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Lille face à son miroir grossissant
Comme il y a deux saisons, c’est par la réception du FC Nantes, ce dimanche à 15h au stade Pierre Mauroy, que Lille débute sa saison. Une rencontre qui suscite pas mal d'attentes, chez les supporters lillois comme chez les observateurs, dans la mesure où le LOSC l'aborde autant dans la peau d'une cash machine que d'une équipe européenne. Le signe que la politique menée par Gérard Lopez ces deux dernières années est plus cohérente qu'on ne voudrait le faire croire ?
Dimanche 6 août 2017, 15 heures. En ouverture du championnat, Lille accueille Nantes au Stade Pierre Mauroy pour ce qui constitue en quelque sorte le premier véritable match de l’ère Gérard Lopez au LOSC. S’il a succédé à Michel Seydoux depuis plus de six mois déjà et que son club a alors eu, l’espace d’une fin de mercato hivernal complètement dingue, le temps de lourder cinq mecs et d’en signer sept, l’Hispano-Luxembourgeois le sait : le temps de l’indulgence est passé, laissant place à celui de l’excitation, des espoirs et des attentes, tant chez les supporters lillois que chez les observateurs. Et elles sont grandes, compte tenu des sommes englouties sur le marché des transferts (68 millions d’euros pour attirer Maia, Araújo, Pépé, Mendes, Malcuit, Ié et Jakubech et lever les options d’achat de De Préville, Xeka et Sliti) pour bâtir une équipe à même de faire oublier la onzième place à laquelle Lille vient de terminer.
On s’était dit rendez-vous dans deux ans
Ces attentes sont d’autant plus grandes que cette équipe, Lopez l’a confiée à un certain Marcelo Bielsa, rapatrié en France deux ans après son départ soudain de l’Olympique de Marseille. Pas pour rien que beIN Sports a choisi de faire de l’affiche l’un de ses deux matchs décalés du week-end. Face à des Canaris tout aussi intrigants, Claudio Ranieri, qui effectue également ses débuts sur le banc nantais, la démonstration nordiste est à la hauteur des attentes : 3-0, avec des buts inscrits par deux recrues hivernales (Junior Alonso et El Ghazi) et un type devenu en douze mois la coqueluche du stade Pierre Mauroy, Nicolas de Préville. Un type si apprécié du public que sa vente à Bordeaux, quelques semaines plus tard, constituera la première fissure dans la relation entre les supporters et la nouvelle direction, laquelle volera définitivement en éclats le 10 mars 2018, moment choisi par les ultras lillois pour envahir le terrain lors d’une rencontre face à Montpellier.
C’est bien connu : dans le foot, tout va très vite. De Nicolas de Préville, que reste-t-il donc aujourd’hui à Lille ? Pas grand-chose, si ce n’est un bon mais lointain souvenir, que certains amnésiques n’hésiteront peut-être même pas à troquer contre des sifflets nourris si d’aventure, le natif de Chambray-lès-Tours venait à planter à Mauroy. Mais pour l’heure, ce n’est pas Bordeaux sinon Nantes qui débarque ce dimanche après-midi dans le Nord. Hasard du calendrier, le premier adversaire lillois cette saison est en effet le même qu’il y a deux ans. Le lieu, le jour, l’horaire et le diffuseur également. Nantes a même poussé le mimétisme jusqu’à se pointer avec un entraîneur fraîchement nommé : Christian Gourcuff. Mais si le pitch est le même, le casting a profondément changé de part et d’autre.
Les bons comptes de Gérard Lopez
Des dix-huit nordistes figurant sur la feuille de match le 6 août 2017, seuls quatre portent toujours la liquette du LOSC aujourd’hui : Mike Maignan, Luiz Araújo, Yassine Benzia, plus que jamais sur le départ, et Thiago Maia, dont on ne peut pas jurer qu’il sera encore Lillois à la fin du mois. Les autres ? Outre Ponce, reparti à l’AS Rome, certains sont actuellement prêtés (Koffi, Alonso, Kouamé, Faraj) ou sur le point de l’être (Ié), et la plupart ont surtout été vendus, de Préville à Pépé en passant par Malcuit, Amadou, Bissouma, Ballo-Touré, El-Ghazi et Mendes. Autant d’éléments qui, en moins de deux ans, ont rapporté au LOSC plus de 170 millions d’euros, et sur lesquels le club a réalisé une plus-value cumulée frôlant les 120 millions. Un pactole très largement alimenté par les cessions de joueurs recrutés sous Gérard Lopez : à elles cinq, les cessions de Malcuit, Ballo-Touré, Mendes, El Ghazi et Pépé pèsent environ 135 millions d’euros, dont 90 de plus-values.
Des chiffres aussi révélateurs de l’envolée des prix du marché que de la pertinence des choix de l’Hispano-Luxembourgeois et sa cellule de recrutement, Luis Campos en tête. Des choix d’autant plus pertinents que sur le plan sportif, le LOSC sort de sa plus belle saison depuis le titre de 2011 et s’apprête à disputer la phase de groupes de la Ligue des Champions pour la première fois depuis l’exercice 2012-2013. Alignement des planètes ou premiers véritables effets de la politique menée depuis 2017 par Gérard Lopez ? Premiers éléments de réponse dans les prochains mois. Difficile en tout cas de considérer cette politique comme de la pure boulimie financière. Si les ventes imprévues de Koné et Leão font grincer des dents ci et là, les 18 millions investis pour faire de Bradarić et Osimhen leurs remplaçants, couplés aux efforts consentis pour attirer André et souffler Yazici à la concurrence semblent indiquer que l’ambition sportive a encore toute sa place dans le projet lillois. D’où une certaine impatience, à Lille comme ailleurs, à l’idée de découvrir ce LOSC cuvée 2019-2020. Ça non plus, ça n’a pas changé, tiens.
Par Simon Butel