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Rennes, le saut dans l'inconnu
Après une saison largement ratée, le Stade rennais a lancé une nouvelle ère et pourrait connaître un important renouvellement de son effectif cet été. Le défi peut inquiéter comme il peut susciter l'excitation de la nouveauté autour du club breton, qui a les reins solides mais qu'on ne saura pas trop où placer sur la ligne de départ le 17 août.
À leur retour de vacances et au moment de retrouver le frisson du championnat dans un peu plus de quinze jours, les supporters rennais pourraient ne pas reconnaître leur équipe. Il restera heureusement quelques points de repère : le maillot rouge et noir, le Roazhon Park, la galette-saucisse, Steve Mandanda dans les bois et Julien Stéphan sur le banc, par exemple. Le technicien breton, revenu sur sa terre natale l’automne dernier pour succéder à Bruno Genesio, ne peut lui-même pas encore savoir quels noms il couchera sur la première feuille de match de la saison, le week-end du 17 août pour la réception de Lyon. « J’ai aussi des interrogations sur l’ossature réelle lors de la première journée de championnat, donc j’ai besoin de tenter des choses », admettait-il ce samedi à Vitré, après le succès de son équipe en amical face à Angers (2-1).
Bref, on a un nouveau défenseur central. 🛡️
Leo Østigård est Rouge et Noir ! 🔴⚫️#DegemerMatLeo pic.twitter.com/JuVEvLIpqJ
— Stade Rennais F.C. (@staderennais) July 30, 2024
Le dernier mouvement, officialisé ce mardi matin, est une arrivée : Leo Østigård, défenseur central de 24 ans, débarqué de Naples et rejoignant les premières recrues nordiques Albert Grønbaek (Bodø/Glimt, 15 millions d’euros) et Glen Kamara (Leeds, 10 millions d’euros), en plus du retour du jeune Mohamed Jaouab. Le Stade rennais s’est surtout montré actif dans le sens des départs (plus de 70 millions d’euros de vente, déjà), entre celui d’Enzo Le Fée pour la Roma, ceux de Martin Terrier et de Jeanuël Belocian pour le Bayer Leverkusen, le prêt de Fabian Rieder à Stuttgart ou encore la signature de Guela Doué à Strasbourg. Ce n’est pas terminé, loin de là, et la rentrée devrait ressembler à un grand saut dans l’inconnu pour un club que l’on ne saura pas trop où placer sur la ligne de départ.
L’été de la page (presque) blanche
Certains diront que le Stade rennais avait besoin de se régénérer après une saison ratée dans les grandes largeurs et ponctuée par une dixième place au classement, synonyme de non-qualification pour une Coupe d’Europe, une première depuis 2017. Florian Maurice est parti, Frederic Massara est arrivé, confirmant un peu plus le début d’une nouvelle ère. Le probable départ de Benjamin Bourigeaud, légende du club breton où il fait la pluie et surtout le beau temps depuis sept ans, pourrait acter définitivement la bascule. « Bien sûr que je veux le garder, clamait Julien Stéphan entre deux annonces buvette par la sono de Vitré ce week-end. Mais il y a des joueurs qui sont partis et que je voulais garder aussi. » Le directeur sportif franco-italien aimerait également conserver le Ch’ti breton, qui pourrait cette fois mettre les voiles, peut-être au Qatar, où Al-Duhail, le club de Christophe Galtier, souhaiterait l’attirer, selon les informations de L’Équipe. En un été, les habitués du Roazhon Park pourraient donc perdre leur symbole (Bourigeaud), leur chouchou (Terrier) et leur promesse (Désiré Doué), pour laquelle se battent le Bayern Munich et le Paris Saint-Germain.
Une page blanche, ou presque, même si Amine Gouiri devrait rester, comme les récentes recrues (Azor Matusiwa, Alidu Seidu) et que d’autres (Baptiste Santamaria, Arthur Theate, Arnaud Kalimuendo, etc.) ne sont pas encore partis. Ce grand chamboulement peut-il vraiment être bénéfique ou sera-t-il un caillou dans la chaussure de l’entraîneur rennais ? « Il faudra peut-être avoir un peu de patience, mais on est prêts à la donner, en tout cas on est armés pour ça, répondait Stéphan. Ça veut dire reconstruire, redonner des repères, une âme collective, impulser une dynamique. Pour un entraîneur, un club, un staff, c’est aussi une idée intéressante. Pas facile, mais excitante. » Il sait pourtant que le temps n’a plus sa place dans le foot d’aujourd’hui et qu’un bon départ est essentiel pour rappeler que le Stade rennais a sa place parmi les ambitieux dans l’Hexagone.
Des chiffres et des cœurs
Il s’agira d’éviter les écueils du passé et de tirer dans le même sens, cette fois. Ce qui semble pour l’instant être le cas avec Massara, quand les désaccords étaient plus nombreux avec Maurice (deux visions peut-être trop différentes). Cela passera aussi par l’environnement du club breton, qui a tendance à se transformer en univers impitoyable à la Dallas à la moindre secousse. Les jeux d’influence sont partout, mais à Rennes ils sont parfois un peu plus pesants qu’ailleurs et les personnes qui murmurent à l’oreille des décideurs, voire de l’entraîneur, ne sont pas toujours armées des meilleures intentions. Ce qui peut créer un climat étrange, une sorte de paranoïa ambiante un poil dérangeante, des choses auxquelles les clubs de foot sont désormais habitués, malheureusement.
C’est dans ce contexte qu’est arrivé Massara et son joli CV italien (Palerme, Roma, AC Milan, etc.) On le dit travailleur, déterminé, ambitieux et très compétent dans son domaine, sans que l’on ne puisse encore deviner s’il fera les beaux jours des Rouge et Noir. « Ce n’est pas moi qui doit changer le Stade rennais. Éventuellement, c’est moi qui doit essayer de m’épanouir dans la structure qui marche et continuera de marcher, posait-il dans un français impeccable lors de sa présentation mi-juillet. Je veux simplement me mettre au niveau de ce club, de son exigence (…) Si on arrive à être compétitif en ayant une politique qui nous permet d’être durable, un mot un peu à la mode dans tous les secteurs du foot, c’est une chance. La priorité, c’est de gagner les matchs. »
L’échec du dernier exercice n’a pas stoppé l’engouement sur les bords de la Vilaine, où ils sont quelques milliers à être sur liste d’attente pour tenter d’arracher un précieux sésame après 96% de réabonnements. Il reste cette peur de retomber dans un certain anonymat, après six saisons passées à se déplacer aux quatre coins de l’Europe et à voir le club grandir, tout en se cognant la tête sur un maudit plafond de verre, structurel et sportif. Le club breton a les reins solides, en tout cas, à force de multiplier les ventes importantes (et encore celle de Désiré Doué et d’autres sont à venir) et avec son actionnaire, la famille Pinault, dont l’un des petits-fils a récemment intégré le conseil d’administration du SRFC. La rénovation du centre d’entraînement de la Piverdière doit être bouclée en 2026, le dossier du nouveau stade (à quelques centaines de mètres de l’actuel) reste totalement ouvert. Les bases sont là, mais les amoureux de foot ne sont pas des comptables : c’est sur le terrain, comme toujours, que ce « nouveau » Stade rennais va devoir conquérir les cœurs.
Par Clément Gavard