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Lloris, boulettes de printemps
De nouveau bousculé face à Manchester City samedi, Hugo Lloris se retrouve au milieu des fléchettes depuis plusieurs semaines.
Une vieille histoire du foot et un sale réflexe de bord de terrain. « Mais c’est quoi ça ? » Pour la première fois de sa vie, le gamin vient au stade. Il découvre un monde où les mains n’existent pas, où on lui parle de contrôle orienté et de conduite de balle. C’est l’histoire du passage de témoin et de l’espoir du père qui rêve de voir un jour son fils relever son col après un but. Puis, ce dernier tourne la tête et s’interroge : qui est cet individu seul, debout dans le froid, couvert de gadoue, qu’on s’amuse à couvrir d’insultes ? Pourquoi est-il habillé de cette manière ? Pourquoi doit-il défendre des couleurs qu’il n’a jamais la chance de porter ? « Parce que plonger dans la boue, c’est ce qu’on aime, répondait récemment Baptise Reynet lors d’un documentaire réalisé sur le poste de gardien par Canal Plus. Au fond, on est des petits cochons. » Samedi soir, enfoncé dans un siège à Wembley, le supporter de Tottenham venu assister à la débâcle des siens face à Manchester City (1-3) est probablement redevenu, lui aussi, un animal : « Mais c’est quoi ça ? C’est quoi ce gardien ? » Pour la troisième rencontre consécutive, Hugo Lloris vient alors de passer à côté de son match.
« Il faut avoir été un peu gardien pour comprendre »
Cette fois, ça s’est dessiné de cette manière : une sortie foireuse dans les pieds de Raheem Sterling à la vingt-cinquième minute et un ballon mal repoussé dans ceux du même Sterling 47 minutes plus tard. Et, au bout, les Spurs ont concédé leur première défaite depuis quatre mois en championnat. Pour Lloris, ce sont les premières vraies conséquences après une sortie aérienne ratée lors de la victoire de Tottenham à Stamford Bridge le 1er avril dernier (1-3) et une intervention manquée au pied à Stoke une semaine plus tard (1-2). Est-ce grave ? Non, selon Mauricio Pochettino qui a câliné lundi le gardien tricolore avant le déplacement des Spurs à Brighton : « Depuis mon arrivée au club, Hugo n’a cessé de progresser. Pour moi, aujourd’hui, c’est l’un des meilleurs gardiens du monde et il n’y a aucun doute à avoir sur la confiance que je lui accorde. Mais vous savez, parfois, la perception des gens… » Interrogé il y a quelque temps, Lloris en personne avait tiré dans le sens de son entraîneur : « Je pense qu’il faut avoir été un peu gardien de but pour comprendre un gardien de but, mais bon, je respecte les différents avis. » Soit : chacun peut nous juger, mais personne ne peut vraiment nous comprendre.
Réducteur
Dans le fond, Hugo Lloris ne tape pas à côté : la faute d’un gardien de but est difficile à établir. Samedi, certains supporters de Tottenham sont tombés sur le portier des Bleus pour une sortie jugée trop tardive sur l’ouverture du score de Gabriel Jesus. Reste que Davinson Sánchez, irréprochable depuis le début de saison, mais complètement passé à côté de son duel face à City, aurait dû intervenir à la retombée de la transversale de Vincent Kompany. Bref, on ne peut refaire le match, mais on peut constater les faits : cette saison, Lloris a déjà commis six erreurs qui ont conduit à un but selon les différentes agences statistiques, son plus haut total depuis son arrivée en Angleterre, mais aussi le plus élevé du Royaume à égalité avec Petr Čech. Assez pour parler d’un exercice raté ? Ce serait réducteur et trop simple alors que la défense des Spurs est moins souveraine que lors de la saison 2016-2017, surtout lorsqu’on sait que le Niçois a sauvé les siens à de nombreuses reprises, notamment à Madrid en Ligue des champions. Problème : les critiques à l’égard du gardien français n’ont jamais été aussi fortes. Mardi soir, il devra impérativement répondre du côté de Brighton : pour lui, c’est le moment de replonger dans la boue. C’est aussi le prix de la confiance.
Par Maxime Brigand