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À Nantes, le Kita Circus repart en tournée
Après un exercice 2023-2024 standard pour les Nantais, avec un maintien acquis au bout de la saison à la suite du retour d’Antoine Kombouaré, le ciel s’est de nouveau assombri au-dessus de la Jonelière. Barragiste, et toujours pris en étau par le feu croisé entre les Kita et le public, le FC Nantes replonge (encore) dans la crise.
Le 30 novembre à Paris, le 15 décembre à Brest, le 5 janvier à Lille : après plusieurs mois d’entracte, le « Kita Circus » repart en tournée dans toute la France. Même s’il faut avouer que ce sont bien les représentations à la Beaujoire qui s’avèrent les plus étonnantes, avec un public partie prenante du spectacle qui s’invite sur la piste, quitte à interrompre deux fois la représentation, comme ce dimanche, face au Havre. Un début de soirée marqué par une quatrième défaite consécutive pour les Nantais, qui sont barragistes après 12 journées, avec leur pire total de points à ce stade depuis 18 ans et une saison qui avait débouché sur une relégation. De quoi avancer la traditionnelle crise existentielle annuelle de ce géant du football français, qui n’en finit plus de tourner en rond, tout en ne tournant pas rond.
Le point de rupture déjà atteint
Avant la réception du Havre, le public de la Beaujoire avait donné le ton, avec une énième banderole pleine d’ironie de la Brigade Loire, dont on ne peut que saluer la capacité à se réinventer pour tenter de faire passer le même message depuis des années. « De la direction jusqu’aux joueurs, vous n’êtes que des touristes. Bienvenue au football club Med de Nantes », affichait cette fois le principal groupe de supporters nantais, avant de provoquer une première interruption de la partie à la 23e minute. La faute cette fois à un message à destination de la LFP (« Divorce consommé, vous avez perdu toute crédibilité »), accompagné de rouleaux de papier toilettes et de balle de tennis. Un déluge qui a permis aux joueurs nantais de nettoyer leur surface efficacement au moins une fois dans la soirée. Car, sur la pelouse, les hommes du GO Kombouaré étaient une nouvelle fois désorientés.
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— GaëlP #KitaOut (@GaelPicard) November 24, 2024
Alors, en fin de rencontre, la Brigade Loire a haussé le ton, et montré les muscles, menaçant d’envahir la pelouse à trois minutes du coup de sifflet final, après une nouvelle pluie de projectiles. Chose rare, mais rien n’est impossible par le Kita Circus, une quarantaine de CRS ont alors pris la place de Nicolas Pallois et des siens sur la pelouse, pour empêcher l’envahissement du terrain. Après une grosse demi-heure de troubles, la rencontre a pu aller à son terme, devant une Beaujoire bien vidée, mais où régnait toujours un parfum insurrectionnel de ras-le-bol. « Les supporters sont très critiques, mais ils ont raison », a reconnu Antoine Kombouaré. « On n’a rien à dire, on est dans une série catastrophique. On n’est pas en fin de saison, ce n’est pas insurmontable », a ensuite remobilisé l’homme des maintiens de 2021 et 2024, et surtout de la Coupe de France 2022.
Un géant en mort cérébrale
Une fois n’est pas coutume, l’entraîneur nantais pourrait résister à cette nouvelle tempête, étant soutenu par les deux autres branches de ce mauvais ménage à trois : les Kita, et les supporters. Mais aussi par les joueurs, comme l’a rappelé son capitaine Alban Lafont : « Il a le soutien de toute l’équipe. Lui aussi donne le maximum avec nous, il apporte beaucoup à tout le monde. On s’est mis ensemble dans cette situation, il en fait partie. La seule chose qu’il veut, c’est d’en sortir. Il faut lui laisser le temps. » Pourtant, le bilan d’Antoine Kombouaré est nettement moins bon que lors de son premier passage, avec 0,9 point de moyenne contre 1,41 entre 2021 et 2023. Pire encore : le Kanak traîne comme un boulet la série catastrophique des siens à domicile, avec un seul succès et 11 défaites en 14 matchs à la Beaujoire en 2024. Sur leur pelouse, les Canaris sont si dociles que même Grosminet viendrait y prendre les trois points sans se fouler.
En dehors, ils se font allumer par les anciens, à l’image de Pierre Aristouy, démis de ses fonctions il y a un an, après un nul contre… Le Havre. « Ce match venait à la suite de trois défaites. Ce qui me gêne avec les Kita, c’est que si sur les 19 frappes ce jour-là contre les Normands, une était rentrée, je n’aurais pas été écarté à ce moment-là. C’est la résultante d’un manque de stratégie et de visibilité. À la limite, j’aurais presque peut-être plus compris qu’ils me limogent après la défaite à Metz. Aujourd’hui, si j’ai bien compté, le FCN actuel est à 8 matchs sans succès, non ? Est-ce que moi, j’aurais survécu à 8 matchs sans victoire ? », a piqué l’ancien coach. Une sortie qui vient rappeler que le mal est profond chez l’octuple champion de France qui, en 2020, a clos sa première décennie sans titre de champion de France depuis les années 1950.
Les cœurs jaune et vert ont toutefois pu se consoler avec la Coupe de France 2022 et l’épopée européenne qui a suivi. Mais quand ont-ils eu le droit au bonheur en championnat pour la dernière fois ? Jamais. Depuis le titre de 2001, sans parler de l’extinction du chatoyant jeu local, le FC Nantes termine en moyenne à la 13e place (en 18 saisons), avec une seule qualification européenne (pour l’Intertoto) en 2004. Et aucune sous la présidence de Waldemar Kita, arrivé en 2007 à la Jonelière. Si les Nantais ne sont peut-être pas les plus à plaindre, leur colère ne peut qu’être audible après près d’un demi-siècle à survivre loin de leur passé, privés des sommets auxquels ils avaient été habitués. Car si les grands clubs ne meurent jamais, l’état végétatif des Canaris depuis 23 ans est peut-être encore moins enviable qu’un destin à la bordelaise. Et, à force, même loin du château des Ducs, le « Kita Circus » finit par lasser.
Antoine Kombouaré comprend la colère des supporters nantaisPar Adrien Hémard Dohain