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L’Italie, le grand défi de Mancini
Après des mois de tergiversations et une enfilade vexante de refus de la part de plusieurs entraîneurs, la Nazionale a enfin retrouvé un sélectionneur. Son nom ? Roberto Mancini. Un technicien au CV contrasté et au style controversé, qui va devoir abattre une charge de travail monumentale pour replacer l'Italie au sommet du football mondial.
L’Italie du football va bien devoir reconnaître que l’appel pour sauver la patrie n’a pas su mobiliser les foules. Après le désastre de la mi-novembre dernier, qui a vu la Nazionale se faire éjecter du mondial russe par la Suède, la Squadra azzurra a ramé pour se retrouver un sélectionneur digne de ce nom. Carlo Ancelotti n’était pas intéressé. Antonio Conte non plus. Quant à Claudio Ranieri, il n’était simplement pas dans les petits papiers de la Fédération italienne. Finalement, les huiles du football transalpin ont donc décidé de confier les clés de la sélection à Roberto Mancini, qui s’est libéré de ses obligations avec le Zénith Saint-Pétersbourg, qu’il dirigeait depuis 2017. Un choix qui s’accompagne d’un bon paquet d’interrogations.
Un CV contrasté
D’abord parce que l’ancien fantasista de la Samp n’est plus vraiment au top du hip-hop des entraîneurs mondiaux. Ses deux expériences les plus récentes, sur le banc de l’Inter de 2014 à 2016, puis au Zénith, qu’il laisse à une bien terne 5e place du championnat russe, ont même été des échecs cuisants. Le nouveau boss de la Nazionale a pourtant quelques références qui plaident en sa faveur, comme ses trois Scudetti remportés avec l’Inter de 2006 à 2008 ou encore une Premier League, qu’il a glanée avec Manchester City en 2012. Autant de succès relativisés par ses détracteurs, qui soulignent que Mancini avait alors à disposition des effectifs pléthoriques. À l’Inter, il avait pu bénéficier de l’équipe en béton armée que son président, Massimo Moratti, avait bâti à coups de transferts juteux. Son passage chez les Sky Blues peut, lui, être synthétisé par un chiffre : 312, soit la somme investie en millions d’euros dans le recrutement par sa direction, lors de ses années anglaises. Parallèlement, il n’avait jamais réussi à emmener les Nerazzurri comme les Citizens au-delà des quarts de finale de la C1.
L’amoureux des 1-0
Un bilan contrasté qui pourrait être examiné sous une lumière plus positive si Mancini ne traînait pas aussi avec lui des idées de jeu et de management particulièrement clivantes. Après le départ de l’Italien de City, le portier du club, Shay Given, l’avait même à demi-mots traité d’imposteur : « Il s’est vautré avec tout le monde… Chaque matin, les physios lui fournissaient une liste des joueurs qui étaient en forme et de ceux qui ne l’étaient pas et il explosait de colère, les accusant de protéger certains joueurs ou de ne pas travailler assez pour retaper les blessés… Dites-moi comment on peut tirer le meilleur des gens en travaillant comme ça… » « Mancio » , comme il est parfois surnommé, s’était aussi brouillé avec Carlos Tévez, qui lui reprochait ses entraînements trop draconiens et son style de jeu résolument défensif.
Le style, justement, est un autre élément controversé de la méthode Mancini : pragmatique convaincu, loin d’être dénué de savoir-faire tactique pour organiser défensivement ses équipes, le Mister est en revanche tout sauf un théoricien du jeu offensif. Son mantra ? Les victoires par un but d’écart : « Je préfère que nous soyons ennuyeux pendant deux ou trois matchs et gagner 1-0. La phase défensive est primordiale, car elle concerne tout le collectif. En attaque, si tu as de grands attaquants, tu vas quand même finir par marquer. » C’est dit.
Une aubaine pour Balotelli
Alors, l’ex-Sampdoriano a-t-il les épaules pour faire renaître de ses cendres la Nazionale ? Le doute est permis. S’il serait injuste de déjà condamner Mancini, l’entraîneur de 53 ans va sans doute devoir se faire violence pour faire évoluer ses méthodes. Il le faudra, s’il veut attaquer par le bon bout les chantiers nécessaires à la reconstruction de la sélection. À commencer par celui des lignes arrières, qui vont devoir s’offrir un rajeunissement de façade. Alors que Gianluigi Donnarumma a la tâche immense de remplacer Gigi Buffon dans les buts, Giorgio Chiellini, Leonardo Bonucci et Andrea Barzagli vont progressivement devoir passer le flambeau à une génération montante de jeunes défenseurs centraux italiens où l’on retrouve Mattia Caldara, Alessio Romagnoli et Daniele Rugani.
Au milieu de terrain, Mancini devra trouver la clé de l’énigme Verratti, qui n’a jamais vraiment réussi à exprimer son plein potentiel en équipe d’Italie. Autre dossier complexe, celui de l’attaquant de pointe, où aucun joueur ne fait figure de titulaire indiscutable. Mancini a déjà annoncé qu’un retour en sélection de Mario Balotelli, qu’il a dirigé à l’Inter puis à City, est plus que jamais d’actualité : « Nous allons lui parler et, probablement, nous allons l’appeler. » Il lui restera encore à trancher entre le Niçois, la promesse Andrea Belotti et le bomber de la Lazio, Ciro Immobile, létal devant le but en club, mais beaucoup moins en réussite avec la sélection. Un tableau chargé, qui n’entame pas la confiance de Mancini, qui a annoncé espérer être « le sélectionneur qui peut ramener la sélection sur le toit du monde » . L’Italie n’a plus qu’à retenir son souffle. Et espérer que Mancini, qui n’avait inscrit que 4 buts en 36 capes avec l’Italie lorsqu’il évoluait encore sur les prés, aura plus de réussite comme entraîneur.
Par Adrien Candau
Tous propos issus de la Gazzetta dello sport et Sky sport.