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Et le Barça se réinventa
Renversant face à l’Atlético de Madrid, le FC Barcelone a repris la tête de la Liga, cinq jours après avoir rallié les quarts de Ligue des champions. Ce succès porte l’empreinte de Hansi Flick et des jeunes qui subliment l’ADN Barça en le modernisant.

Club historique s’il en est, le FC Barcelone a toutefois constamment lutté pour sortir de l’ombre du Real Madrid. Le rival mange tout, aussi bien au niveau sportif que médiatique, raflant tous les titres et recrutant les meilleurs joueurs, souvent au nez et à la barbe du Barça, comme lors des transferts d’Alfredo Di Stéfano, de Luís Figo ou de Michael Laudrup. Pour se défaire de cette présence encombrante, les Catalans ont fait ce qu’ils maîtrisent le mieux : se démarquer. Sous l’initiative de Johan Cruyff, comme joueur, puis en tant qu’entraîneur, le club est devenu une institution. Le jeu fait de passes courtes, de possession à outrance, de triangles imaginaires dans cinq couloirs tout autant fictifs et de gardiens libéros a été calqué de génération en génération, permettant de remporter cinq Ligues des champions avec une recette similaire.
Pep Guardiola et Luis Enrique, les plus fidèles disciples du Hollandais volant, ont réussi à marcher sur ses pas, tout en modernisant la tactique du jeu de position pour faire face à l’Inter Milan et au Real de José Mourinho, à la Juventus de Massimiliano Allegri, au Manchester United d’Alex Ferguson ou encore à l’Atlético de Madrid de Diego Simeone. Autant d’adversaires qui ont fini par plier devant les séquences ultra énergivores des Blaugrana. « Ça nous demandait beaucoup d’efforts de les presser, de les empêcher de mettre leur jeu en place, et eux, peu importe tout ça, ils tenaient leur idée et ne s’affolaient pas. C’est aussi pour ça qu’on a essayé de les perturber avec d’autres stratégies, parfois au-delà du terrain… », expliquait Raphaël Varane, défenseur de la Maison-Blanche s’employant à contrer les assauts de Lionel Messi et compagnie, dans le dernier magazine So Foot consacré à Guardiola.
Un Allemand pour modifier l’ADN
En plus de l’ombre de l’ennemi madrilène, le Barça a dû composer avec le succès passé du coach catalan, ensuite parti au Bayern et à Manchester City. Luis Enrique s’en est accommodé, pas Tata Martino, Ernesto Valverde, Quique Setién, ni même son fidèle métronome du milieu, Xavi. Arrivé en mai dernier pour remplacer l’ancien capitaine historique, Hansi Flick est arrivé sur le banc avec la ferme idée de dépoussiérer ce jeu de plus en plus chloroformé et de moins en moins adapté au haut niveau. Le natif de Heidelberg, en Allemagne de l’Ouest, est arrivé avec l’avantage d’être complètement immaculé, de n’avoir jamais baigné dans cet autoproclamé ADN Barça et de se placer au second plan quant aux fractures internes qui fragilisent le club depuis plusieurs années. Après avoir dynamité la Bundesliga et l’Europe pendant la période Covid, le tacticien de 60 ans est venu infecter l’Espagne d’un jeu plus direct.
C’est la meilleure équipe de Liga, qui joue le meilleur football.
Ne comptez pas sur le FC Barcelone pour rester dans sa surface et se contenter uniquement de contres, les 75 buts en Liga cette saison, 16 de plus que le Real, prouvent son appétence toujours aussi forte pour l’offensive. Dimanche, c’est l’Atlético, pourtant si solide et bénéficiant d’une avance de deux buts à 20 minutes du terme, qui a subi la tempête blaugrana de plein fouet. Cette victoire (2-4) permet aux Catalans de reprendre la tête du championnat. Et si elle compte le même nombre de points que la Casa Blanca, la formation de Hansi Flick est « la meilleure équipe de Liga, qui joue le meilleur football », selon El Cholo Simeone lui-même. Dès son arrivée, l’Allemand avait prévenu : « Ici, la tradition est de jouer avec beaucoup de passes, mais je veux aussi que mes joueurs aillent directement vers le but adverse, en étant focalisés sur l’idée de marquer. Je ne pense pas que mon style ait beaucoup changé, je recherche toujours la même chose : presser haut et jouer dans le camp adverse. » Une forme de continuité avec Pep Guardiola qui ne garantissait pas de titre, mais promettait des sensations fortes.
🇪🇸 #LALIGA ⚽️ Le Barça en mode remontada contre l'Atlético Madrid ! pic.twitter.com/damParjF1H
— beIN SPORTS (@beinsports_FR) March 16, 2025
En matière d’émotions, les supporters sont servis cette saison. Face à l’Atlético, les coéquipiers de Ferran Torres, auteur d’un doublé, ont signé leur 33e succès de la saison toutes compétitions confondues, et leur 23e avec au moins deux buts d’écart. Au-delà du 7-0 infligé à Valladolid, du 4-1 collé au Bayern ou des quatorze buts marqués en trois matchs à Valence, deux prestations symbolisent la force de cette équipe : les Clásicos. Après le 0-4 en championnat, le Barça a collé un 2-5 au Real en Supercoupe d’Espagne. Les chocs ont tourné court lorsque les Catalans se sont engouffrés dans les moindres espaces laissés par le milieu madrilène après les avoir étouffés d’un pressing plus qu’intense. Cette volonté de courir toujours plus que l’adversaire apporte un vrai changement visuel par rapport aux anciennes versions qui semblaient parfois ronronner.
Nés pour briller
Pour multiplier les efforts aux quatre coins du terrain, mieux vaut compter sur une bande de jeunes morts de faim. Aux côtés d’un Robert Lewandowski vieillissant, mais toujours habile dans le dernier geste, les ailes sont animées par Raphinha et Alejandro Baldé à gauche, ainsi que Lamine Yamal et Jules Koundé à droite. Dans le même temps, Pau Cubarsí a la capacité de rattraper les 40 mètres laissés dans son dos, tandis que le tandem Pedri-Marc Casadó contrôle parfaitement le tempo au milieu, aussi bien capable de poser le pied sur le ballon que d’envoyer des flèches dans tous les sens pour des offensifs qui savent pleinement les utiliser.
Car si Hansi Flick et ses prédécesseurs travaillent avec l’ombre de Pep Guardiola, les attaquants du Barça, eux, savent que le fantôme de Lionel Messi, parti en 2021, plane toujours au-dessus du Camp Nou. Cette saison, le trio du front de l’attaque s’en affranchit, notamment Raphina et Yamal, bizuths à ce niveau-là, qui explosent le plafond de verre avec une insouciance déconcertante. Ils ont notamment permis à leur équipe de se classer deuxième de la phase de ligue de C1 et de se qualifier en quarts de finale après avoir disposé du Benfica avec trois buts du Brésilien et un bijou de l’Espagnol. Cet effectif rajeuni a pris la relève sans problème, Cubarsí a décapé l’image écornée laissée par Gerard Piqué des dernières années, Pedri se révèle au niveau des ambitions placées en lui depuis les retraites de Xavi et Andrés Iniesta, tandis que Koundé prend ses aises dans le costume de meilleur latéral du club depuis un paquet d’années. Enfin débarrassé de ce passé aussi glorieux qu’encombrant, le Barça continue sa saison presque parfaite, avec l’objectif de prouver qu’il est possible de gagner des titres autrement.
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