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Llorente, petit à petit, le géant fait son nid
Il est arrivé à Turin dans l’ombre de Carlos Tévez. Puis il a fait banquette, devenant presque un objet mystérieux. Mais finalement, Fernando Llorente est en train, petit à petit, de démontrer sa vraie valeur. Parce qu’il a encore, dans un coin de sa tête, le Mondial brésilien ?
Certains ont comme particularité de marquer contre leur ancien club. D’autres aiment toujours marquer dans les dernières minutes. Et puis il y a Fernando Llorente. Sa caractéristique ? Il aime marquer contre le Real Madrid. Original. Mardi soir, l’attaquant espagnol, d’un coup de tête rageur, a permis à la Juventus d’égaliser face aux Madrilènes (2-2). Au match aller, il en avait déjà fait de même, mais cela n’avait pas suffi à empêcher la défaite turinoise (2-1). Deux buts qui viennent s’ajouter aux quatre pions inscrits avec le maillot de l’Athletic Bilbao contre ces mêmes Madrilènes. Le dernier remontait au 20 octobre 2010, lors d’une défaite 5-1 des Basques. Une époque où Llorente était considéré comme l’un des attaquants incontournables en Espagne, aux côtés de David Villa et Fernando Torres. Il faut dire que ses stats avec l’Athletic avaient de quoi le consacrer au rang de canonnier de la Roja : 118 buts en 333 matchs officiels. Pourtant, il a toujours manqué ce petit quelque chose à Llorente pour être tout en haut. Ce petit quelque chose qui fait que, à 28 ans, il ne compte que 22 sélections et 7 buts avec la sélection nationale. Voilà pourquoi, aussi, il a choisi de quitter l’Espagne et de tenter une nouvelle aventure en Italie. Les débuts sont un peu au ralenti, mais, doucement, Llorente est en train de prouver à tous qu’il mérite mieux qu’une place sur le banc. Demain, le Napoli débarque au Juventus Stadium. L’occasion rêvée pour lui ?
Deux finales et un contrat non prolongé
Fernando Llorente est champion d’Europe et champion du monde. À Turin, dans une équipe qui compte encore trois champions du monde 2006 (Buffon, Pirlo et Barzagli), forcément, cela force au respect. Pourtant, lorsqu’il est arrivé à Turin, l’attaquant espagnol n’a pas franchement enthousiasmé les foules. Peut-être aussi parce que, la saison dernière, il avait plus ou moins disparu de la circulation. Après une saison 2011/12 énorme, où il emmène son club en finale de l’Europa League et de la Copa del Rey (bilan total : 29 pions toutes compétitions confondues), il est sur le point de signer au Real Madrid. Finalement, la transaction capote, mais le joueur refuse de prolonger son contrat avec l’Athletic Bilbao. Les supporters ont du mal à l’accepter, et le joueur n’est plus franchement en odeur de sainteté là-bas. Du coup, au cours de la saison, il est régulièrement sur le banc et n’entre en jeu que dans le dernier quart d’heure. Au mois de janvier, il signe à la Juventus, mais ne rejoindra le club bianconero qu’après l’Euro. Forcément, son esprit est déjà ailleurs, et sa cote de popularité à Bilbao est au plus bas. L’Euro n’arrange pas franchement les choses : Llorente fait partie du groupe espagnol, mais ne disputera pas la moindre minute pendant la compétition. Dur.
C’est dans ce contexte qu’il débarque à Turin, dans une équipe qui vient de remporter pour la deuxième année de suite le Scudetto, et qui vise désormais la Ligue des champions. Surtout, la Juve recrute au même moment Carlos Tévez, qui apparaît alors comme la recrue phare de l’été. Llorente, lui, reste dans l’ombre, ne dit pas grand-chose et pense surtout à retrouver une condition physique décente. Conte ne le fait pas jouer lors des premiers matchs de championnat, à tel point que la presse italienne commence à parler d’un « objet mystérieux » , et que des comparaisons avec Anelka (arrivé l’hiver dernier pour ne jamais jouer) commencent à fleurir. Le coach turinois lui offre finalement sa première en tant que titulaire contre le Hellas Vérone, le 22 septembre. Llorente répond de la meilleure des façons : en marquant son premier but avec le maillot bianconero. Enfin, la machine est lancée. Peut-être.
Le Napoli et le Mondial
Car derrière, Llorente est régulièrement aligné comme titulaire, mais ne marque plus. Son compteur est bloqué à un pion en Serie A, et il reste sur 367 minutes sans marquer. Heureusement, il y a la Ligue des champions. Avant la double confrontation face au Real Madrid, Llorente avait provoqué son coach dans la presse. « Je dois jouer contre le Real Madrid pour la simple et bonne raison que je sais comment marquer contre eux » , assure-t-il. Conte le prend au pied de la lettre, et l’aligne comme titulaire à Bernabéu aux côtés de Tévez. Alors que la Juve est menée 1-0, c’est bien Llorente qui égalise. La Vieille Dame s’inclinera finalement 2-1. Au match retour, mercredi, rebelote. La Juve est menée 2-1, et Llorente transforme en but un long centre de Caceres. Ce coup-ci, le but est décisif et, surtout, il maintient la Juve en bonne position pour se qualifier pour les huitièmes. C’est peut-être ce but-là qui va enfin permettre à l’attaquant de se libérer.
Hier, Beppe Marotta, le directeur sportif de la Juve, est même intervenu dans les colonnes de Tuttosport pour affirmer que Llorente n’était pas à vendre. Pourquoi une telle sortie, maintenant ? Parce qu’Arsenal a récemment fait part de son intérêt pour le buteur. L’intervention de Marotta sert à montrer que la Juve a placé beaucoup d’espoirs en Llorente, et qu’elle est même persuadée que le joueur peut s’imposer en Italie. Il doit juste retrouver son rythme, et la confiance, surtout. Demain soir, il est fort probable qu’il soit aligné en attaque, en tandem avec Carlos Tévez, pour le match au sommet contre le Napoli. Ceux qui ont la chance de marquer des buts décisifs lors de ce rendez-vous sont érigés au rang de héros. Pogba, auteur de son premier but en Serie A face aux Napolitains l’an dernier, Hamšík (doublé décisif en 2009) ou encore Cavani (triplé en 2011 pour un succès 3-0), côté napolitain, en savent quelque chose. Llorente rêverait de les imiter et d’entrer définitivement dans le cœur des tifosi. Et puis, il le sait : le Mondial brésilien est dans six mois. Six mois pour convaincre, six mois pour briller. Défi lancé.
Eric Maggiori