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Rennes-Milan : une mission vraiment impossible ?
Une semaine après sa défaite à San Siro (3-0), le Stade rennais sait ses chances de qualification pour les huitièmes de finale de la Ligue Europa infinitésimales au moment de recevoir l'AC Milan. Sans en faire des tonnes sur une potentielle remontada, les Bretons espèrent quand même vivre une soirée spéciale, voire irrationnelle au Roazhon Park.
Ils n’étaient pas nombreux, jeudi dernier, à penser que le Stade rennais n’avait pas perdu toutes ses chances de qualification en huitièmes de finale de la Ligue Europa, après une défaite lourde, mais plutôt logique, face à l’AC Milan (3-0). Chez les supporters – ils étaient environ 10 000 à s’être déplacés en Italie –, il fallait se réfugier derrière la phrase bateau « on ne sait jamais, dans le foot » ou se mettre dans le costume de Jean-Claude Dusse pour se dire que « sur un malentendu », ça pouvait peut-être passer. En zone mixte, au bout du labyrinthe de San Siro, l’optimisme n’était logiquement pas de mise une heure à peine après cette première manche perdue.
Seul Désiré Doué, le Rennais le plus en vue ce soir-là sur le terrain, s’était laissé aller à un message de croyance après que son entraîneur Julien Stéphan avait utilisé le terme « compromis » pour évoquer les chances bretonnes : « Dans le foot, il ne faut jamais baisser les bras. Notre détermination ne va pas changer, on abordera le match retour comme une finale. On y croit, sincèrement on y croit. » Une semaine plus tard, au moment de retrouver les Rossoneri au Roazhon Park, le discours est (un poil) plus mobilisateur et porteur d’espoir. Il ne reste que ça aux Bretons pour réaliser ce qui semblait impossible la semaine dernière, et ce qui paraît encore très difficilement imaginable à quelques heures du grand soir.
La Corogne-Milan 2004, l’exemple à suivre
Après le revers à Milan, il était trop tôt pour se projeter sur le retour, la priorité absolue était le match contre Clermont, remporté par le Stade rennais ce dimanche. C’était en tout cas ce que répétait Stéphan, qui a réveillé une équipe rennaise endormie (six victoires d’affilée en championnat) et qui a ouvert la porte à un scénario moins fataliste ce jeudi en conférence de presse : « Je vais essayer de définir le mot compromis : c’est mal engagé, mais pas terminé. On va jouer notre chance à fond demain, créer les conditions dès le début du match et faire le point à la mi-temps pour voir où on en sera. » Dans Ouest-France, le président Olivier Cloarec a timidement expliqué que « tout reste possible », il ne pouvait en même temps pas dire autre chose. Il y a une réalité, aussi, celle qui veut que les chances rennaises sont infinitésimales, et ce n’est pas parce que remontada figure désormais dans le dictionnaire qu’elles sont automatiquement plus grandes.
Il y a les souvenirs récents en Ligue des champions, bien sûr, du fameux Barça-PSG à celle de Liverpool contre ce même Barcelone, sans oublier toutes les autres, mais c’était à chaque fois entre deux équipes jouant dans la même cour. Un autre exemple, plus ancien, a été exhumé pour l’occasion, essentiellement parce qu’il concerne l’AC Milan. C’était il y a vingt ans, le 7 avril 2004, quand le Deportivo La Corogne tordait le grand Milan, celui de Paolo Maldini, Alessandro Nesta, Clarence Seedorf, Andrea Pirlo, Kaká ou Andriy Shevchenko au Riazor (4-0), quinze jours après avoir été giflé à San Siro (4-1). C’était le grand Depor, aussi, mais c’est une nuit magique, hors du temps, dont devra s’inspirer le Rennes de Stéphan. Sans trop en dévoiler, le technicien a laissé entendre qu’il pourrait se servir de ce précédent dans sa causerie d’avant-match, un exercice qu’il affectionne et qu’il sait préparer. « Des exemples, il n’y en a pas beaucoup, mais au moins quelques-uns sur lesquels on peut s’appuyer, a-t-il souri. On ne l’a pas encore fait, mais on va le faire. »
La quête de l’irrationnel
L’écart entre les deux équipes, constaté la semaine dernière à Milan, n’aura pas disparu en l’espace d’une semaine. Du haut des tribunes de San Siro, les Italiens avaient paru au-dessus techniquement et athlétiquement ; des adultes contre des adolescents. Du bord du terrain, aussi, apparemment, la différence avait été frappante. Les copains de Rafael Leão avaient livré un match très sérieux, mais ils n’avaient pas non plus semblé forcer, en parvenant à faire mal aux Bretons sur chaque accélération. « On aurait mérité de marquer un but, regrettait Benjamin Bourigeaud en conférence de presse ce mercredi. Il faudra de l’orgueil et avoir l’esprit revanchard. Quand on prend 3-0, même si c’est le Milan, on a envie de montrer un autre visage et de donner une grande soirée à nos supporters. » À ses côtés, Stéphan a dit qu’il « faudra toutes les planètes alignées », signe qu’il reste au moins encore cet espoir improbable.
Le championnat et la Coupe d’Europe sont deux choses différentes, pour Rennes comme pour Milan. Si les Rouge et Noir sont irrésistibles en Ligue 1 avant de se rendre à Paris ce week-end, ils savent que la marche est plus haute en Ligue Europa. Même si la défaite de Milan sur la pelouse de Monza (4-2) a réveillé quelques fantasmes chez les Bretons : après tout, il est possible d’en passer quatre à ces Rossoneri. « Il faut se demander comment on fait pour emballer le match et créer toutes les conditions ensemble pour essayer d’avoir une part d’irrationnel. On ne pourra pas jouer un match ordinaire, de toute façon, c’est une réflexion qu’on a menée avec les joueurs cette semaine, a détaillé Stéphan. Je crois qu’il faut sortir des sentiers battus et aller dans une forme de folie. Si on a quelque chose de très conventionnel, très calculé, on n’y arrivera pas, on se dira qu’ils sont plus forts que nous, et voilà. Il faut créer une atmosphère différente, ce sera l’objectif. » Alors, peut-être.
Par Clément Gavard