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L’homme Delaney
Pas forcément le joueur le plus visible du BvB, Thomas Delaney, fraîchement arrivé au Borussia Dortmund en début de saison, compte parmi les pièces maîtresses de l’effectif de Lucien Favre. En compagnie d’Axel Witsel, l’international danois compose la clé de voûte de la réussite des Schwarzgelben.
Deux jours avant le début de la Coupe du monde, une émission de radio danoise propose un débat portant sur le daltonisme. Après le témoignage d’un dénommé Søren, c’est un certain Thomas qui intervient à l’antenne pour faire part de son expérience. Extrait :
« Je confonds le rouge et le vert. Je ne dirais pas que c’est très gênant, mais il arrive que ça le soit quand même par moment. L’autre jour sur le terrain, c’était un peu compliqué de voir qui était dans mon équipe et qui étaient les adversaires.
– Vous jouez pour une équipe rouge ou verte ?- Pour une équipe rouge.
– Pour quelle équipe jouez-vous Thomas ?- L’équipe nationale du Danemark. »
Médusés, les deux animateurs se rendent alors compte que l’homme qu’ils ont au bout du fil n’est autre que Thomas Delaney, dont le Mondial avec le Danemark commence à peine quelques jours plus tard. L’anecdote prête à sourire, mais elle en dit long sur la simplicité du bonhomme qui ne rechigne pas à afficher ses faiblesses au grand jour. Pour lui de toute façon, la seule vérité acceptable est celle du terrain.
Hallo Dortmund @BVB,Herzlichen Glückwunsch zu eurem neuen dänischen Helden! Gut dass Ihr in gelben Trikots spielt!Viele Grüsse, P3 Dänemark#borussiadortmund #bvb #DanskerbingoP3 pic.twitter.com/ZK5IdF3FHQ
— DR P3 (@drp3) 12 juin 2018
Né pour être allemand
Quand il était petit, Thomas Delaney aurait aimé être pilote de Formule 1. Bon, il n’est jamais devenu le successeur de Tom Belso, Jan Magnussen et Nicolas Kiesa, mais cela ne l’a pas empêché de trouver son bonheur ailleurs. Sur le rectangle vert, il effectue ses classes au FC Copenhague et participe à l’épopée 2010-2011, lorsque le club de la capitale devient le premier représentant danois à passer les poules de la Ligue des champions (avant de se fair sortir par Chelsea). Auréolé de cinq titres et de quatre coupes nationales, il lui fallait tenter un challenge un poil plus relevé. Il y a deux hivers, une porte de sortie s’est ouverte à lui, à quelques centaines de kilomètres de son royaume natal.
Au Werder Brême, Thomas Delaney ne tarde pas à imposer sa patte pendant la phase retour (quatre buts en treize matchs). Surtout, il découvre un nouveau monde, plus dur que celui du football danois, mais pas insurmontable pour autant : « Ici, ils sont du genre à vouloir marquer un but de plus que l’adversaire, avec de préférence un 4-3 plutôt qu’un 1-0 au bout du compte. C’est la plus grande différence par rapport à chez moi. La Bundesliga a une mentalité d’attaque et je le remarque dans chaque équipe. » Ce qui n’est pas pour lui déplaire : « Je n’aime pas les matchs subtils. J’aime courir et aller au duel. » Et même si son Werder n’a plus rien à voir avec l’époque où les Vert et Blanc trustaient les premières places du classement, l’atmosphère générale, elle, reste authentique : « Le problème au Danemark, c’est qu’on ne joue que quatre matchs européens dans l’année. Ici, j’ai l’impression de jouer la Ligue des champions tous les week-ends ! » Rien que ça.
Le leader à pas cher
Quitte à la jouer symboliquement le samedi, pourquoi ne pas la revivre en vrai en semaine ? Cela tombe bien pour lui, Lucien Favre a une équipe à rebâtir pour rouler sur la Bundesliga. Et en bon économe, le Suisse est parvenu à se payer le plus séduisant milieu de terrain d’Allemagne pour tout juste 40 millions d’euros : vingt pour Delaney et vingt autres pour son partner in crime Axel Witsel. Et voilà le Danois propulsé dans un nouveau costume qu’on ne lui prêterait pas forcément à seulement 27 ans : celui de daron. Il faut dire que dans un groupe où la moyenne d’âge dépasse tout juste les 24 berges, Delaney fait figure de leader physique. « Au vu du football que nous jouons ici, on en attend davantage de ma part. Pour évoluer avec de bons joueurs, il faut que tu sois bon toi-même. En tant que mec, je reste le même que d’habitude : je parle beaucoup, je cours beaucoup, je provoque des duels et idéalement, je les gagne. »
À Marco Reus le rôle d’accompagnateur pour les jeunes talents que sont Jadon Sancho, Cristian Pulicic ou Jacob Bruun-Larsen. À Delaney celui de motivateur sur le terrain. Sa facilité à jouer box-to-box, sa capacité à répondre présent sur la durée, lui permettent de compter parmi les meilleurs éléments alignés par Lucien Favre dans l’excellente première partie de saison réalisée par Dortmund (une seule défaite en dix-sept matchs). Et malgré le réveil tardif du Bayern (désormais deuxième au classement à six longueurs du BvB), il y a fort à parier qu’en continuant sur la même lancée, Thomas Delaney soit l’un des principaux artisans d’un titre qui échappe aux Schwarzgelben depuis 2012. « Ce qui compte pour moi, c’est que l’on raconte de bonnes choses à mon égard sur Wikipédia lorsque je terminerai ma carrière » , philosophait-il en décembre dernier. Pour information, sa fiche est actuellement disponible en 29 langues.
Par Julien Duez
Propos de TD recueillis par DW et Kicker.