- C1
- 8es
- Liverpool-PSG (0-1, 1-4 TAB)
Nuno Mendes, secret défense
Apparu en grande difficulté sur le plan défensif lors de certains grands rendez-vous européens du PSG ces dernières saisons, Nuno Mendes a impressionné en muselant Mohamed Salah à deux reprises contre Liverpool. Comment expliquer cette incroyable progression du latéral parisien, et peut-elle durer ?

Si c’était sa dernière sortie en Ligue des champions (ou du moins avec un maillot rouge sur le dos), cette élimination risque de provoquer quelques cauchemars au cœur des prochaines nuits de Mohamed Salah. Des terreurs nocturnes qui auront un visage pour l’Égyptien, celui de Nuno Mendes. Près d’un an après avoir souffert le martyre face à Jadon Sancho en demi-finales, une mauvaise habitude lors des gros rendez-vous de C1 du PSG, le latéral portugais a régné sur son duel face au meilleur joueur d’Angleterre. Des ballons récupérés à la pelle, des interventions toujours bien senties et même un sauvetage devant sa ligne après quelques minutes à Anfield : à l’exception de cette saute de concentration sur le but de Harvey Elliott à l’aller, Mendes a étalé une palette défensive impressionnante. Les progrès qu’il a réalisés dans ce domaine sont colossaux.
La tête avant les jambes
Six jours après avoir été pointés du doigt pour leur responsabilité sur le but d’Elliott dans les dernières minutes, Gianluigi Donnarumma et Nuno Mendes ont donc pris leur revanche sur la pelouse d’Anfield. Dribblé une fois par Salah dans les premiers instants, le Portugais a ensuite vu son vis-à-vis passer proche de l’ouverture du score à deux reprises (dont une frappe déviée devant la ligne par ses soins). Et puis, plus rien. Ou plutôt un scénario proche de celui du Parc des Princes, quand six jours plus tôt, le meilleur joueur du Royaume avait fini dans la poche arrière du défenseur formé au Sporting Portugal. « C’était une source d’inquiétude avant les matchs, reconnaît a posteriori Didier Domi, ancien habitué du poste porte d’Auteuil. Pas dans le côté physique, mais plutôt dans l’aspect de la lecture du jeu, quand intervenir, quand ne pas se jeter. Défendre, c’est beaucoup d’observation et de concentration, on l’attendait sur ça et il a été extraordinaire. »
Il y a des joueurs qui n’arrivent pas à gommer leurs carences, mais lui n’a fait que progresser. Maintenant, c’est un monstre parce qu’il joue avec sa tête et en plus de ça, il a le physique.
En 120 minutes, l’international portugais a remporté onze de ses seize duels, récupéré huit ballons et coupé un nombre incalculable d’offensives anglaises. Une deuxième prestation de haut vol en une semaine qui dévoile des progrès insoupçonnés – du moins de cette ampleur-là – dans le domaine défensif. Ce développement tient avant tout de l’aspect mental. « Le football, ça démarre dans la tête, pas dans les jambes. Et lui jouait trop avec les jambes, alors qu’il est intelligent, détaille Domi. Il pensait pouvoir rattraper les coups avec sa puissance, mais ça ne marche pas comme ça. Par exemple, si tu enlèves 10 centimètres à Van Dijk, ce sera toujours un grand défenseur ; tu enlèves 10 centimètres à Neuer en 2014, ce sera toujours le meilleur gardien du monde. Il y a des joueurs qui n’arrivent pas à gommer leurs carences, mais lui n’a fait que progresser. Maintenant, c’est un monstre parce qu’il joue avec sa tête et en plus de ça, il a le physique. »
Des qualités de vitesse et de puissance qu’il a toujours optimisées pour se muer en atout offensif majeur, et ce, depuis ses premières courses sur un terrain de football. En début de saison, son rôle de troisième relanceur bridé par Luis Enrique avait fait débat, le technicien espagnol misant sur son apport dans la ligne défensive plus que sur ses fulgurances de l’autre côté du terrain. Et c’est donc dans ce domaine qu’il a bluffé son monde à Anfield. « Pour un latéral, c’est très important d’arriver très vite dans la zone d’inconfort de l’attaquant, pas plus d’un mètre 50, reprend Domi. Pour ça, il faut du timing. Désormais, il cadre encore mieux son attaquant. »
Les p’tits jeunes qui montent, qui montent, qui montent
Tout comme Mendes, huit des seize Parisiens à avoir foulé la pelouse d’Anfield mercredi soir ont 23 ans ou moins. Et tous affichent une courbe de progression croissante sous les ordres de Luis Enrique et au sein d’un projet qui rallie de plus en plus d’adeptes au fil des semaines. « On est très pressés dans le football, juge encore Domi à propos des doutes qui ont parfois entouré les qualités défensives de l’intéressé. Il est à l’image de tous les jeunes de cette équipe. Tu as vu comment ils arrivent à tous prendre de la bouteille ? » Le maître mot pour les semaines, mois et même années à venir dans la ville lumière ? Patience. Et ambition aussi, au vu des nombreux caps déjà franchis par cette bande de jeunots aux dents longues.
Ce qu’il a montré contre Liverpool, c’est exactement ce que l’on doit attendre de lui. On a vu qu’il est capable de le faire contre un potentiel Ballon d’or.
Récemment prolongé pour le plus grand bonheur des supporters parisiens, le gamin de Sintra est désormais attendu au tournant. Saura-t-il répondre présent lors des prochains sommets européens ? « Ce qu’il a montré contre Liverpool, c’est exactement ce que l’on doit attendre de lui. On a vu qu’il est capable de le faire contre un potentiel Ballon d’or, estime Domi, qui espère que l’avenir de son successeur rimera désormais avec régularité. L’inconstance est parfois acceptable dans des clubs moyens, mais ce n’est pas le cas du PSG. Il faut qu’il ait cette culture de l’excellence et de la constance. »
Le tout sans se départir d’un apport non négligeable balle au pied, à l’image de sa passe tranchante vers Ousmane Dembélé qui déclenche l’action du but. Domi : « Ce qu’on lui demande maintenant, c’est vraiment d’être un défenseur, surtout que la sortie de balle passe de plus en plus souvent par lui. Avec sa vélocité et sa puissance, on lui demande de gagner des mètres à la sortie et la conservation du ballon. Il fait partie des meilleurs en Europe pour faire ça. » Avec une telle palette, Nuno Mendes et son gang risquent de terroriser plus d’une légende du continent.
L'agent de Donnarumma fait le point sur sa prolongationPar Tom Binet
Propos de Didier Domi recueillis par TB.