L’Inter de José

José Mourinho n’est pas fou, il sait très bien qu’on ne change pas une équipe qui gagne, son Inter s’inscrit évidemment dans la continuité de celui de Roberto Mancini. L’Inter est tout de même sur deux titres de champion de rang. Pour aller chercher le troisième, qui constituerait son premier en Italie, José s’est appuyé sur l’ossature déjà en place. Comme il le disait au moment de sa prise de fonction, « l’effectif me plait beaucoup, il n’y a pas grand chose à changer » . Tu m’étonnes.

Zlatan devant, un milieu aussi technique que travailleur (Cambiasso –Zanetti, que viva Argentina!!!), des défenseurs solides (Cordoba, Samuel, Chivu) et en voiture Simone. Une colonne vertébrale intacte donc, puissante, droite et efficace. Avec ça, pas mal d’entraineurs joueraient le titre, il faut bien l’avouer.

Voilà pour les similitudes avec l’Inter de Mancini. Et puis basta. Parce qu’on connaît tous l’animal, José n’a pas pu s’empêcher d’apporter son grain de poivre et sel à sa nouvelle team. Lui qui sait très bien que la clé du succès est de changer une équipe qui gagne.

D’où des points communs avec son anglaise d’ex, qui ne s’est d’ailleurs pas remise de son départ. Scolari traîne en jogging. Le jeu est p’tet plus léché, latin, fluide ou je ne sais pas quoi, mais franchement, on en n’a rien à secouer, tout le monde s’en cogne maintenant. Un seul être vous manque et tout vous est dépeuplé. Roman himself songerait à céder la bête. Chelsea vaut peut-être plus que Manchester City, mais à peine mieux. On ne se remet pas du départ du Special One.

Qui malgré tout était encore un peu attaché à sa greluche brittone. Alors il a commencé sa nouvelle aventure avec un schéma de jeu en 4-3-3, avec le recrutement de Mancini et Quaresma. Sauf que voilà, ça marche certes à l’occasion, mais pas aussi facilement qu’en Angleterre ; ici, en Italie, il ne suffit pas de forcer sur les ailes pour mettre tout le monde à sa botte. Les verrous du Calcio ne sautent pas comme ça. Aussi, même s’il utilise encore le 4-3-3, histoire d’avoir un plan B, le meilleur entraineur du monde a assez vite mis en place un 4-3-1-2, autrement dit un 4-4-2 losange plus adapté aux traditions locales.

Deux pointes, Z et Adriano ou Crespo ou Cruz voire même Mancini qui a été essayé à ce poste contre Gênes. Un meneur de jeu, Dejan Stankovic en général, Figo si le cœur du Portugais lui en dit, comme contre Cagliari. Une ligne de trois casseurs flotteurs, Cambiasso Zanetti et, c’est selon, Muntari, Chivu ou Vieira quand il est là. Une défense à 4 avec deux latéraux, Maxwell et Maicon en général, conviés à venir participer à la chouille devant.

Voilà pour le topo tactique. José a su s’appliquer à lui-même la qualité première qu’il demande à ses troupes : le pragmatisme. Le Mou s’est adapté au championnat italien, a vite compris et changé ses plans. Son équipe joue plus à “l’italienne” que Chelsea, plus latine, plus à terre, avec un crédo assez simple, on bétonne à 8 derrière, on laisse faire les 3 artistes devant. Et si y’a moyen, le milieu peut alors entrer dans la danse et les latéraux déborder. Alors certes, il joue du coup dans le même schéma de jeu que sous Mancini, mais bon, faut pas déconner, les similitudes s’arrêtent là. Dans le jeu, et l’attitude, ces deux Inter n’ont plus grand chose à voir.

Un mental d’acier. Ne pas prendre de but. Ne rien lâcher. Ne pas faire d’erreur. Le mental coco. Rester groupés. La recherche de l’efficacité. Un mental bleu acier. Chercher à marquer, peu importe comment. Coups de pieds arrêtés, ok. Jeu direct, ok. Exploits individuels, ok. Combinaisons collectives, ok. Un but est un but. Un joli but est un but avant tout. Le résultat avant tout.

Jouer la gagne. Gagner.

Ne pas se perdre, aller à l’essentiel, pas de mélancolie, de spasmes existentiels, de considérations esthético-romantiques à deux balles. De la sincérité. On ne va pas se mentir, on est la pour gagner. Des matchs, des points, des titres ; le reste, c’est de la littérature.

Le dogme Mourinho est très terre à terre finalement. Ce qui fait sa force. Sans enrobage, sucre glace ou discours alambiqués, José parle aux joueurs. Directement. Immédiatement. Ils le comprennent, l’écoutent, le respectent, le suivent. Lui le chef de meute, qui prend sur lui, protège son clan, dézingue au bazooka les menaces potentielles et dégoupille des grenades en conférence de presse.

Mourinho ne s’emmerde pas avec la fausse modestie ou l’humilité anachronique. Il ne dramatise pas non plus. C’est simple, c’est le football, une compétition et on cherche à être les plus forts. Pour ce faire, les premiers convaincus doivent en être nous-mêmes. Pas de place au doute mais seulement à la réflexion. On n’est pas là pour déprimer ou faire de la photosynthèse sur canapé. On ne fait pas du haut niveau avec des gens moyens.

L’Inter a bien assimilé le topo et file vers un nouveau titre italien malgré le renouveau de la Juve à laquelle il n’aurait auparavant bien sur jamais résisté. De même, alors que chaque année sur la scène continentale, ça finissait inlassablement en eau de boudin mal, cette année, les Milanais cristallisent tous les espoirs de voir tomber les bovins de Manchester. Gare toutefois, l’Inter reste l’Inter et sa scoumoune légendaire est p’tet la seule chose plus forte que José.

Agent Zero