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L’Espagne, la racine Deschamps

Par Florian Cadu
4 minutes
L’Espagne, la racine Deschamps

Le 16 octobre 2012, l’équipe de France allait chercher un très bon nul en Espagne lors d’un match comptant pour les éliminatoires de la Coupe du monde 2014. Une performance qui servira de référence et qui lancera véritablement la période Didier Deschamps.

Et soudain, Olivier Giroud surgit. Les joues alors toutes lisses, très loin de sa barbe touffue portée aujourd’hui, l’attaquant place une tête imparable sur un service de Franck Ribéry qui permet à l’équipe de France d’arracher l’égalisation à la dernière minute de la partie et d’obtenir ainsi un nul prometteur en Espagne. Didier Deschamps et son staff ne s’y trompent pas et fêtent publiquement le résultat comme s’il s’agissait d’une victoire. « Je suis content pour les joueurs, car cela permet de cimenter leur bon état d’esprit et cela récompense leurs efforts, kiffe-t-il en conférence de presse. Ce serait bien aussi si cela pouvait amener un peu d’enthousiasme autour. Ce n’est pas parce que l’on a fait match nul que l’on est les plus beaux et les meilleurs. Je ne demande pas d’indulgence, mais on a une jeune équipe. La volonté, le caractère sont là. On ne fait pas tout bien, mais on a une marge de progression. Les gens ont vibré, le scénario est magnifique. Les joueurs ont ressenti un soutien et ils en ont besoin. » C’est qu’il s’agit là d’un véritable premier succès pour le sélectionneur aux manettes des Bleus depuis seulement quatre mois.

Pour comprendre l’importance de cette partie, il convient de reposer le contexte. La Roja, à l’époque championne du monde et d’Europe en titre, marche sur le continent et personne ne lui résiste. La France, elle, se cherche encore, après une élimination logique en quart de finale de l’Euro 2012 contre ces mêmes Espagnols, qui a plus ou moins coûté la place de Laurent Blanc, coupable pour certains d’avoir aligné un onze beaucoup trop défensif. C’est donc Deschamps qui le remplace. Et en ce mois d’octobre, il commence tout juste à dessiner son projet. C’est pourquoi ce match disputé à Madrid va lui servir de base pour la suite. Moins attentiste qu’avec Blanc, l’EDF propose une vraie opposition aux Espagnols. Mieux : elle montre un tout autre état d’esprit et refuse la défaite malgré un adversaire normalement bien supérieur sur le papier comme sur la pelouse. Se créant énormément d’occasions en deuxième mi-temps, les hommes de DD affichent une détermination sans faille et ressemblent (enfin) à une équipe capable de viser haut. « On y a cru jusqu’au bout, c’est quelque chose d’extraordinaire de revenir dans un match comme ça » , s’emballe même Giroud face à la presse après la partie.

Alors, bien sûr, les Tricolores peuvent compter sur quelques circonstances favorables. Après l’ouverture du score de Sergio Ramos à la suite d’un corner mal maîtrisé par les Bleus, Cesc Fàbregas foire par exemple un penalty juste avant la mi-temps. Mais c’est justement là que s’observe une différence avec le passé proche : les Français parviennent cette fois à en profiter et ne lâchent rien quand ils voient leurs tentatives rester infructueuses – comme ce but valable refusé à la 39e minute. Cette volonté se retrouvera notamment lors du barrage retour pour la Coupe du monde contre l’Ukraine un an plus tard (lors duquel l’EDF devra remonter deux buts de retard après le fiasco de l’aller). Signe que cette rencontre s’avère être la première prestation référence de l’ère Deschamps.

Les temps changent…

Il est d’ailleurs intéressant de souligner quelques constats encore valables aujourd’hui. Hugo Lloris, auteur d’une énorme performance (en témoigne le penalty arrêté), représente déjà le patron du secteur défensif, avec Laurent Koscielny qui n’a pas encore résolu ses problèmes de péno (c’est lui qui provoque celui raté par Fàbregas). Au milieu, Blaise Matuidi se rend indispensable aux yeux du sélectionneur – le Parisien parle même du « plus beau match de sa carrière » – et Moussa Sissoko représente le premier joker. Surtout, c’est Olivier Giroud et sa solide tête qui récoltent les lauriers après avoir remplacé Karim Benzema, en manque de réussite. Comme un symbole. Ce 1-1 constitue également un signe avant-coureur du lent déclin de l’Espagne. Si cette dernière terminera finalement à la première place du groupe, elle entrevoit ici les premières limites du trio Xavi-Andrés Iniesta-Xabi Alonso et de sa tactique du faux neuf (poste occupé par Fàbregas). Quatre ans et demi plus tard, Vicente del Bosque, Xavi, Alonso, Fàbregas ou Benzema ne sont plus là, au contraire de Giroud, Matuidi, Lloris, Koscielny ou Ramos. Quatre ans et demi plus tard, les courbes se sont croisées, et c’est la France qui est favorite.

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