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L’Étoile de Bobigny, sauvée par le don

Par Aymeric Le Gall
L’Étoile de Bobigny, sauvée par le don

Sur le point de mettre la clé sous la porte en fin de saison dernière suite à une baisse drastique de ses subventions, le club de l'Étoile de Bobigny a finalement réussi à sauver sa peau grâce à un appel au don et à l'aide précieuse de Jean-Marc Mormeck. Reportage dans un club amateur, moteur du quartier de l'Étoile.

« L’union fait la force. » Jamais la devise de l’Étoile de Bobigny FC ne lui aura aussi bien collé à la peau. À deux doigts de fermer boutique en fin de saison dernière après une chute vertigineuse de ses subventions, le club de foot du quartier de l’Abreuvoir a finalement gagné le droit de repartir pour une nouvelle aventure, suite au signal d’alarme tiré par les dirigeants et à l’appel aux dons qui a suivi. « C’était devenu très compliqué sur le plan financier, il a fallu qu’on alerte les parents de nos jeunes, qui ne se rendaient pas compte de l’urgence de la situation » , témoigne Amadou Cissé, président de l’EBFC. En effet, en deux ans, le budget du club a fondu comme un Mr. Freeze dans le Sahara, passant de 28 000 euros en 2014 à 3 000 euros la saison dernière. Rien que ça. Or, dans un quartier comme celui-là, laissé à l’abandon depuis plusieurs années par les pouvoirs publics, la mort du club de foot signifie beaucoup plus que le simple arrêt des compétitions. Ici, l’Étoile fait office de lieu de rencontres entre les gens du quartier, de centre d’accueil pour des centaines de jeunes et, par là, son rôle de vecteur de lien social en fait un élément indispensable de la vie locale.

La bourse et la vie

En diminuant de manière drastique les subventions allouées au club, la mairie de Bobigny avait une idée derrière la tête : fusionner les trois clubs de la ville pour n’en faire qu’un, puissant et incontournable. Sauf que dans le quartier, la pilule a du mal à passer. Amadou détricote le problème : « Le maire voulait une fusion, mais nous, on ne peut pas se permettre ça ici, le club a une histoire dans ce quartier. Après, lui, il a sa vision politique et je la respecte, mais on ne voit pas les choses de la même façon. Avec ce club de quartier, on a une vraie proximité avec les gens du coin, on connaît bien les jeunes qu’on encadre. Ça serait dommage de devoir mettre un terme à ça. » Ne pouvant compter que sur eux-mêmes, dirigeants et sympathisants du club ont remué ciel et terre pour aller chercher, euro après euro, la somme nécessaire à la préparation d’une nouvelle saison (entre 15 000 et 20 000 euros). Et en ce week-end grisâtre de septembre, en plein cœur du quartier, les survêt’ estampillés « Étoile Bobigny » sont bel et bien de sortie, signe que l’appel au secours lancé quelques mois plus tôt a porté ses fruits. Chacun, selon ses moyens, a tenu à mettre la main à la poche pour sauver l’une des rares associations qui maintiennent encore un tant soit peu de vie dans le quartier. En dehors du cercle des familiers (dirigeants, joueurs, bénévoles, parents), et de quelques entreprises de Seine-Saint-Denis, d’autres personnes, totalement étrangères au club, touchées par une histoire trop courante dans le monde du football amateur, ont tenu à participer. Comme cette directrice d’une maison de retraite de Normandie, qui n’a pas hésité à envoyer un chèque de 100 euros après avoir pris connaissance de l’affaire sur Facebook. « C’est génial de voir ça » , sourit Amadou, qui réfléchit déjà à un moyen de remercier cette généreuse donatrice à l’avenir.

Mormeck : « Ce n’était pas possible »

Mais il ne faut pas se leurrer, ces dons, aussi louables soient-ils, restent pour la plupart symboliques et le club n’aurait pu envisager de poursuivre ses activités sans une rentrée d’argent conséquente. Pour y parvenir, Amadou et son crew sont allés taper à la porte de Fouad Ben Ahmed, le président du CAC93 (Club des acteurs citoyens du 93), secrétaire de section du Parti socialiste à Bobigny et ancien employé au service jeunesse de la ville pendant près de quatorze ans. Préoccupés par la situation du club, cet ancien enfant du quartier a décidé de prendre les choses en main. Après s’être confronté à plusieurs promesses de soutien, non tenues depuis, ce militant associatif et politique qui connaît bien la chanson, a décidé de faire appel à une vieille connaissance dont le nom n’est inconnu de personne par ici, Jean-Marc Mormeck. « Si j’en suis arrivé à contacter Jean-Marc, c’est que je n’avais plus aucune autre solution, souffle Ben Ahmed. Sans lui, on n’en serait probablement pas là aujourd’hui, car le club aurait mis la clé sous la porte au mois de juin dernier. » Présent ce week-end pour célébrer la quasi-renaissance du club, le boxeur a joué un rôle majeur dans cette opération de la dernière chance : « Je connais Fouad depuis longtemps, on a grandi dans le même quartier de l’Abreuvoir, pas loin d’ici, mais on ne s’était pas vu depuis un petit bout de temps. Il m’a contacté sur Facebook et on a commencé à parler des problèmes du club. Sur le coup, je lui ai dit que je ne savais pas encore comment je pourrais aider le club, mais j’ai accepté de venir faire un tour pour rencontrer les gens et discuter un peu des solutions à trouver. On a fait ça un samedi matin, j’ai vu tous ces petits gamins qui s’éclataient sur le terrain, ils étaient mignons, et je me suis dit que ce n’était pas possible de laisser ce club mettre la clé sous la porte. »

