- C1
- 8es
- Atlético-Inter (2-1, 3-2 TAB)
Gloire aux tirs au but
Huit ans qu'on avait fait sans en Ligue des champions, mais ils ont fait leur retour deux fois en deux soirées de Ligue des champions. Eux, ce sont les tirs au but, le plaisir absolu et éternel de tout amateur de foot.
La Ligue des champions est censée être un rendez-vous. Ce rendez-vous hebdomadaire, dont l’unique raison d’être réside dans sa capacité à offrir un spectacle de 90 minutes que l’on décrit comme le plus beau et le plus intense de la planète bleue. Pourtant, en cette saison 2023-2024 (et depuis la saison dernière en réalité), la compétition a perdu de sa superbe. Comme happée par la pression du résultat et la qualité de ces joueurs de plus en plus jeunes, et de moins en moins emballants balle au pied. Il fallait donc trouver une solution. Elle est venue d’une tradition séculaire, qui nous procure un stress dont nous ne connaissons jamais la provenance, mais dont nous apprécions l’existence. Un stress nommé « tirs au but ».
Cette édition de la Ligue des champions a donc amené avec elle un petit moment d’histoire. En effet, sept ans et demi durant, aucune séance de tirs au but n’avait été disputée en 210 matchs à élimination directe. Des chiffres surprenants, puisque pour trouver trace du dernier penalty fatidique frappé en Europe, il fallait remonter au 28 mai 2016 à San Siro, et un tir victorieux de Cristiano Ronaldo pour offrir sa onzième C1 au Real Madrid. Une éternité, que l’univers s’est chargé de rattraper en deux soirées de ce mois de mars. Ce mardi, Arsenal éliminait ainsi Porto au terme d’une partie morose, quand ce mercredi soir, l’Atlético se chargeait d’évincer l’Inter après un duel extrêmement séduisant. De quoi redonner une excitation, que l’on pensait perdue, à ces soirées européennes.
Un jeu de gamins
En fil rouge de ses retrouvailles avec les « tirobs », il est d’ailleurs intéressant d’évoquer l’Atlético. Les Colchoneros sont effectivement les fiers propriétaires des trois dernières séances disputées avant ces sept années de disette (le 17 mars 2015 face au Bayer Leverkusen, le 15 mars 2016 contre le PSV, et donc le 26 mai 2016 face au Real Madrid). En gagnant contre l’Inter, les hommes de Diego Simeone sont également devenus les premiers à remporter trois séances en Ligue des champions. Mais l’essentiel n’est pas à chercher dans les statistiques. Il est ailleurs. Dans les émotions. Là où la peur prend le dessus sans que l’on ne sache pourquoi, et sans même supporter les équipes engagées.
Si l’instauration de la VAR puis la suppression du but à l’extérieur en Europe font planer le doute concernant le chemin trop rationnel que prend le football, les tirs au but répondent toujours présents pour nous ramener à notre folie. Des analyses foireuses à chaque tentative manquée, en se disant que l’on aurait certainement mieux placé le ballon que le footballeur – pourtant professionnel – qui s’est élancé sous nos yeux, à vérifier scrupuleusement que le gardien a bien gardé un pied sur sa ligne, et à jouer au devin en répétant inlassablement « il va rater, c’est sûr », en se fiant grossièrement au langage corporel des joueurs. De la loterie, diront certains, un affrontement psychologique, penseront les autres. Ce qui est certain, c’est que rien, absolument rien, ne peut remplacer le délicieux bordel offert par une dernière séance.
Par Adel Bentaha