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Lloris est-il vraiment gaucher ?
En difficulté lors de sa dernière sortie avec les Bleus, Hugo Lloris a toujours montré quelques limites dans son jeu au pied. Et si c'était parce qu'il n'était pas vraiment gaucher, finalement ?
On joue la 93e minute. La France tient un match nul compliqué en Suède, au terme d’une rencontre au rythme anesthésiant. Djibril Sidibé passe en retrait pour ce qui semble être le dernier dégagement d’Hugo Lloris, en prenant bien soin de lui mettre sur son pied gauche. Un contrôle tranquille, une touche de plus pour effacer l’attaquant suédois, et une dernière touche complètement manquée. Mais au lieu d’envoyer le ballon dans le ciel de Solna, il foire complètement son coup de pied et écrase son dégagement. La balle vient directement dans les pieds d’Ola Toivonen, qui n’a plus qu’à l’expédier dans les buts vides depuis le milieu de terrain. La France perd, et même si le gardien de Tottenham est loin d’être le seul responsable de cette déroute, il vient de faire preuve une nouvelle fois de son jeu au pied plus que limité. Mais en fait, Hugo Lloris est-il vraiment gaucher ?
Problème de latéralité
Contrairement à Fabien Barthez, l’un de ses illustres prédécesseurs bien plus à l’aise dans l’exercice du jeu au pied, Hugo Lloris n’est pas à proprement parlé « un vrai gaucher » . Ce n’est même pas le plus gaucher de sa famille. Par exemple, lorsqu’il taquine la petite balle jaune sur un court de tennis avec son frère Gautier, ce n’est pas lui qui peut s’imaginer en Rafael Nadal – d’ailleurs, l’Espagnol utilise sa main gauche uniquement pour le tennis, sinon il est droitier, mais c’est une autre histoire. « Ça nous arrive de nous affronter. Lui est droitier, moi gaucher. Il est plus fort que moi, mais j’arrive à l’énerver et le faire sortir de son match » , confiait le petit frère Lloris il y a quelques années au Parisien. Le verdict est donc implacable. Si Hugo Lloris joue au football du pied gauche et écrit de la main droite, il y a un grand risque qu’il soit « dyslatéralisé » .
Joëlle Morice Mugnier est latérapraticienne et a mis au point il y a une vingtaine d’années la latérathérapie, une approche qui a pour but de réhabiliter sa latéralité originelle et d’avoir les outils pour s’adapter au système droitier qui régit notre société. Autant dire que la personne est plutôt apte à expliquer dans quelle mesure Hugo Lloris est perdu avec son pied gauche. Contrairement à cette « gauchère homogène » comme elle se définit – c’est-à-dire que son œil, sa main et son pied gauches sont directeurs –, le portier des Bleus est un gaucher ou un droitier hétérogène. « Son pied gauche est directeur, sa main droite est directrice, et en ce qui concerne l’œil, il faudrait que je puisse le rencontrer pour le déterminer. Dans les deux cas, cela peut être compliqué pour lui » , estime Joëlle Morice Mugnier.
L’œil directeur
Premier cas de figure possible : c’est son œil droit qui est directeur, et dans ce cas-là, c’est toute sa latéralité qui est de travers lorsqu’il joue au football. « C’est comme si un archer qui a la posture du droitier, c’est-à-dire qu’il tire la corde avec sa main droite, vise de l’œil gauche. Il y a un déséquilibre. » De quoi, naturellement, perdre en précision lorsqu’il dégage du pied gauche. Second cas de figure : c’est son œil gauche qui est directeur, signifiant ainsi qu’il est un véritable gaucher. Mais un gaucher contrarié. « Dans ce cas-là, c’est un gaucher qui s’ignore. Au sens classique du terme, un gaucher contrarié est quelqu’un qu’on a contraint à écrire de la main droite à l’école. Mais il arrive que l’on se contrarie tout seul, car le sens de l’écriture pour un gaucher est plus difficile, il force à se recroqueviller sur soi-même. »
Pour être plus à l’aise, Hugo Lloris s’est peut-être forcé à écrire de la main droite, et donc par réflexe, à utiliser sa main droite dans la vie de tous les jours, comme pour jouer au tennis. Mais une fois sur le terrain de foot, il s’est rendu compte qu’il était, au fond de lui, gaucher. « Là, le cerveau reçoit beaucoup d’indications contraires. Et il ne comprend parfois plus trop ce qui lui est demandé. » Un léger pète au casque qui a apparemment resurgi lorsqu’il a fallu dégager ce ballon vendredi soir. Joëlle Morice Mugnier, voisine de Layvin Kurzawa à La Celle-Saint-Cloud, est prête à proposer ses services à Lloris. « Par exemple, le joueur du PSG a l’air d’être un gaucher parfaitement homogène, ce qui lui facilite la tâche. Je pense que Lloris a besoin de rééquilibrer, réajuster sa latéralité pour être au meilleur de sa performance. » Si ça peut éviter d’autres bévues…
Par Kevin Charnay