Fusion = Disparition

La main qui, hier, martelait le visage de ses adversaires sur le ring est désormais solidement placée sur le cœur. Après un rapide coup d’œil à son carnet d’adresses, Jean-Marc Mormeck est allé tâter le terrain du côté de la fondation Engie et de son délégué général, Philippe Peyrat. « Ils sont allés au-delà de mes espérances puisqu’ils ont créé un vrai partenariat avec le club, se réjouit l’ex-donneur de gnons. C’est finalement un mal pour un bien ce qui est arrivé ici. » Non seulement Engie a injecté l’argent nécessaire pour sauver le club, mais ce partenariat naissant va plus loin puisqu’il devrait également permettre aux jeunes du club de rencontrer les champions du monde 98 et d’aller visiter les installations de Clairefontaine. « D’un autre côté, le club représentera la fondation Engie durant les matchs qu’ils vont organiser que ce soit en France ou à l’international, précise Ben Ahmed. Le but, ce n’était absolument pas de faire un one shot et de s’en aller. La première chose, c’était le sauvetage du club, ça, c’est fait. Maintenant si on peut aller plus loin, avec un vrai accompagnement des jeunes sur la durée, c’est super, car on est vraiment dans un quartier difficile. Et aujourd’hui, avec tout ce qu’on voit, la radicalisation des jeunes etc., c’est important de faire tout pour qu’ils puissent continuer à se retrouver dans ce quartier et à s’épanouir tous ensemble. »

Mais Jean-Marc ne s’est pas arrêté là et, en tant que délégué interministériel à l’égalité des chances, l’ancien boxeur n’a pas hésité à aller toucher un mot au ministre des Sports en personne, Patrick Kanner. « C’est vrai que j’avais cette possibilité d’aller le voir pour lui parler d’un problème concret, donc je ne m’en suis pas privé. On parle tout le temps de quartiers sensibles, ben l’idée, c’est de voir qu’est-ce qu’on peut faire sur le terrain pour améliorer les choses. » À l’arrivée, un emploi supplémentaire, payé par le ministère des Sports, devrait être créé au club. Si l’histoire se termine bien aujourd’hui, elle dit aussi quelque chose de moins réjouissant sur la manière dont les choses fonctionnent en France. N’ayant pu compter sur le soutien d’une mairie qui souhaitait une fusion afin d’ « avoir un gros club bien puissant à Bobigny » , selon les mots du maire lui-même, Stéphane Paoli (UDI), également présent lors du pot de début de saison, les dirigeants de l’Étoile ont dû, faute de soutien de la part des pouvoirs publics, se tourner vers une célébrité pour donner de l’écho à leur combat. Quand on sait le rôle primordial que joue un club comme l’Étoile dans un quartier comme celui-ci, difficile d’imaginer qu’une fusion (comprendre « disparition » , puisque dans ces cas-là, c’est toujours le gros qui ingère le petit) puisse avoir un effet bénéfique pour les jeunes du coin.

Un combat plus politique que sportif

« Certains parents nous disent que le club est la dernière chose qui les rattache vraiment au quartier » , appuie Amadou, en totale contradiction avec le maire de la commune. Même son de cloche du côté de Mormeck : « Les jeunes de ces quartiers ne doivent pas être pris en otage par les politiques, par un maire, disons les choses clairement, qui veut former un seul club, élitiste, et chacun doit pouvoir trouver sa place et se faire plaisir. Il ne faut pas mettre l’accent simplement sur la performance. Des clubs comme l’Étoile ont parfaitement leur place et leur utilité dans une ville comme Bobigny. La politique c’est une chose, l’épanouissement des jeunes en est une autre. » Principal opposant au maire de Bobigny, Fouad Ben Ahmed (PS) ne mâche pas ses mots au moment d’évoquer le projet de fusion initié par la municipalité : « Ils sont à mille lieues de se rendre compte que ce qu’ils font est destructeur et c’est ça qui pourrit nos quartiers. Les politiques ont parfois tendance à voir les associations comme étant soit avec eux, soit contre eux, alors que ce n’est pas du tout ça. Les associations comme celles-ci sont complémentaires de l’action municipale et non concurrentielles. Elles ne sont pas un fléau, mais malheureusement, force est de constater qu’aujourd’hui, toutes les associations qui sont autonomes et qui ne veulent pas rentrer dans une certaine forme de ligne de conduite sont, entre guillemets, atomisées. » Sur le city stade gonflable installé en plein cœur du quartier, les gamins tapent tranquillement un petit foot, tandis qu’à quelques mètres de là, les bénévoles s’activent pour faire chauffer le barbecue offert pour célébrer la survie de l’Étoile. Tous savent que le combat, aussi rude fut-il, a fini par porter ses fruits et cette année encore, L’Étoile représentera fièrement les couleurs du quartier.

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