi Garde sur ses premiers pas d’entraîneur : « Le plus dur, c’est d’aller contre la pente de notre société. D’aider les joueurs à penser collectif, alors que tout les pousse à l’individualisme » (Libération, décembre 2011). La tendance du moment en championnat semble dire qu’il va falloir apprendre à faire sans Ligue des Champions. Il reste encore ce détour par Nicosie pour repousser l’idée jusqu’en quart. Et au-delà ? Dimanche dernier, Jean-Michel Aulas ne voulait pas voir plus loin. Sans doute par crainte. Un peu par nécessité.
Par Serge Rezza