- Les belles histoires du mercato
- Episode 7
L’été où Yann Lachuer aurait pu devenir Parmesan
Lors du mercato estival 1998, Yann Lachuer aurait pu faire le grand saut et rejoindre Parme, qui remportera dans la foulée la Coupe de l'UEFA. Un envol manqué vers l'étranger qui s'explique par le retard du club italien mais aussi l'obstination d'un homme : Michel Denisot.
Yann Lachuer fait partie d’un cercle privé. Celui des meneurs de jeu à l’ancienne, ceux qui puent le football et qui ont éclairé pendant de nombreuses années le championnat de France. L’un des derniers représentants de cette caste s’appelle peut être aujourd’hui Benjamin Nivet. Leur particularité ? Un amour inconditionnel pour un maillot, comme une seconde peau. Pour Lachuer, ce fut celui de l’AJ Auxerre et de la voix d’un homme : Guy Roux. « Durant ma carrière d’entraîneur, j’ai eu deux capitaines de ce style : Corentin Martins et Yann Lachuer. Vous savez, c’est le genre d’homme qui ne fait pas de bruit, un leader naturel, avec une toute petite voix mais qui, quand il prend le ballon, impose le respect » , explique l’ancien coach auxerrois. Le reste sera une histoire de pacte.
Un pacte humain déjà avec Guy Roux alors que Yann Lachuer, alors âgé de 25 ans, est suivi par les plus grands clubs français. Le RC Lens et surtout, l’OM de Courbis. L’entraîneur marseillais le pistera par téléphone durant de longs mois : « T’es mon choix numéro un. Si tu me plantes au mois d’avril, comment je fais avec mon numéro 2. Il faut que je sache » , racontait Lachuer à So Foot en juillet 2013. Guy Roux reprend : « Déjà, les agents avaient peur de moi. Dès que je décidais qu’un joueur ne partirait pas, il ne partait pas. Des histoires à la Lacazette, je n’en avais pas. Même si le gars me faisait la gueule pendant un mois, je ne cédais pas » . Yann Lachuer est alors au centre des convoitises, surtout que son contrat en Bourgogne expire à la fin de la saison.
Le jus d’orange et le deal secret
Nous sommes alors en pleine année pré-Coupe du monde. La saison précédente, Lachuer vient de faire monter la Berrichonne de Châteauroux en Ligue 1. De retour à Auxerre, il découvre la Coupe d’Europe et attire les regards étrangers. « J’étais libre, donc j’avais la possibilité de partir où je voulais. L’OM et Lens avaient de l’avance. Il y avait d’autres clubs français et Parme est arrivé. Le club avait même demandé aux joueurs français déjà dans l’équipe, Thuram et Bravo, de me vanter les mérites du groupe. Mais à cette époque tout le monde connaissait Parme. Sauf que pour jouer dans un club étranger, il fallait déjà avoir été international sinon tu étais mort. J’étais jeune, je voulais franchir une étape en France. Le joueur français n’a pris de la valeur qu’après la victoire des Bleus au Mondial » , explique aujourd’hui Lachuer. Et ce, même si le salaire proposé par le club italien surpasse les autres propositions. Choix du cœur.
Le reste est une affaire d’hommes. « Pendant la saison précédent son départ, je me rappelle être allé voir un match décalé au Parc des Princes. Les dirigeants du PSG m’ont demandé des renseignements sur Lachuer. On avait une confiance réciproque et j’ai bien sûr dit qu’il était très bon, le tout autour d’un jus d’orange » , détaille Guy Roux. Reste que l’affaire et la future destination du meneur auxerrois étaient déjà ficelées. Lachuer : « Je connaissais déjà Denisot depuis Châteauroux donc choisir Paris a été très facile pour moi. Je n’ai pas hésité surtout que je suis parisien d’origine » . Un contrat signé dans les locaux de Canal +, et un départ au PSG confirmé malgré le départ de Denisot. La suite ? Un Jay-Jay Okocha dans les pattes, et un aller simple pour la Corse dès 1999. Parme ne verra jamais Lachuer.
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Par Maxime Brigand