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Denis Zakaria a plus d’un tour dans son sac
Denis Zakaria a pris de l’épaisseur depuis son arrivée sur le Rocher, au point d’être propulsé capitaine de l’AS Monaco cet été. Son début de saison est du même acabit, imposant même une question : le Suisse peut-il être considéré comme meilleur milieu de terrain de Ligue 1 actuellement, voire, allons y franchement, le joueur du championnat ?
Cela faisait longtemps que l’Abbé-Deschamps n’avait pas eu à admirer telle prestation (du moins depuis le départ de Gauthier Hein, meilleur joueur de Ligue 2). Samedi, dans la lignée de ses premières sorties de la saison, le capitaine monégasque Denis Zakaria a livré un match d’une qualité rare. Brassard autour du biceps, buteur et passeur, l’international suisse a sorti de son chapeau tous ses atouts et a tout fait aux pauvres Auxerrois, confirmant une nouvelle fois sa prise de pouvoir récente dans l’effectif monégasque. Et à l’heure d’affronter le Barça pour entamer une nouvelle campagne européenne, cela ne sera pas de trop.
MVP, MVP, MVP! 🫡⭐️
You’ve chosen Denis Zakaria as our best player against Auxerre!
You were outstanding, @Deniszakaria8 🔥 pic.twitter.com/xO2kUh3RbY
— AS Monaco EN (@AS_Monaco_EN) September 16, 2024
Catapulté taulier
Il faut dire que, dans une formation de la Principauté amputée cet été de ses trois capitaines de la saison passée (Wissam Ben Yedder, Youssouf Fofana et Guillermo Maripán), Denis Zakaria avait à 27 ans le champ libre pour s’imposer en patron. Cette saison, seuls Takumi Minamino (29 ans) et Alexander Golovin (28 ans) sont plus âgés que lui à l’ASM. Déjà sur le pré puisque le natif de Genève fait partie des trois seules options à la disposition d’Adi Hütter pour incarner une des têtes du double pivot qui lui est si cher, les deux autres candidats étant les jeunes Lamine Camara et Soungoutou Magassa, 20 ans chacun. Un casting léger, a priori, pour jongler entre Ligue 1 et Ligue des champions.
Youssouf Fofana parti en fin de mercato, c’est une sacrée preuve de confiance en Denis Zakaria qu’ont témoignée le board et le staff du Rocher en ne recrutant pas pour remplacer l’international français. Il faut dire que, loin du box to box foufou de ses premières années suisses, l’ancien de Chelsea est un joueur plus que jamais complet, tour de contrôle et garant de l’équilibre du système Hütter. De quoi propulser automatiquement Denis Zakaria au rang de grand frère incontournable. Il n’y a qu’à voir le moment où, légèrement touché en fin du match face à Saint-Étienne en août, le Suisse de 27 ans a fait signe à son banc qu’il ne pouvait pas continuer. Tout Louis-II a retenu son souffle.
La pieuvre par l’exemple
Jérémy Frick se souvient des premiers pas en pro du capitaine monégasque, du côté de Servette lors de la saison 2014-2015. « Au club, tout le monde parlait de lui comme d’un diamant brut. Physiquement, il en imposait. Ses projections vers l’avant à grandes enjambées étaient impressionnantes, explique le portier formé à l’Olympique lyonnais. Je me souviens de l’un de ses premiers matchs, face à Wolhen en championnat. Il avait été extraordinaire d’impact physique. Ça compensait le fait qu’à l’époque, il était un peu brut de décoffrage techniquement, un défaut qu’il a d’ailleurs largement compensé depuis. » Deux ans plus tard, c’est Yoric Ravet qui a croisé le chemin de Zakaria, aux Young Boys de Berne. La description est du même acabit : « Dans un style à la Blaise Matuidi, il récupérait un nombre incalculable de ballons et se projetait sans arrêt. Mais oui, techniquement, c’était perfectible. »
Depuis, le monde a changé de décennie et Denis Zakaria de registre, délaissant progressivement le style charo pour se rapprocher d’un profil à la Paul Pogba. C’est avec une aisance folle balle au pied qu’il a par exemple écœuré les Auxerrois, cassant le pressing, brillant dans les petits périmètres comme au large. Son ouverture sur le but du break signé Vanderson à la demi-heure en est la meilleure illustration. « Au fil des années, il a changé un peu de profil, souffle l’attaquant Yoric Ravet. C’est un tout. Le travail, l’expérience, le vécu. Et puis, chose très importante, Denis sait qu’Adi Hütter lui voue une énorme confiance. Et ça, ça peut changer pas mal de choses. Vous n’êtes plus le même joueur. »
Captain Zakaria is on another level 🇨🇭©️ pic.twitter.com/8gY9S9BhG1
— Ligue 1 English (@Ligue1_ENG) September 16, 2024
Adi Hütter, un deuxième père
En effet, entre Denis Zakaria et son entraîneur autrichien, l’histoire ne date pas d’hier. « Adi est un peu le coach qui a lancé Denis dans le grand bain, au très haut niveau, en Coupe d’Europe notamment avec les Young Boys, continue Ravet. À Servette, il n’avait connu que la D2. Et il correspond parfaitement au style Hütter. » L’Autrichien et son poulain ont également collaboré pendant une saison à Mönchengladbach, en 2021-2022. Fin 2023, en conférence de presse, Adi Hütter parle même d’une relation père fils avec un joueur qu’il n’hésite pas à piquer. « Il a de l’expérience, est quelqu’un d’impliqué dans un vestiaire, parle quatre langues… Sa prochaine étape pour devenir un joueur de classe mondiale est de mieux aider ses partenaires, les pousser, les motiver, leur dire les bonnes choses aux bons moments », lâchait-il à l’époque dans des propos rapportés par L’Équipe.
Un message reçu cinq sur cinq par l’intéressé, promu capitaine six mois après. « Là, aussi, je pense qu’être avec Adi a dû le libérer, même si le connaissant, c’est plus un leader par l’exemple sur le terrain qu’un gueulard », ajoute Yoric Ravet. Cerise sur le gâteau, Denis Zakaria se met même à marquer. « Adi explique souvent que je suis moyen de la tête, c’est pour ça que je suis souvent derrière sur les corners », expliquait l’intéressé fin 2023. Dans ce domaine aussi, l’ancien de Gladbach s’est découvert de nouvelles aptitudes, en témoigne le but inscrit face à Lens ce mois-ci. « C’est vrai qu’avec le gabarit qu’il a (1,91m, NDLR), c’était dommage d’avoir du mal de la tête », s’amuse Yoric Ravet, heureux de voir son pote plus épanoui et performant que jamais. Ce jeudi, la Principauté signerait bien pour que ce soit au tour du Barça, d’avoir mal à la tête.
Par Adrien Cornu